Entre Saint-Malo et le Mont Saint-Michel, se trouve un lieu unique en France, un lieu spécialement dédié à découvrir les mystères des cathédrales : le Cathédraloscope de Dol de Bretagne. C’est dans cette cité médiévale que nous avons fait la rencontre de son directeur, Olivier Delépine.
Architecte passionné par ces monuments, il ne nous a pas simplement raconté l’histoire des cathédrales gothiques mais nous a invité à nous laisser submerger par l’expérience des hommes qui ont participé à la construction de la cathédrale Saint-Samson. Cette cathédrale est très particulière : loin d’être parfaite, sa structure nous montre l’histoire de son édification.
Comment découvrir les mystère d’une cathédrale ? Tout d’abord nous devons faire attention à son architecture, la matière qui la constitue ainsi que sa forme. La manière dont les cathédrales ont été construites, en particulier la cathédrale Saint-Samson de Dol de Bretagne, nous montre le passage d’un style d’architecture romain, héritier de l’ancien bâtiment, massif et robuste, vers un style gothique plus léger et lumineux. Cette transition, incarnée dans le bâtiment, nous dévoile une technique de construction en quête de perfectionnement, sans que l’art ne soit complètement maîtrisé. Les hommes qui l’ont bâtie, nous ont laissé le témoignage de leurs imperfections ainsi que de leurs efforts pour se dépasser.
Mais avant d’être un monument d’architecture, une cathédrale est un désir de transcendance, un témoignage du combat de l’homme pour se rapprocher de Dieu. Ce besoin méritait tous les efforts de la société. L’ampleur des ressources employées ainsi que le temps qu’a duré sa construction nous parlent de l’aventure d’une humanité consciente de sa transcendance. La manière de transformer l’espace pour faire la place à Dieu, d’utiliser les pierres pour donner la forme à l’édifice de telle sorte que l’élément le plus important soit la lumière, évocation de la primauté de l’esprit sur la matière, reflètent la quête de Dieu par les hommes. Les arcs brisés, les magnifiques rosaces et les grands vitraux permettent à la lumière de transpercer les murs de pierres pour illuminer l’intérieur du temple, de la même façon que l’Esprit de Dieu vient illuminer les cœurs.
Malgré cette inspiration divine qui est à l’origine de la construction des cathédrales, la nature humaine fait aussi face à ses propres limites, non seulement techniques, mais également spirituelles. Une fois maître de l’art de construire l’édifice, l’homme n’a pu s’empêcher de désirer dépasser ses limites. Ainsi, les bâtisseurs ont cherché à faire des édifices plus grands, plus hauts, plus beaux. Les prouesses techniques dépassent la recherche spirituelle, et le superficiel fait oublier, pour un instant, l’essentiel. L’orgueil et la démesure du cœur de l’homme conduisent à la tragédie : en 1248, la voûte du chœur de la cathédrale de Beauvais s’écroule, à l’image de la tour de Babel. La quête de l’homme pour rejoindre Dieu se trouve limitée par son ambition et par son amour-propre.
Aujourd’hui, les vestiges du passé nous accompagnent modestement, presque silencieux, occultés par l’agitation de notre mouvement incessant entre le travail, les transports en commun et nos rencontres. Mais ils sont là, présents et disponibles pour ceux qui voudraient les interroger. Chaque fois que nous nous trouvons face à un vestige du passé, nous faisons la rencontre des hommes et des femmes de jadis, ceux qui nous ont laissé un témoignage de leur passage sur cette terre même où nous marchons. De la même manière que le vieux rasoir de notre grand-père, oublié dans un placard, nous réveille le souvenir de sa vie, ces immenses montagnes de pierre et de foi que sont les cathédrales, veulent nous raconter leur histoire et celle de ceux qui les ont bâties. À l’heure où Notre-Dame de Paris se trouve endommagée, ruinée et inaccessible, ce morceau brûlant de pierre nous a rappelé avec force et douleur le mystère de sa présence parmi nous, au-delà de sa simple manifestation en tant que destination touristique mondiale.