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Google Car : où allons-nous?

C'est officiel : Google vient d'arracher à Apple la première place dans la liste des entreprises les plus puissantes, tous genres et pays confondus. Ce recul de la marque à la pomme vient autant de son manque d'innovation depuis la mort de son fondateur, le très charismatique et regretté Steve Jobs, que de l'audacieuse créativité de son principal concurrent ces dernières années.

Google avait déjà fait sensation l'an dernier en dévoilant son prototype de "google glass", qui pour la première fois sortait la technologie internet de nos poches et de nos sacs pour l'intégrer aux traditionnelles montures. Mais le géant de l'Internet ne s'arrête pas là, et rien ne semble pouvoir endiguer sa créativité, du célèbre moteur de recherche à Google Earth, et des lunettes internet au… "Google Car".

Le "Google Car", qu'est-ce à dire ? Tenez-vous bien, le concept est décoiffant. Le "Google Car" c'est une voiture entièrement pilotée par ordinateur, équipée d'un système qui, en un clin d'oeil, analyse le terrain alentour — routes, obstacles, voitures, piétons, etc. —, et traduit tout cela en langage informatique, de sorte que l'ordinateur de bord gère lui-même arrêts, ralentissements, virages, etc. Quand vous montez dans votre véhicule, il suffit d'entrer votre destination comme on le fait pour un GPS, et ensuite il n'y a plus qu'à vous détendre, ouvrir un livre ou faire un somme : Google Car vous conduit à destination. Oui, vous avez bien compris : il n'y a pas de volant ni d'accélérateur. Pas de freins non plus d'ailleurs.

Face à cela, deux réactions sont possibles, qui ne s'excluent pas l'une autre. Première réaction : c'est incroyable ce qu'on arrive à faire aujourd'hui ! Seconde réaction : quel est le fou qui voudrait se retrouver sur le périphérique dans une voiture sans freins et sans volant ? Au-delà de ces réactions, toutes deux également sensées, je me pose une question : où va la technologie ? Quels critères guident son développement ?

Et cela nous ramène à la compétition entre Apple et Google, ou pour mieux dire entre Google et l'Apple du temps de Steve Jobs. En effet, il me semble que nous sommes en présence de deux philosophies très différentes. C'est une anecdote en apparence anodine qui m'en a fait prendre conscience.

Devant le succès des iPhones et autres iPads, qui ont suscité l'engouement pour les écrans tactiles, tel journaliste fit remarquer à Steve Jobs qu'il avait sonné le glas des ordinateurs traditionnels, et que ce n'était plus qu'une question de temps pour que le clavier soit remplacé à son tour par une surface tactile de type iPad. A la surprise de son interlocuteur, Steve Jobs rétorqua qu'il n'en était pas question, et son argument porte à réfléchir : l'écran, avait-il expliqué en substance, est fait pour l'oeil, et il lui est proportionné, en revanche le clavier est conçu pour les doigts, or les doigts sont un système mécanique, par conséquent un clavier mécanique leur est davantage proportionné. Waouh.

Ce que je retire de cet argument ? Pour Steve Jobs, que l'on puisse faire une chose n'est pas une raison suffisante pour la faire. La technologie est pour l'homme et doit lui être proportionnée. En d'autres termes : le développement de la technologie doit être précédé d'une réflexion anthropologique. Cette réflexion, comme dans l'exemple que nous avons donné, porte sur le corps mais aussi sur toutes les autres composantes de la personne humaine. C'est en effet en obéissant à la même logique que Steve Jobs soignait l'apparence de ses créations, car il savait que la beauté, bien que non fonctionnelle, est un besoin humain fondamental. Si contraignante que puisse paraître cette approche de la technologie, depuis Steve Jobs on ne peut plus dire qu'elle soit ennemie de l'innovation, ni de la rentabilité. Bien au contraire.

Et le Google Car dans tout cela ? Si la prouesse technologique est en elle-même admirable, la dernière invention de Google démontre surtout une chose : que rien ne leur est plus étranger que de garder la proportion entre la technologie et la nature humaine. Si on peut le faire, allons-y, faisons-le ! Quitte à faire un grand pas dans l'absurde, comme de parler à ses lunettes ou de retirer le volant d'une voiture. La technologie le permet : à nous de nous adapter. Que cette philosophie, ou plutôt cette absence de philosophie, soit le moteur de l'entreprise la plus puissante au monde n'est certes pas un fait rassurant, et peut nous laisser perplexes quant aux destinations futures de nos technologies. Espérons que d'autres Steve Jobs sortiront des rangs.

 

vidéo de la Google Self-Driving par Google

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7 Commentaires

  1. Bruno ANEL

    Je ne connaissais pas cette réflexion de Steve Jobs. Personnellement, je découvre un autre aspect de la révolution informatique, sans doute déjà familier aux plus jeunes: le « cloud’. Mes journaux , mes livres, mes morceaux de musique préférés, mes films, tout cela est dans le « cloud ». Même pas sur ma tablette ou mon Iphone qui ne sont que des capteurs à partir desquels je récupère également radio, télévision, reportages, encyclopédie, bréviaire (mais oui!)… Les rayonnages remplis de livres sont-ils condamnés ? Sans doute pas, mais le fait est que les librairies fondent dans les grandes villes. Au XVème siècle, des universitaires s’alarmaient du développement de l’imprimerie: à quoi bon apprendre si c’est dans les livres ? Aujourd’hui, les puristes en sont réduits à dire que « l’odeur du livre » leur manquerait. Certes… mais c’est bien pratique de partir en voyage avec sa bibliothèque, ou d’écouter Lulli pendant une séance de kiné. Ne boudons pas notre plaisir.

  2. Christine

    Qui a déjà tenté de taper sa thèse de doctorat sur un clavier tactile s’est vite rendu compte que le clavier mécanique est plus adapté à nos doigts: je ne sais pas s’il y a de quoi en déduire toute une anthropologie de Steve Jobs. Il me semble que c’est une simple recherche – pleine de bon sens en effet – d’efficacité.

    Quand à Google, je ne trouve pas ridicule de parler à ses lunettes si celles-ci obéissent, pas plus que de me laisser conduire par une voiture sans freins ni volant du moment que la technologie est arrivé à un niveau de développement tel que je cours moins de risques en lisant un livre qu’en prenant moi-même les commandes, sachant qu’une machine ne connaît ni fatigue ni distractions ni recherche d’adrénaline dans la vitesse.

    Je ne trouve pas cela ridicule, mais la question de la finalité reste posée. Chez Google, l’efficacité n’est pas simplement au service de l’homme: elle en devient la fin dernière, quitte à le transformer. Le transhumanisme doit en faire un être toujours plus performant, rapide et pourquoi pas, immortel.

    En vue de… quoi?

  3. Bruno ANEL

    J’ai déjà tendance à m’ennuyer dans une voiture à embrayage et boite de vitesses automatiques, alors dans une voiture sans volant… Mais il faut penser aux commodités apportées aux personnes handicapées par le Google Car. A quel prix ?

  4. C’est déjà très claire qu’on est déjà dans un monde fait pour l’homme, où l’homme… ne sert plus à rien! Bienvenus dans le film de Wally pour ceux qui l’ont vu, où les humains se convertissent en gros bébés obèses et assistés par des ordinateurs qui les empêchent de prendre la moindre décision pour préserver leur confort!
    C’est ce qui me frappe le plus de l’Europe et des Etats-Unis, mais malheureusement c’est le train que rattrapent la majorité des pays, et à grande vitesse!!

  5. Michel

    Merci pour ce site que je trouve extraordinaire MAIS, vous êtes vous renseigné sur la personnalité de ce monsieur ???? Ce n'est pas très reluisant et je ne suis absolument pas sûre qu'il faille un nouveau Steve Jobs !!! Prions pour son âme puisqu'il est mort d'un cancer il ya quelques années.

    Bien fraternellement,

    Anne