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Les paroles de vie d’un député autrichien

« Au Parlement, il y a besoin de personnes qui sont concernées et qui ont appris à gérer des situations personnelles de façon réfléchie. Donc, rien sur nous sans nous ! » C’est ainsi que Franz-Joseph Huainigg, député ÖVP [1]depuis les élections de 2017 le parti s’apelle « Die Neue Volkspartei » parti de Sebastian Kurz, adressait ses adieux au parlement autrichien en octobre 2017 après 15 ans à défendre les intérêts des personnes handicapées. 

 

 

Après avoir témoigné de la manière avec laquelle il a assumé sa responsabilité politique et sa vie de famille avec son handicap, monsieur Huainigg ajoute : 

Savez-vous quelle a été la question la plus fréquemment posée au cours des 15 dernières années ? Pourquoi êtes-vous – non, pas handicapé – la question la plus fréquente était : Pourquoi êtes-vous à l'ÖVP ? Pour le dire brièvement, ce sont les valeurs sociales chrétiennes pour lesquelles il faut lutter encore et encore au sein de l'État providence. Et ici, c'est avant tout l'image chrétienne de l'humanité. Cela inclut la dignité humaine inviolable, qui est donnée à chacun et ne peut être évaluée en comparant les situations. 

Beaucoup critiquent l'ÖVP en raison de leur principe de performance. Bien sûr, il ne faut pas définir l'homme en tant que tel au moyen de critères de performance. Mais d'après mon expérience, vous ne faites pas confiance aux personnes handicapées. C'est l'autre côté des choses, et ce n'est pas juste parce que cela signifie qu'une personne n'est pas prise au sérieux à cause de son handicap. Par conséquent, je suis en faveur d'une vision claire de la réussite, mais tout le monde doit être mis au défis, encouragé et reconnu dans la mesure de ses moyens. Et cela doit commencer à l'école, déjà, par une instruction commune avec des programmes individualisés.

Dans notre société, tout doit être parfait. Il faut un CV parfait, un corps parfait, la maison parfaite, jusqu’à l’enfant parfait dans un timing parfait. Les futurs parents ressentent une pression considérable de la société pour ne pas garder leur enfant dés le moindre soupçon d’un éventuel handicap. Dans le cadre de ce que l’on appelle une indication eugénique (‘eugenische Indikation’, généralement traduit en français par indication d’avortement thérapeutique, ndt), il est d’ailleurs possible bien au-delà de la période légale d’avorter l’enfant jusqu’au jour de sa naissance. L’enfant est dans ce cas tué d’une piqure dans le cœur dans le sein même de sa mère. C’est insupportable. Nous devons absolument parler de cela. C’est ce que j’ai cherché à faire tout au long de ces 15 ans, et l’on m’a souvent répondu : « Je suis avec vous ». J’attends toujours.

Il est essentiel de prendre conscience qu’une vie avec un handicap ne veut pas seulement dire Fatalité et Souffrance, mais aussi joie et bonheur. Suite à l’annonce de mes adieux au parlement, j’ai reçu un nombre incalculable d’emails, lettres, commentaires et autres coups de téléphone. Merci beaucoup pour tous ces retours touchants et valorisants. Je m’en suis vraiment réjoui, car on ne reçoit normalement des retours positifs en politique qu’après sa mort. Je suis plein de gratitude de pouvoir expérimenter ces retours de mon vivant, car ce sont eux qui donnent de la force. Avez-vous chers collègues, le courage de féliciter votre adversaire politique, au-delà des frontières partisanes, s’il a fait ou dit quelque chose que vous considérez comme positif ? Je suis convaincu que de telles attitudes feraient du bien à la culture politique, et que la démocratie en sortirait renforcée. 

En 2007 j’ai rédigé un poème sous le titre « Adieu ». J’aimerais aujourd’hui  le compléter et dédier au Parlement sa dernière strophe : 

Enfant encore, mes deux jambes furent soudain paralysées. Je me mis à pleurer et ne comprenais plus Dieu ni le monde. Dieu dit alors : Je te prends la force de tes jambes et t’offre la lenteur. Je découvris alors un nouveau monde, en rampant lentement au sol.

Adolescent, je ne pus plus me déplacer avec des béquilles. Je me mis à pleurer et ne comprenais plus Dieu ni le monde. Dieu dit alors : je te prends la force de tes bras et t’offre en échange l’humour et l’ironie. Je découvris ainsi un nouveau monde depuis la fauteuil roulant et me mis à faire rire les gens sur une scène de cabaret.

Des années plus tard je ne pus plus bouger ni les jambes ni les bras. Je me mis à pleurer et ne comprenais plus Dieu ni le monde. Dieu dit alors : moins tu peux bouger, plus tu peux faire bouger. C’est ainsi que je me mis à changer un peu le monde et devins politicien.

Aujourd’hui je ne peux plus respirer sans machine. Je me mis à pleurer et ne comprenais plus Dieu ni le monde. Dieu dit alors : je te prends la force de tes poumons et t’offre un grand souffle. Afin que tu te battes pour la valeur de la vie.  

 

Discours complet en allemant : https://derstandard.at/2000064369802/Demokratie-braucht-Achtung-und-Wertschaetzung

References

References
1 depuis les élections de 2017 le parti s’apelle « Die Neue Volkspartei » parti de Sebastian Kurz
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