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L’art des chemins de verdure

Du 7 juillet au 6 novembre se déroule l’exposition du Jubilé pour les vingt ans du Kunsthaus de Vienne. Il s’agit d’une rétrospective de la vie et de l’œuvre picturale de Friedensreich Hundertwasser. L’exposition s’intitule « L’art des chemins de verdure » et nous permet de découvrir qu’Hundertwasser n’est pas seulement un architecte de génie, mais d’abord un peintre, un prophète et un homme libre.

  1. L’artiste conduit vers de « vert pâturages »

Hundertwasser nous introduit lui-même à cette exposition : « Je ne fais rien d’autre que de montrer de beaux chemins. Je suis un contemplatif. Je n’aime pas prêcher, je préfère m’asseoir sous un arbre pour considérer la vie car je redeviendrai bientôt humus » (Discours de 1980 lors de la réception du grand prix de l’art plastique de l’état autrichien). Hundertwasser, après la guerre mondiale et la disparition d’une grande partie de sa famille dans les camps, a conscience de la mission religieuse et rédemptrice de l’artiste qui est le seul en mesure d’ouvrir des chemins nouveaux pour sortir des impasses politiques, économiques, religieuses d’une société qui se glorifie de sa technologie et de ses systèmes alors qu’elle est toujours plus inhumaine : « L’art prend toujours plus conscience de sa mission de devoir assumer ce que la science et la religion prétendait jusqu’ici être capable de solutionner, mais qui de façon évidente aujourd’hui dépasse leur compétence. » (Présentation de l’exposition de 1953)

  1. La rencontre avec René Brô : la spirale

La rencontre en Italie avec le peintre français René Brô en 1953 est décisive pour Hundertwasser et leur amitié s’approfondira tout au long de leur vie. Ils peignent ensemble un grand tableau « La pêche miraculeuse ». A partir de cette rencontre, Hundertwasser approfondit deux dimensions de sa peinture : la spirale et la couleur.

La spirale est au cœur de l’œuvre picturale et spirituelle de Friedensreich Hundertwasser et deviendra comme sa marque de fabrique. La spirale unit tout dans un même mouvement, elle englobe dans une même relation celui qui contemple et la réalité qui l’entoure. Hundertwasser est un mystique qui ne voit pas de cloison entre le “je,” le “nous”, la culture, la nature. Il développe à partir de la spirale sa théorie des cinq peaux de l’être humain : son épiderme, ses habits, sa maison, ses relations (famille, amis, société, culture) qui forgent son identité, et enfin la nature. Ce sont les cinq enveloppes de l’âme humaine qui communiquent et communient dans un même mouvement en spirale unissant toute la réalité dans une même contemplation. La spirale reprend aussi le symbolisme de la mort et de la résurrection. La vie est au centre et s’écoule dans le tableau pour atteindre les extrémités du tableau symbolisant la limite de la mort, mais ce mouvement est un va-et-vient.

  1. Joie de vivre et couleurs

Après la guerre, l’Autriche est au cœur de l’affrontement entre les deux blocs capitalistes et communistes. Avec des approches certes très différentes ces deux idéologies développent une architecture fonctionnelle, uniforme et utilitariste basées sur la ligne droite et le gris. Hundertwasser veut réveiller l’humain en nous, menacé par la ligne droite qui induit une idéologie sans Dieu et la grisaille qui étouffe la créativité : « Sois toi-même, sois libre, sois créatif et surtout sois riche en couleurs, plus rien ne pourra alors te menacer » (Discours au vernissage de l’exposition à la Tokyo Gallery, 1961)

La couleur redonne la joie et le goût de la vie, Hundertwasser s’habillait donc de façon multicolores. Dans ses toiles, il utilise des couleurs franches et séparées pour souligner le mouvement en spirale. Les toiles éblouissent par les couleurs fluorescentes et chatoyantes, souvent à base de substances inorganiques comme la brique, le sable vulcanisé, la terre, la glaise, le charbon de bois ou le calcaire. Des larmes dorées ou d’aluminium accentuent les contrastes et sont un rappel de la Jérusalem céleste : « La nature et l’art ont quelque chose en commun : la créativité. Si l’homme est créatif, il s’approche de Dieu ».

Sur son bateau à voile le « Regentag », à Venise ou en Nouvelle-Zélande Hundertwasser peint des personnages aux yeux d’amande et aux bouches en forme de navire, il a toujours une icône devant lui lorsqu’il peint. Il nous conduit au-delà des mers, des courbes et des couleurs sur un chemin de libération intérieure.

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