Home > Dossier Charles Péguy : retrouver la sève du christianisme > Cette fois-ci, on a pris seulement garde à elle…

Comme on voit, comme on sent la sève au mois de mai
Irriguer la dure écorce,
Ainsi on sent, ainsi on vit au mois des morts
Au mois où l’on commémore les morts
Une sympathie pour Péguy
Germer au cœur des forêts de Compiègne
Dans le cœur d’une assemblée réunie
Pour sa petite espérance
Rassemblée en une grande maison,
une association où œuvre la compassion
Qu’habitèrent quelques dizaines d’âmes
Qui se laissèrent toucher
Qui se laissèrent guider
Par la petite espérance et les vers qui la font miroiter.

Les pieds embourbés dans les empreintes d’argile
De ceux qui voilà cent dix ans
Tournèrent une dernière fois les yeux vers le ciel,
Les pieds embourbés dans les empreintes
Des soldats,
Ils ont suivi leurs pas dans les galeries
Ils ont suivi leurs pas jusqu’à l’abri où à la lueur des bougies
Ils prient.
Ils prient pour ceux qui défendirent leur pays
Ils prient pour ce sang qui irrigue les sillons de leurs champs
Puis se taisent.
Ils se taisent.
Qu’ils soient ensevelis dans un dernier silence.
Sur les terres qu’ils parcourent
Sur les terres sacrées qu’ils parcourent
Les terres aimées
Confrécourt
Monsieur P. les guide
Lui qui a cultivé les sillons des tranchées
Les sillons nés des tranchées.
Le laboureur leur enseigne comme on aime cette histoire, cette glaise,
Leur histoire, leur glaise,
Dont ils sont faits, dont ils sont façonnés
Qui les affecte, qui les a fascinés.
Debout sur ce terreau, le paysan rend gloire à un calvaire qu’il a lui érigé
Une croix sacrée sur cette terre maudite,
Une croix brisée pour une terre consacrée.
Couché sur son gibet, le Christ gît à terre
Au pied du piédestal
Comme un soldat tombé
Abandonné.

Sur la route que martèlent les pas pénétrés
De cette cinquantaine de mes amis
La petite espérance
S’avance.
Elle passe sous son Porche et s’ouvre à eux.
Parle nous petite espérance.
Quelle langue choisiras-tu pour te révéler ?
La voilà qui paraît sur les lèvres érudites de N. F.
Le professeur présente, explique, creuse, approfondit,
Il introduit son assemblée au mystère,
Au mystère de la deuxième vertu,
Et eux passent sous son Porche.
Ils y goûtent, ils s’y plongent, s’en pénètrent et en vibrent
Tant que le soir venu, les voilà qui la chantent, qui la clament, qui la jouent, qui l’accompagnent.
Pour une soirée ses sœurs sont escortées par ces âmes d’artistes qui, texte en main, le font résonner.
Résonnent les cordes du piano,
Résonnent les voix qui déclament les vers,
Résonnent les chants porteurs d’espérance,
Résonne dans les cœurs, vertu, petite sœur !
Animés, ranimés, exaltés à la flamme de Péguy,
Notre cénacle en cercle danse dans la nuit,
Tant qu’il le peut, tant que le meut cette joie du jour trop ardente pour s’assombrir quand s’assoupit le ciel.
Mais le sommeil est l’ami de l’homme.
Le sommeil est l’ami de Dieu.
Je n’aime pas celui qui ne dort pas, dit Dieu.
Craignant son commandement, la troupe achève complies
Entre tes mains, Seigneur, ils remettent leur esprit
Pour la nuit.

Sur la route entre ses deux sœurs, la petite espérance
S’avance.
L’une réunit ce peuple dans l’Eucharistie,
L’autre l’unit dans un même cœur
Un cœur de compassion
Un cœur d’abandon
Un cœur de pardon.
Portés par les deux grandes sœurs,
Les néophytes écoutent
Les nouveaux péguystes épousent la petite, l’immense, la belle
La petite espérance,
Car cette fois-ci on a pris
Seulement
Seulement garde à elle.

 

 

 

 

 

 

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