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Intervention de François Hollande : le Ciel se rit…

d'Audrey Levavasseur   30 mars 2013
Temps de lecture 3 mn

J'étais partie pour tenter de résumer (en peu de mots) les messages de fond adressés hier par le Président de la République aux français. La France est dans un tel climat de tension et de trouble… J’attendais des messages forts. Je suis au regret de ne pas pouvoir en souligner ne serait-ce qu’un. J’ai allumé ma télévision avec des incertitudes. Je l’ai éteinte avec de profondes inquiétudes.

« Je sais quel cap je veux donner à la France. Je suis lucide. Je suis en ordre de bataille. » Est-ce pour s’en persuader lui-même ou pour en persuader les Français que le Président n’a cessé de prononcer de telles affirmations ?
Je ne suis pas de celles qui attendent tout des hommes politiques et qui cherchent le moindre prétexte pour leur tomber dessus. En revanche, je suis de celles qui détestent le mensonge et qui en ont peur, surtout lorsqu’il vient du gouvernement….  Parce que toute dictature commence par le mensonge.

« Nous allons faire les choses, vous allez voir, nous mettrons tout en œuvre pour… » Le Président de la République et son gouvernement sont dans l’attentisme, mais un attentisme de plus en plus troublé. Les visages des ministres, lors des questions au gouvernement à l’Assemblée Nationale par exemple, traduisent une fatigue, une lassitude, une peur aussi parfois, un manque d’assurance. Comme s’ils s’étaient attendus à une tâche plus facile et qu’ils découvraient aujourd’hui l’ampleur de la crise qui traverse notre pays. Comme s’ils avaient pensé que leurs prédécesseurs avaient tout mal fait et qu’en détricotant tout ce qu’ils avaient mis en place, ils feraient des miracles. Comme s’ils se rendaient compte aujourd’hui de l’ampleur de la tâche à accomplir et de l’impossibilité d’y répondre par des mesurettes et de la poudre aux yeux. « Nous allons faire les choses. Nous demandons à être jugés sur des résultats. » Pendant ce temps, le chômage augmente, le pouvoir d’achat baisse, les impôts s’accumulent, les Français souffrent. L’insécurité explose depuis plusieurs semaines, notre tissu industriel se meurt, il y a 10 000 chômeurs de plus chaque jour, et le Président de la République nous demande d’attendre sagement et de lui dire dans 5 ans s’il a oui ou non fait son travail et honoré ses promesses. Je préfèrerais un Président moins normal et plus rassurant. Un président qui ne prend pas le train mais qui prend le pays en main. Cette inconscience et cette irresponsabilité m’angoissent : « Nous pensions que la crise allait s’arrêter, elle a continué. » J’en veux à ce gouvernement de ne pas avoir pris la mesure de la réalité, d’avoir uniquement attribué les difficultés que notre pays traverse à la politique de ses prédécesseurs, j’en veux au Président de la République d’avoir voulu être Président de la République d’abord, pour réfléchir à ce qu’il allait faire ensuite. « Lorsque j’ai été élu, je savais dans quel état était la France » a-t-il affirmé. Alors pourquoi avoir fait tant de promesses qu’il savait ne pas pouvoir tenir ?

« Laissez-nous du temps, vous allez voir ce que vous allez voir, nous mettons tous les moyens en œuvre pour… ». Oui, nous le voulons bien. Seulement, les mesures qui ont été mises en place ne seront pas de taille à répondre aux enjeux et aux difficultés du temps présent. Et elles ne sont même pas appropriées. Ce n’est pas en mobilisant le Parlement sur un texte sur le « mariage pour tous » qui divise les Français que nous allons pacifier notre pays et trouver le temps de réfléchir aux vrais sujets ; ce n’est pas en décidant de donner des cours d’éducation sexuelle et de théorie du genre aux enfants dès le primaire que l’on va répondre aux priorités qui consistent à leur apprendre à lire, écrire et compter, ce n’est pas en ajoutant de nouveaux impôts aux entreprises que l’on va relancer la croissance et créer de l’emploi…

La France n’a pas besoin d’un discours terne, vide, et sans aucune perspective. Aujourd’hui, les députés s’inquiètent d’une absence de cap, de ligne directrice. Les conseillers désertent les cabinets : Mme Taubira, Ministre de la Justice, se retrouve seule place Vendôme !

« Je sais où je vais » a récemment déclaré Jean-Marc Ayrault dans l’hémicycle de l’Assemblée Nationale. Pourquoi a-t-il besoin de le dire ? Il suffirait de nous le montrer ! Au lieu d’être rassurantes, de telles paroles effraient : oui, Monsieur le Premier Ministre, nous espérons bien que vous savez où vous allez ! Mais pourquoi ne pas ne pas nous indiquer la direction si vous le savez vraiment ? Comment pourrions-nous être convaincus par nos dirigeants, alors qu’eux-mêmes ne semblent pas croire à ce qu’ils disent ?

Concernant le mariage homosexuel, le déni apporté par François Hollande sur la procréation médicalement assistée et sur les mères porteuses montre que soit il ne comprend pas les enjeux de ce texte, soit il les camoufle. Dans les deux cas, c'est grave ! Par ailleurs, réduire l'opposition à ce projet de mariage pour tous à des opinions "spirituelles" montre qu'il ne voit pas les enjeux de droit portés par ce projet. En termes de vision, c'est bien maigre…

« Je ne suis plus le président socialiste, je suis le président de tous les Français », a déclaré François Hollande. Si tel est le cas, comment le président « de tous les Français » a-t-il pu évacuer en moins de deux minutes le sujet du mariage gay, alors qu’un million et demi de citoyens étaient au pied de l’Arc de Triomphe dimanche et que 3000 d’entre eux étaient de nouveau là hier, devant les locaux de France Télévisions, pour manifester leur mécontentement de ne pas être écoutés ?

« J’aime la France, les Français, les familles » : peut-on aimer les familles et décider que l’école doit arracher l’enfant à tout déterminisme familial (projet de loi de refondation de l’école par le Ministre de l’Education Vincent Peillon) ? Peut-on aimer les enfants et décider que certains n’auront pas le droit d’avoir un père et une mère ?

Le gouvernement veut une France sereine, une France rassemblée, un France compétitive, une France forte sur la scène internationale, et ne prend que des mesures qui vont à l’encontre de tous ces désirs… Je laisse donc Bossuet conclure ce petit article avec cette phrase légendaire : « Le ciel se rit des prières qu'on lui fait pour détourner de soi des maux dont on persiste à vouloir les causes ».

 

Photo en page d'accueil : CC BY-NC-SA Parti socialiste

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7 Commentaires

  1. Aude

    Je vous conseille de lire un très bon  article de Patrick Jarreau au sujet de " la manif pour tous " qui fait écho à l'article d'Audrey   http://blogs.rue89.com/blog-politique/2013/03/29/la-manif-pour-tous-ne-ressemble-rien-et-ne-va-nulle-part-230000  voici un extrait pour donner le goût de ce qui précède … La surdité des autorités politiques et intellectuelles à la protestation des adversaires au mariage gay est révélatrice de ce qui est en cause. La gauche a raison, en un sens, de répéter, comme François Hollande encore jeudi soir, que cette réforme étend un droit sans rien retirer à ceux qui l’ont déjà. Les objecteurs ne revendiquent rien, en effet, pour eux-mêmes. Ils refusent un mensonge, une tentative pour imposer à tous l’illusion poursuivie par quelques-uns. Il n’y a pas, en cette matière, de compromis possible. Ceux qui croient à cette illusion n’y renonceront pas. Ceux qui la craignent ne s’y résigneront pas. La loi sera appliquée, mais son injustice foncière – sa violence, donc – ne s’effacera pas."

  2. martine

    monsieur bricolage et sa boite a outil se président est fou il ne croix en rien il croix en lui même il n'est pas pour le mariage homme femme puisque lui même n'est pas marier il vie dans le pèche constamment fait des enfants et laisse sa compagne comment voulez vous que l'on face confiance et que l'on mette un pays dans telle main la France est une marmite qui bouillonne si sa continue cela vas pète en france actuelle on survie nous sommes le car monde cache

     

     

  3. Bruno ANEL

    Cet éditorial trés politique est-il à sa place dans un site consacré à l'émerveillement et à la compassion ? On peut s'interroger. Je n'ai pas regardé François Hollande jeudi: j'étais à la célébration de la Cène du Seigneur et au temps d''adoration qui a suivi. De toutes façons, je n'en attendais rien de concret. Ecoutant une revue de presse jeudi matin, j'étais étonné de cette attente quasi-messianique face au discours présidentiel: "Discours de la dernière chance;;;redresser la barre… les Français sont suspendus à ce qu'il va dire", etc.. Dire quoi ?  Lionel Jospin l'a énoncé il y a douze ans: le politique ne peut pas tout, surtout quand les finances sont à sec. Nicolas Sarkozy a donné l'illusion de l'action en ayant une idée par jour, ce qui n'a fait reculer ni le chômage ni la dette. Tout est suspendu au retour de la croissance, qu'on attend comme l'oracle de Delphe. J'aurais tendance à croire que seule une relance de la construction européenne peut nous sortir de l'ornière. Que pèse la France face à la Chine, au Brésil, à l'Inde, aux pays émergents ? Seulement, aucun dirigeant européen n'a l'envergure de ceux qui ont construit l'Union. On pourrait aussi être attentif aux propos trés durs du pape François sur les questions économiques et sociales: nous sommes tous un peu responsables de la dette et des injustices. Quels sacrifices chacun est-il prêt à faire ?

    1. Stéphanie

      La petite leçon de morale religieuse de ce début de commentaire est tout à fait plaisante ! Moi qui ai suivi l'intervention de François Hollande jeudi soir, puisque les dévotions catholiques ne concernent pas la païenne que je suis (j'espère que M. Bruno Anel me pardonnera !), je considère que cet article a tout à fait sa place sur ce blog, que je lis avec beaucoup d'intérêt régulièrement.

      En effet, je trouve que c'est plein de compassion pour la vraie politique de dénoncer les mensonges actuels et d'affirmer que cela, ce n'est pas de la politique. La question n'est pas de savoir si la politique peut tout ou pas : évidemment que chacun est, au bout du compte, face à sa propre responsabilité (c'est bien justement ce que l'on reproche à l'assistanat de masse dans notre pays : d'infantiliser et de déresponsabiliser). Mais que M. Anel n'attende rien de concret de son Président, c'est bien là le drame. Pauvres petits Français naïfs qui formaient les derniers bastions de ceux qui croyaient encore à – peut-être, qui sait, un miracle… – un sursaut de dignité, de sérieux et de conscience ! Les voilà définitivement à terre.

      Que l'on s'offusque de ce genre d'intervention, de ce genre de mascarade, de ce genre de foutage de gueule du peuple, cela me semble la plus saine des réactions. C'est aussi, puisque c'est là le lieu, un signe de foi en autre chose et une façon de dire que l'on souhaite pouvoir s'émerveiller d'autre chose. En revanche, que l'on fasse le désabusé en disant que de toute façon les hommes qui nous gouvernent ne peuvent rien faire, cela me semble du plus sombre cynisme, un mensonge et une façon de se désengager personnellement : ne vous inquiétez pas, Monsieur, vous les ferez, les sacrifices, ou plutôt notre bon gouvernement vous les fera faire, et ce n'est pas vous qui en choisirez la mesure ! Je vous conseille donc d'aller regarder seulement là où c'est joli et où l'on peut dire, la bouche en coeur : "ah que c'est joli, que c'est beau, comme je m'émerveille !" et d'écrire de jolis articles sur ce blog, qui mettront du baume au coeur aux lecteurs que vous semblez prendre pour des imbéciles qui n'attendent pas la vérité – vous ne voudriez pas en entrer en politique par hasard ? C'est le moment, beaucoup de places vont se libérer dans les temps qui viennent…

  4. Henri Dumont

    Une étude du Figaro va dans le sens de cet article :

    http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2013/03/31/01016-20130331ARTFIG00128-entre-hollande-et-les-catholiques-le-desamour-continue.php

    On peut se désoler en voyant la division des chrétiens, mais surtout le nombre de catholiques pratiquants (40%) qui ont soutenu et soutiennent encore un programme politique aussi clairement du côté de la "culture de mort". En ce sens le désamour  dont parle l'article de TdC et le Figaro est un petit signe d'espérance : le réveil d'une conscience politique qui dépasse les clivages habituels.

  5. frédéric

    Je trouve que M. Hollande nous offre un bon critère pour objectiver sa politique :  Nous demandons à être jugés sur des résultats.

    Je proposeai bien que l'on s'y mette s'en tarder, et à la vue des résultats actuels, au nom de l'amour qu'il porte à la France, aux Français et(il faut tout de même oser la sortir celle là) à la famille, lui demander de laisser sa place ! Peut être que d'autre ont davantage pris la mesure de la crise, l'état du pays, etc. 

    Je ne sais pas si ce commentaire a sa place dans un blog dédié à l'émerveillement et à la compassion, mais je sais que émerveillé devant l'inconséquence et la capacité de déni de mon président, ma compassion va aux familles qui tentent d'élever leurs enfants en France, a tous ceux qui ont perdu leur emploi où tremblent de le perdre ; Ma compassion va également, à M. Hollande, comme à tous ceux à qui incombent de périlleux devoir de responasbilité. Justement, libérons le !

    Bon, ok, mon commentaire est un peut mordant, désolé cher Bruno ; pourtant je ne suis pas de ceux, je l'espère dumoins, qui attendent tout du politique (comme il me semble ne l'est pas non plus l'auteur de cet article) et qui renie l'engagement personnel… 

     

     

  6. Bruno ANEL

    Désolé de vous contrarier, chers amis lecteurs du blog. Lorsque je me suis permis de rappeler que les prises de position libertariennes de M.Paul Ryan, candidat à la vice-présidence des USA en 2012, étaient de vieilles lunes ultra-libérales en contradiction avec la doctrine sociale de l'Eglise, on m'a objecté que ce blog n'était pas fait pour la critique mais pour – je cite  – "l'émerveillement et la compassion". Dont acte.