L’un des miracles de la ville de New York est d’attirer à elle tant d’hommes et de femmes d’origines, de cultures, et d’ambitions si variées. Une capitale qui semble rassembler la beauté et la souffrance de toute l’humanité. Tant de rencontres, de visages qui m’interpellent. Il y a quelques semaines j’étais à la cathédrale Notre-Dame du Liban à Brooklyn. Une veillée de prière y était organisée pour prier pour la paix en Syrie. Gregory Mansour, l’évêque maronite, y avait convié des membres de l’Eglise, des représentants des confessions juives et musulmanes, des enfants, des familles, quelques diplomates et journalistes.
Alep © Aurore Chaussepied
L’église est pleine. Entre deux psaumes chantés se succèdent les discours. Des mots qui parlent du peuple syrien et implorent pour lui la paix. Une soif qui devient la nôtre. « D’une certaine façon, je crois que nous venons tous de Syrie » dira le représentant musulman avant de nous guider dans la prière du Notre Père.
« Que vienne une paix comme des fleurs sauvages, soudaine » demande ensuite le rabbin du voisinage. Entre ces différentes interventions, les voix de la chorale sont comme une. Des voix de femmes très fortes sur des mélodies orientales toutes simples. Elles nous rappellent notre espoir d’être un jour vraiment un. « Aucun cœur ouvert à la réalité de la souffrance ne peut manquer d’être touché » (monseigneur Octavio Cisneros).
Elles sont quatre ou cinq femmes à former la chorale. Qui sont-elles ces sentinelles d’espérance ? Je pose quelques questions à Rosina. Elle vient de Banias, ville de la côte syrienne et habite les Etats-Unis depuis presque 20 ans. Elle a grandi entre deux frères et a commencé à chanter dans la chorale de son église à 12 ans. « En plus il s’est avéré que j’ai une bonne mémoire pour les rythmes musicaux et une voix bien forte (parfois un peu trop). » Pour préparer les chants, elles se réunissent simplement cinq minutes avant la messe. Pour son peuple elle prie, « pour qu’il fasse face à la crise actuelle avec espérance, foi et solidarité. »
Le chant maronite reflète dit-elle « une spiritualité très profonde, une nostalgie authentique pour nos racines démographiques et chrétiennes ». « Il éclaire la vie dans toute sa splendeur comme dessinée par Jésus-Christ et vécue par Saint Maron et nos ancêtres. » Ce chant a acquis sa richesse, dit-elle, au cours d’un trajet tourmenté par des génocides et une série de déplacements forcés. Le tout reste « embaumé par une musique orientale et mélangé à merveille avec des acquis occidentaux ».
L’hymne du Qadeeshat (Kyrie eleison) (que vous pouvez écouter ici, http://www.maronite-heritage.com/Hymns.php) est l’un des plus beaux trésors de la liturgie maronite. Chanté en guise de conclusion lors de cette veillée de prière, il nous rappelait que la paix est loin d’être un concept, une vague idée ou un idéal à atteindre. Ce soir-là, à la cathédrale, la paix portait un nom. Le nom de Rosina. Le nom de chaque membre de la chorale et le nom de chacun, tous réunis, qui joignant sa voie à celle des autres témoignait de La seule présence qui est paix.
J'ai écouté quelques chants maronites donnés par l'article et je me suis régalée. Je vous conseille vraiment d'avoir la curiosité de cliquer sur le lien : vous serez agréablement surpris!