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Le père Marie-Eugène et la compassion pour les âmes

Le Père Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus , carme et fondateur de l’institut Notre-Dame de Vie, a été béatifié le 19 novembre à Avignon.

A priori, le Père Marie-Eugène (1894-1967) n’est pas une figure populaire de compassion comparable à Saint Jean Bosco, au bienheureux Antoine Chevrier ou  à Sainte Teresa de Calcutta. La vocation première de l’ordre du Carmel, dans lequel il entra en 1921, se trouve plutôt dans la contemplation et l’évangélisation .

Henri Grialou, de son vrai nom, connaissait pourtant de prés la pauvreté : né en 1894 au Gua, en Aveyron, il est fils de mineur et orphelin à 10 ans. Sa mère doit élever seule ses 5 enfants. Seule l’attention que prêtent des missionnaires à l’élève doué qu’il était lui permettent de faire des études en Italie puis au grand séminaire de Rodez. Pendant quatre ans, il partage la vie des « poilus » dans les tranchées. Ordonné prêtre en 1921, il choisit aussitôt l’austérité du Carmel plutôt que la vie relativement calme de curé aveyronnais.

Remarquable prédicateur et conférencier, il contribuera activement à la diffusion de la pensée carmélitaine, et en particulier à la diffusion de l’ Histoire d’une âme , autobiographie spirituelle de Ste Thérèse de Lisieux. Il sera appelé à exercer différentes responsabilités dans son ordre, jusqu’à la fonction de « vicaire général » pendant un an, après la mort du supérieur général des Carmes en 1954 . Quand il meurt en 1967 , il est encore provincial des Carmes d’Avignon-Aquitaine.

Béatification du Père Marie-Eugène le 19 novembre 2016

La compassion du Père Marie-Eugène va d’abord aux âmes, au cours d’un XXe siècle qui voit s’accélérer le processus de déchristianisation de l’Europe. 30 ans avant le Concile Vatican II et l’affirmation de la « sainteté pour tous » par Lumen Gentium, il a compris qu’il fallait mettre la prière contemplative à la portée de tous. Simple « commerce d’amitié avec Dieu », selon la définition de Ste Thérèse d’Avila, elle doit être accessible aux laïcs . La « petite voie » spirituelle définie par Ste Thérèse de Lisieux va l’aider puissamment dans sa démarche. Le Père part du principe qu’une vie d’oraison intense fera rayonner la foi et la charité chrétiennes « jusque sur les boulevards »[i] .

Ecouté attentivement dans quelques cercles intellectuels de Marseille, il fonde en 1932 une première communauté de femmes laïques qu’il installe dans le sanctuaire de Notre-Dame de Vie, à Venasque dans le Vaucluse. Son objectif est de leur donner une solide formation spirituelle avant de les renvoyer dans le monde exercer leur profession. Le groupe grandit et devient en 1948 un institut séculier reconnu par l’archevêque d’Avignon.

En 1948, il publie Je veux voir Dieu [ii], synthèse de la spiritualité carmélitaine rédigée dans un style très accessible. L’ouvrage sera plus tard tiré à des dizaines de milliers d’exemplaires en plusieurs langues. Car le groupe essaime en Espagne, au Mexique, en Allemagne, aux Philippines. Au début des années 60, les laïques consacrées de Notre Dame de Vie sont rejointes par un groupe d’hommes et des prêtres. L’institut à trois branches prend sa forme définitive et devient de droit pontifical en 1973. Dans les années 1980, un groupe de « foyers de Notre-Dame de Vie » ouvert aux couples  prendra forme et sera associé à l’Institut. De nombreux groupes d’oraison et de lecture de « JVVD » se sont constitués dans le monde.

Le 19 novembre 2016 , entre 9000 et 12 000 personnes dont 30 évêques, 400 prêtres et diacres, de nombreux frères carmes, tous venus des cinq continents, se sont rassemblés dans le parc des expositions d’Avignon pour participer à la béatification du Père Marie-Eugène de l’Enfant-Jésus proclamée par la cardinal Angelo Amato, préfet de la congrégation pour la cause des saints. Les reliques du Père sont désormais exposées dans la chapelle de Notre Dame de Vie. 

 

« Dieu Amour, toujours en action, nous sollicite et nous attend. L’orientation de notre amour vers Dieu, sa recherche amoureuse, la rencontre de notre amour avec Dieu-Amour, le commerce affectueux qui s’établit aussitôt : voila ce qu’est l’oraison. […] Retenons que Dieu a toujours la porte ouverte pour nous laisser entrer en Lui par la prière. Dieu est un feu consumant, une fontaine toujours jaillissante, le bien diffusif de lui-même. […] Livrés à la grâce de Dieu, vous ne vous appartenez plus. Cela doit vous conduire à un don inconditionnel dans la mission qui vous est confiée » (extraits de JVVD)

 


[i] Au souffle de l’Esprit, éditions du Carmel 1990 (recueil de textes du Père Marie-Eugène)

[ii] Editions du Carmel, réédité en 2014.

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