A l’occasion du Festival International du Film Publicitaire qui s’ouvre demain à Cannes, nous avons rencontré Hervé de Clerck, fondateur d’ACT Responsable (Advertising Community Together), une initiative à but non-lucratif dont la mission est de fédérer, promouvoir et inspirer les bonnes pratiques de la publicité et de la communication en faveur de la responsabilité sociale et du développement durable.
À travers sa collection, ACT Responsable montre comment les professionnels de la communication peuvent utiliser leur talent, la créativité, pour jouer un rôle positif sur les grands enjeux actuels.
– Qu’est-ce que la publicité responsable ?
En réalité il y a plusieurs notions derrière cette appellation générique. D’abord, au premier degré, le sujet traité : l’engagement des publicitaires pour des causes responsables : service public, associations et grandes causes. Au deuxième degré, la pratique responsable de l’industrie de la publicité, par exemple la recherche de moindre utilisation de produits polluants en affichage (papier, encre, colle) ou encore le comportement social dans les agences. Au troisième degré, la parole responsable, c'est-à-dire la réflexion sur notre responsabilité au niveau des messages que nous émettons.
– Qu’est-ce que la publicité a à voir avec le développement durable ?
Là encore, plusieurs niveaux : Le développement durable suppose de notre part à tous une modification profonde de nos comportements. La force de la communication publicitaire est d’influencer sur les opinions et les attitudes et de favoriser les changements de comportement. A ce titre, elle joue un rôle important. Il ne s’agit pas seulement de promouvoir les causes, mais également la façon dont nos messages commerciaux sont communiqués : la représentation de la femme, des institutions, des rapports sociaux, de l’argent, à une influence sur les attitudes. Nous devons prendre conscience que nous laissons une sorte d’ « empreinte carbone » dans le cerveau des gens !
– D’où vient ce nouveau concept ? Quels en sont les enjeux ? au niveau de l’entreprise ? au niveau du public ?
L’évolution des techniques de communication ces dix dernières années, le passage de mass media à des campagnes participatives plus ciblée, basées sur les réseaux sociaux et les formats web, ont transformé radicalement la prise de parole du secteur marchands comme non marchands. Les agences se sont trouvées face à de nouveaux challenges. Plus qu’un simple rêve, elles doivent désormais intégrer les préoccupations éthiques et sociales, véhiculer des valeurs citoyennes. Les cibles se sont atomisées, le public est irascible sur la façon dont on le dérange, craignant la manipulation. L’influence des ONG s’est parallèlement accrue, un contexte pas simple pour les professionnels de la communication.
Pour arriver à convaincre, les agences doivent se montrer encore plus créatives dans les messages mais aussi dans la façon dont elles tentent de le délivrer. Dans ce contexte, les agences doivent se doter d’équipes d'élite de designers et de programmeurs afin de créer des campagnes étonnantes grâce à des technologies ultra sophistiquées. De toute évidence les nouvelles technologies et la forte hausse des smartphones jouent un rôle fondamental dans l'expérience proposée aux citoyens.
– Quelle est l’intuition d’ACT Responsible ? Quelles sont ses activités ?
Au départ ACT n’était qu’un cri lancé par quelques publicitaires au lendemain du 11 Septembre. L’idée était de témoigner notre solidarité aux familles des victimes, des secouristes et d’une dénonciation du terrorisme.
Nous avons appelé la communauté publicitaire à créer des campagnes que des medias volontaires ont reprises et que nous avons exposé au Festival International de la Publicité a Cannes. Dix ans après, cela reste une de nos missions – nous venons de faire un appel à création en hommage au peuple japonais – et nous réalisons plus de 20 expositions par an dans le monde entier pour témoigner de l’engagement des publicitaires.
Nos activités se sont aussi élargies aux 3 degrés que j’évoquais tout à l’heure par exemple avec l’émission « Une Minute de Responsabilité » sur Euronews, l’animation de NG’Ad, Club de DirComs d’Associations non marchandes, la création d’AdWiser un collectif de réflexion et de proposition sur les pratiques responsables de notre industrie, ou encore des prises de parole lors de congrès et festivals professionnels pour faire réfléchir, comme le séminaire que nous proposons cette année à Cannes sur le thème : « Comment la Publicité peut contribuer à résoudre les problèmes sociaux ».
Nous montrons que si la publicité est un vecteur essentiel de croissance économique, notre industrie qui n’a pas une excellente image joue aussi un rôle positif – de façon responsable – dans les domaines sociaux et environnementaux.
– Quel avenir voyez-vous pour la publicité responsable ?
Il me parait évident que ces problématiques vont continuer à prendre de l’importance. Non que je crois que nous soyons atteints d’une soudaine pulsion morale ! Mais tout simplement pour des raisons commerciales. De plus en plus, les consommateurs, exigent des producteurs une transparence et une éthique, comme d’ailleurs les citoyens de leurs élus. On voit la force des réseaux sociaux dans leur capacité à faire changer les pratiques des marques comme à faire tomber des régimes corrompus.
La prise de pouvoir des gens est en marche et cela ne s’arrêtera pas.
– Où se renseigner pour en savoir plus ?
Nous sommes au Festival International de la Publicité à Cannes du 19 au 23 Juin avec une exposition de campagnes sociales et environnementales et vous retrouverez toutes nos activités sur www.act-responsible.org.