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Avortement en Suisse : une affaire privée ?

Après l’Espagne et la France, c’est au tour de la Suisse de ressortir les vieux dossiers sur l’avortement. Cela montre bien que le débat sur la vie n’est pas figé. Il chiffonne les consciences sur un sujet qui touche en premier les enfants. Par Adélaïde Minguet. 


© Points-Cœur

En 2013, l’Espagne revient sur une loi votée en 2010 pour le droit ouvert à l’avortement pour toutes les femmes. Aujourd’hui, ce qui semblait acquis est remis en cause.

La France, elle, continue dans sa lignée du droit à tout et pour tous. C'est un changement lexical qui pique au vif les anti-IVG en renforçant le droit à l’avortement. Un amendement, adopté en commission par les députés en décembre, supprime du code de la santé publique la notion de "détresse" pour pouvoir recourir à une interruption volontaire de grossesse en France.

En Suisse, une votation aura lieu le 9 Février stipulant que « l’avortement est une affaire privée ». Ce texte, si le OUI est majoritaire, entraînera la non prise en charge de l’intervention médicale par l’assurance maladie.

Sous le slogan « Avortement : pour que chacun paie pour soi-même », l’initiative a été lancée par un comité composé de démocrates-chrétiens (PDC) et d'une légère majorité de démocrates du centre (UDC).

Le texte a été signé par presque 110 000 citoyens. Au-delà de 100 000 signatures, les textes sont soumis à votation. Les Suisses vont donc devoir se déplacer pour voter si OUI ou NON ils sont d’accord avec l’initiative « l’avortement est une affaire privée ». Le débat houleux sur la question du droit à l’avortement s’ouvre donc en Suisse sur un angle nouveau : est-ce une responsabilité individuelle ou collective ? Raison morale et / ou financière ?

En effet, cette initiative propose que l'interruption de grossesse ne soit pas incluse dans l'assurance obligatoire (sauf exception) car ce n’est pas une maladie.

Selon les promoteurs de ce texte, un co-financement « forcé » créera un conflit de conscience chez les anti-avortement. Ils ne veulent pas être responsables d’un acte qu’ils réprouvent. Selon Elvira Bader, ancienne députée PDC et co-présidente du comité d’initiative, il est contraire aux principes de la Loi fédérale sur l’Assurance Maladie (LAMal), dont « le but est de promouvoir la santé, de guérir ou de soulager des maladies et surtout de protéger les vies humaines, pas de les détruire ».

Si le OUI le remporte, il faudrait compter une économie de 20 millions de francs (environ 16 millions d’euros) par an.

 « Les primes des assurances privées ne sont pas si élevées pour qu’elles ne puissent se le permettre, objecte Elvira Bader. De plus, un avortement ne coûte pas très cher de nos jours : il ne mène pas à la pauvreté. En Autriche, il y a déjà presque quarante ans que les avortements sont soumis au régime privé, sans augmentation des avortements illégaux ou des risques de pauvreté. » D'autre part, « des études menées aux États-Unis montrent que, quand l'avortement est financé de manière privée, la sexualité est considérée avec plus de conscience et de responsabilité individuelle ». L'avortement resterait légal, mais son financement serait réglé de manière privée.

Mère de Misériorde

Parallèlement à tous ces débats, nous voyons grandir des associations qui œuvrent au quotidien pour accompagner, écouter, raisonner, des milliers de femmes qui sont en « détresse » face à une grossesse non voulue. Mais si, comme le disent les gouvernements en faveur de l’IVG, cette interruption devient si banale, pourquoi ces associations comptent-elles toujours plus de membres ?

Je conclurai par ce témoignage d’une amie, Clémence Hauteville de l’association Mère de Miséricorde, qui donne de son temps, sans relâche, aux femmes confrontées à cette question de l’avortement.

« Mère de miséricorde propose une écoute et un accompagnement aux femmes ou couples qu’une grossesse inquiète ou qui ont vécu une IVG et souhaitent en parler. Des équipes sont ainsi joignables 7/7 et 24/24, ainsi, dès qu’une femme ou un couple appelle un membre de l’association pour faire part de sa détresse ou de son inquiétude, celui-ci active neuf jours de prière et de jeûne auprès de personnes qui se sont engagées bénévolement dans ces chaînes.

Depuis près de 4 ans, je suis responsable d’une des chaînes de prière et de jeûne, nous prions pour de nombreuses femmes et leurs enfants. Il arrive parfois à l’issue de ces neuf jours que nous soyons informés par un écoutant : « Je vous annonce qu’elle a décidé de garder son bébé », et je vous assure que cette nouvelle, impossible de s’en lasser !

Il arrive aussi que nous apprenions que la femme n’a pas gardé son enfant, c’est évidemment douloureux mais nous savons que nos prières ne sont pas vaines et que ces femmes recevront beaucoup de douceur et de réconfort.

Mais il faut l’avouer, la plupart du temps nous ne savons pas ce qu’il est advenu de tous ces enfants, il est donc indispensable d’entrer dans un certain détachement, d’accepter totalement ce mystère et de croire que la vie est, quoi qu’il arrive, plus forte que tout.

En réalité, la société veut nous faire croire que l’avortement est devenu la seule solution et reste un soulagement à un « problème ». Vu sous cet angle, il est évidemment difficile de prendre du recul puisque qu’aucune proposition alternative n’est faite actuellement ! C’est un leurre de croire que le planning familial répond aux attentes des femmes qui sont désemparées par une grossesse inattendue. Retirer le soi-disant « mal » ne fait qu’accentuer la blessure.

Nous avons reçu de nombreux témoignages, la détresse est réelle après un avortement, les femmes avec lesquelles j’ai pu discuter sont encore en souffrance aujourd’hui. Nous avons souvent entendu cette phrase : « Je vis avec mais il ne se passe pas un jour sans que j’y pense ».

A l’inverse, il y a aussi ces grands bonheurs, je pense à cette rencontre en septembre dernier, avec une jeune fille de 24 ans. Cette jeune fille a décidé de garder son enfant alors que le père n’habite pas en France, de plus, la certitude qu’il reste auprès d’elle est plus que compromise et pour couronner le tout, son directeur a lancé une procédure de licenciement à cause de sa grossesse car ce n’était pas prévu dans ses plans. Cette jeune fille a décidé contre vents et marrées de tenir bon et a fait ce choix courageux de garder son enfant. Elle était si touchante, si femme ! Elle avait en elle ce mélange de vulnérabilité légitime et de force incroyable.

Voilà, Mère de Miséricorde, c’est ce temps où chaque femme peut s’exprimer sans peur, où chaque femme  trouvera beaucoup de compassion, de l’espérance et toujours de l’amour.

Sans condamnation ni jugement, juste un peu de douceur donnée afin de permettre à chacune, d’avoir un nouveau regard sur sa grossesse, actuelle ou interrompue, et pourquoi pas, d’oser envisager un chemin différent, un chemin nouveau, un chemin de vie, à la fois fragile et pourtant si fort. »

http://www.meredemisericorde.org/

Photo en page d'accueil © Points-Cœur

 

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3 Commentaires

  1. BONANSEA Gabrielle

    J’ai pu convaincre , il y a 4 ans , une amie de ne pas refuser la grossesse d’un enfant qu’un médecin avait diagnostiqué  » à risque de trisomie 21″. Je l’ai emmenée à Cotignac , ou lors de notre arrivée, commençait la messe! ( nous ne le savions pas)Pas praticante, cette « mère » m’a demandé ce qu’elle devait faire au moment de l’Eucharistie. Je lui ai donc dit de croiser les mains sur sa poitrine et de confier son enfant à Dieu.
    Bastian a aujourd’hui

  2. BONANSEA Gabrielle

    Bastian a aujourd’hui 4ans , c’est un beau petit garçon très sage, très intelligent.
    J’ai remarqué que sa maman porte une chaine avec la croix de Jésus au cou.
    Merci Seigneur!