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Début mars 2014, le réalisateur Malcolm Clarke et le producteur Nicholas Reed remportaient, lors de la 86ème cérémonie des Oscars, le prix du meilleur court-métrage documentaire pour “Alice: The lady in number 6”. Quelques jours auparavant, le dimanche 23 février, dans un hôpital londonien s’endormait à l’âge de 110 ans la figure principale de leur court-métrage.

Reconnue mondialement pour être la survivante la plus âgée de la Shoah, elle était également une pianiste éprise pour qui la musique ne fut pas seulement une passion mais également un art de vivre.

Ce qui motiva Malcolm Clarke et Nicholas Reed à réaliser ce court-métrage fut la recherche d’un super héros [1]. Non celui tiré de l’imaginaire et offert au grand public comme une fiction déroutante mais bien au contraire un super héros réel, accessible et dont l’héroïsme réside dans la simplicité et l’enthousiasme pour la vie. Ils rencontrèrent la perle rare dans la solitude de l’appartement numéro six d’un immeuble au nord de Londres : Alice Herz Sommer. Juive tchèque, née à Prague en 1903, proche de Gustav Mahler et de Franz Kafka, elle perdit sa mère et son mari dans la tragédie des camps. A 39 ans, elle est envoyée avec son fils Raphaël au camp de Theresiendstadt où elle sera employée à jouer du piano continuellement. Elle y offrira plus d’une centaine de concerts dont les interprétations seront un soulagement pour les prisonniers du camp et humaniseront à leur insu les gardiens eux-mêmes.

Ce court-métrage de trente-huit minutes nous fait expérimenter la grandeur de la musique dans ce qu’elle modela un être qui ne fut pas pour autant une pianiste de grande renommée mais sut accueillir son talent comme une mission pour traverser un siècle marqué par le drame de la guerre et l’absurdité des camps de concentration. Jusque dans les événements les plus tragiques de son existence, elle fut capable d’extraire l’imprévisible beauté.

Jusqu’à sa mort Alice Herz Sommer pratiqua le piano plusieurs heures par jour. Son acharnement, pourrait-on dire, ne fut autre que la conscience d’une mission pour laquelle est engagée la liberté de celui qui la reçoit et en assume, par un travail quotidien, la responsabilité : « Sans travail vous ne pouvez rien donner. Si vous aimez ce que vous faites alors travaillez, travaillez, travaillez ». Le fruit de ce travail, une femme pétillante, aimante chez laquelle ni la haine ni l’amertume, pour toutes les horreurs dont elle fut témoin, n’eurent jamais ni le premier ni le dernier mot : « La musique m’a sauvé la vie». C’est peut-être parce que pour elle, « la musique est…Dieu ! »

A travers son héroïne dévoilée à l’écran, Nicholas Reed nous offre un maître de simplicité et de joie qui revient sans cesse à son expérience, l’approfondissant sans se lasser et nous faisant goûter ainsi le mystère de la vie caché derrière chaque note, une vie comme un présent, une vie de cent dix années. En recevant l’Oscar pour son œuvre, Malcolm Clarke souhaita révéler deux aspects de la personnalité d’Alice l'ayant particulièrement touché ainsi que son équipe de tournage : sa joie et son étonnante capacité à pardonner. Il conclut par ces mots : « Voyez le film, elle vous aidera, je crois, à vivre plus heureux »[2]. Enjoy !

 

 

Pour acheter le documentaire « The Lady in number 6 » : http://nickreedent.com/

 

Autobiographie : « Un jardin d'Eden en enfer : la vie d'Alice Herz-Sommer »,
best-seller traduit en sept langues, 2008

Autre film réalisé par Arte: « Everything is a present » de Christopher Nupen, 2011.

 


[1] “Kids all over the world grow up on superheroes, what we, their parents, must remind them, is documentaries tell stories about ‘real superheroes.’ Superheroes are based on great people, real people, like Alice Herz Sommer.” – Nicholas Reed, Producer. Citation consultable sur : <http://nickreedent.com/>
[2] Citation consultable sur: <http://www.youtube.com/watch?v=VwGLB7ZfBbM>

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2 Commentaires

  1. édith stein

    Quelle belle rencontre! Quelle bouffée d’air frais et de jouvence! Quand on regarde ce petit bout de femme plissé par les années et son inaltérable joie, on se dit que le bonheur est une chose toujours possible. Même aux heures obscures de l’existence, il est possible de croire à une percée de lumière! Il faut se passionner pour sa propre vie, c’est un secret et un art!
    Merci Thomas!
    Your sister… of course!!

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