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Un journaliste en quête d’humanité

Pour compléter le portrait ébauché dans l'article précédent, voici quelques lignes de témoignages de personnes qui ont connu James Foley. Ils nous permettent de nous approcher de cet homme qui était passionné par l'humanité de ceux qu'il filmait.


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Après son retour de captivité en Libye, où il avait été retenu en otage pendant un mois, James Foley disait aux étudiants de son ancienne école de journalisme : "Quand vous commencez à prendre des risques, que vous avez une alerte sérieuse, vous devez vraiment vous poser des questions. Cela ne vaut pas votre vie." Mais James Foley s’est  posé des questions et a dû estimer que si, le combat qu’il menait pour raconter les histoires des civils pris dans le chaos de la guerre, valait la peine de courir des risques… il est retourné en Libye pour couvrir la chute du régime de Kadhafi. Daphné Benoit, journaliste de l’AFP l’interrogeait sur les raisons de ce choix qui pouvait paraître si choquant après un mois de détention dans des conditions extrêmement difficiles : "Un soir je n'ai pas pu m'empêcher de lui confier mon étonnement. Comment avoir envie de revenir ? Pudique, James m'a répondu en souriant que c'était une évidence, qu'il lui fallait couvrir l'histoire jusqu'au bout. Ce n'était pas une tête brûlée. Juste un journaliste tenace. Il a bien fait : le 20 octobre 2011, James était parmi les rares journalistes sur place lors de la capture et l'exécution de Kadhafi à Syrte."

Un journaliste tenace, d’une grande simplicité et d’un solide sens de l’humour, qui connaissait les risques de sa lutte pour la liberté et les civils victimes des conflits. C’est cette ténacité et cet amour de la liberté que souligne John Foley, son père : "Tout cela n'a aucun sens. La façon dont il est mort est affreuse. Cela témoigne de son courage. Nous pensons qu'il est mort en martyr, en martyr pour la liberté." C’est ce sens du sacrifice que met également en avant sa mère sur la page Facebook consacrée à la libération de son fils : "Il a donné sa vie en essayant de montrer au monde les souffrances du peuple syrien" ; elle poursuit : "Nous remercions Jim pour toute la joie qu'il nous a donnée. Il était un fils, un frère, un journaliste et une personne extraordinaire."

La cause que défendait James Foley – la liberté et de la défense des civils pris dans la tourmente des conflits – est celle de beaucoup d’autres journalistes. Mais la particularité de James Foley est qu’il ne défendait pas l’idée de liberté ou la masse des civils. Ce qui le poussait à repartir inlassablement sur les lieux les plus dangereux c’était l’humanité et les personnes qu’il rencontrait plus que l'adrénaline ou la recherche d'un bon scoop. A un étudiant l’interrogeant sur le choix des lieux de ses reportages, il répond simplement : "Il y a une humanité incroyable en ces endroits".

C’est cette humanité qu’il s’efforçait de montrer dans ses reportages. "Avec sa petite caméra discrète, son casque et son gilet pare-balles, James Foley était capable de se glisser sur les lignes de front, où il croisait souvent des civils fuyant dans l'autre sens ; il s'abritait parfois avec eux au milieu des bombardements", raconte Djilali Belaïd, qui avait été en contact avec lui en tant que coordinateur vidéo pour l'AFP au Moyen-Orient. "Ses images parlaient souvent d'elles-mêmes, mais ses emails accompagnant ses vidéos mentionnaient toujours les noms des personnes interrogées, et même les noms des personnes mortes qu'il avait filmées après des bombardements. Pour lui, il n'y avait pas de victimes anonymes."

Jean Despruniée  

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