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« Tu es une bonne amie »

Ce jour-là, Fufu (une amie chi­noise), nous accom­pa­gne en visite à la maison de retraite Atlantis. L’infir­mière nous annonce que Man, la dame chi­noise que nous visi­tons depuis peu n’est plus là. Sans plus d’expli­ca­tions, elle nous parle de Margorie qui vient d’arri­ver et a besoin de com­pa­gnie.

(…) Je me dirige avec Fufu vers la salle com­mune de l’étage. (…) Margorie est là. Dans un fau­teuil rou­lant. Bien fati­guée. Une dame à côté d’elle se moque de ses che­veux courts : « She’s a man » (« C’est un homme »). La blague qui fait rire sa voi­sine, fait pleu­rer Margorie. Si elle a les che­veux si courts, c’est parce qu’elle se bat contre un cancer depuis neuf ans. Je sèche ses larmes et nous dis­cu­tons. Une autre dame remar­que le cha­pe­let autour de mon poi­gnet. Voulez-vous prier ? Elles accep­tent avec joie et nous voilà réu­nies comme de vieilles amies.

La semaine sui­vante Margorie est à l’hôpi­tal. Elle res­pire dif­fi­ci­le­ment, parle de moins en moins et son regard se fait vague. Au fil des jours, nous conti­nuons les visi­tes. La veille de Noël elle demande : « Tell me the truth. Am I going to die ? » (« Dis-moi la vérité. Vais-je mourir ? »). Devant son cri d’angoisse, toute parole semble déri­soire. Je for­mule une pauvre réponse pour lui assu­rer qu’on s’occupe bien d’elle à l’hôpi­tal mais c’est de la pré­sence d’un Autre dont elle a besoin. Je baisse le volume de la télé, ajuste son masque à oxy­gène, lui donne de l’eau, laisse Père Gonzague lui parler. « I believe ! » (« Je crois ! »), nous dit-elle. De son corps et de son cœur meur­tris, elle a encore tant à donner. Après un petit moment de silence, elle tourne vers moi des yeux rem­plis de paix et d’amour et me dit : « You are a good friend  »…

Noël passe. Chloé et moi lui ren­dons une der­nière visite. Elle a été trans­fé­rée à l’Hospice, la partie de l’hôpi­tal qui accueille les per­son­nes mou­ran­tes. Un petit mira­cle a eu lieu : il y a du monde à ses côtés. Son fils, sa fille et sa sœur sont là ! Elle me raconte com­bien Margorie a été une mère pour elle. Elle l’a qua­si­ment élevée. Je suis heu­reuse de savoir Margorie si bien entou­rée.

En page d'accueil : photo de Pia et Marian (volontaire au Point-Cœur de Brooklyn jusqu'en décembre 2012)

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