Lettre de J. Lefèvre, San Salvador (El Salvador), mars 2011
Avec Ana-Laura, j’ai été très marqué lors d’une de nos dernières visites hebdomadaires à l'hôpital Bloom où nous visitons un service d’enfants atteints du cancer. Ces enfants sont pour la plupart gravement malades et nous en ressortons bien souvent bouleversés ; mais cette fois-là, Ana-Laura rencontrait pour la première fois Tatiana, une petite fille de quatre ans environ, les bras marqués de traces de piqûres et n’ayant plus un cheveu sur la tête mais une flamme dans le regard et une soif d’être aimée… Et pour cause, cette petite fille a été abandonnée par sa maman, et son papa ne peut s’occuper d’elle. Je crois que lorsqu’elle n’est pas à l’hôpital, elle est dans un foyer.
Ce jour-là, du coup, nous entrons dans la chambre où sont placés six lits en métal avec des enfants qui s’ennuient et une ou deux mamans qui somnolent en tenant la main de leur petit. Dès qu’elle voit que l’on s’approche du lit, cette petite fille Tatiana s’anime d’un seul coup et appelle en pointant du doigt Ana-Laura : “Maman, maman…” ! Alors Ana-Laura s’approche et essaie de lui expliquer qu’elle n’est pas sa maman, mais les jeunes femmes qui sont auprès de leurs enfants nous disent qu’elle appelle “maman” toutes les femmes qui daignent s’approcher de son lit, puisqu’elle n’a personne qu’elle peut appeler ainsi. Alors, à partir de ce moment-là, Ana prend dans ses bras ce petit être aux mains tendues vers une inconnue qui, pour une fois, ne vient pas pour lui faire des piqûres, et elle se colle, se blottit contre elle avec une force impressionnante. Elles sont restées, toutes les deux ensemble, durant tout l’après-midi en jouant et déambulant dans la chambre. Et au moment de partir – bien sûr, cela a été très dur de se séparer ! – elle pleurait beaucoup et nous étions aussi bouleversés, mais au moins je crois qu’elle gardera en souvenir un trésor fondamental : savoir qu’elle peut-être aimée gratuitement. Et je pense que nous la reverrons lors de nos prochaines visites.
Cette scène m’a vraiment bouleversée. À côté de ce besoin fondamental d’un peu d’amour, dans une vie si petite, que pèsent tous nos projets et nos ambitions ? « À quoi sert de gagner le monde ? », si dans ce monde il y a des petites filles et des petits garçons qui n’ont jamais bénéficié d'un regard d’amour ?
Et où en est l'état de santé de cette fillette? Hors mis les foyers y a-t-il des systèmes de familles d'accueil dans la ville où elle est? Qui paye ses soins?
J'ai trois filles qui baignent dans l'amour et de savoir cette fillette si désespérée d'amour ne m'est pas acceptable. Mon chemin à croisé cette narration, si quelque chose peut être fait, si notre famille peut lui offrir un souffle dans son sens, s'il vous plait faîtes-le moi savoir.
Je compte sur vous.
I Rossy
Chère Isabelle,
Tatiana continue son traitement de la leucémie durant l'année par des visites régulières. Nous ne l'avons pas revue depuis. Elle est accueillie et prise en charge par la Fondation "Ayúdame a vivr". C'est une fondation salvadorienne qui travaille très bien pour aider les enfants atteints de cancer et sans ressources.Nous connaissons la fondatrice. Vous pouvez regarder le site de la Fondation "Ayudame a Vivir". Merci pour votre intérêt.