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La Pologne a été en première ligne au XXème siècle du combat contre ce que Jean Paul II appelait « les idéologies du mal » et que l’histoire a conservé sous le nom de nazisme et de communisme. Dans son dernier livre « Mémoire et identité » [1]Jean Paul II, Mémoire et identité, Flammarion, France, 2005 paru quelques mois avant sa mort, le pape polonais jette un regard rétrospectif sur l’histoire de l’Europe au siècle dernier et consacre de nombreuses analyses à son pays natal.

Déchainement du mal en Pologne

La réflexion de Jean-Paul II part de sa propre expérience, lui qui né en 1920 [2]C’est au dire au moment même du « miracle de la Vistule » lorsque les armées du général Pidsudski arrête l’armée rouge de … Continue reading , deux ans à peine après l’indépendance de la Pologne et son retour sur la scène internationale. Après quelques années seulement d’indépendance, le pays est plongé coup sur coup dans la barbarie nazie :  

« Il m’a été donné de faire l’expérience personnelle des « idéologies du mal ». C’est quelque chose qui ne peut s’effacer de ma mémoire. Ce fut tout d’abord le nazisme. Ce que l’on pouvait voir en ces années là était quelque chose de terrible. A ce moment pourtant de nombreux aspects du nazisme demeuraient encore cachés. La véritable dimension du mal qui se déchainait en Europe ne fut pas perçue de tous, ni même de ceux d’entre nous qui étions au centre de ce tourbillon » [3]Op. cit. p.26-27  

Puis l’occupation communiste

« Plus tard, une fois la guerre finie, je pensais en moi-même : le Seigneur Dieu a accordé au nazisme douze années d’existence et après ces douze années ce système s’est écroulé. On voit ici la limite imposée au mal par la divine Providence. A dire vrai, il ne s’agissait pas seulement d’une folie – mais d’une « bestialité » – comme l’écrivit le professeur Konstanty Michalski. Mais de fait, la Divine Providence n’a accordé que douze années à ce déchainement de fureur bestiale. Si le communisme a survécu plus longtemps et s’il a encore devant lui, pensais-je alors en moi-même, une perspective de développement ultérieur, il doit y avoir un sens à tout cela » [4]Op. cit. p. 27

Autodéfense de la Pologne

Jean Paul II ne cherche pas uniquement à dénoncer le mal que les idéologies totalitaires ont infligé à son pays mais en cherche le sens. Fidèle à son analyse sur le Mystère du mal [5]Pour approfondir, lire le chapitre I, au numéro 4 intitulé « la Rédemption comme limite divine imposée au mal » in op. cit. p. 30-35 , il ne le regarde que dans la perspective d’un bien plus grand qui puisse en sortir.

« Les cinquante années de lutte contre le totalitarisme constituent une période qui n’est pas sans signification providentielle : en effet, le besoin social d’autodéfense contre l’asservissement de tout un peuple s’y est exprimé. Il s’agit d’une autodéfense qui ne s’exprime pas dans une perspective uniquement négative. La société n’a pas seulement refusé le nazisme comme système visant à la destruction de la Pologne, et le communisme comme système oppressif imposé par l’Est, mais dans sa résistance elle a vécu aussi des idéaux au contenu hautement positif. Je veux dire qu’il ne s’agissait pas d’un simple rejet de ces systèmes hostiles. Au cours de ces années, il y eut aussi le recouvrement et la confirmation des valeurs fondamentales dont le peuple vivait et auxquelles il désirait demeurer fidèle » [6]Op. cit. p. 60-61        

Ces « valeurs fondamentales » [7]Qui feront l’objet d’un prochain article résident pour lui essentiellement dans la culture polonaise, culture inséparable de sa foi au Christ. C’est cette culture que les nazis et les communistes voulaient exterminer, sentant bien que c’était l’âme de la résistance polonaise, son autodéfense face à l’asservissement. [8]C’est sans doute pour cela que lors de la seconde guerre mondiale Jean Paul II, au lieu de prendre les armes, se lança dans la « résistance culturelle », … Continue reading  

« Il n’est pas possible de séparer le Christ de l’histoire de l’homme. C’est justement ce que j’ai dit à l’occasion de ma première visite en Pologne [9]Juin 1979 sur la place de la Victoire. J’ai affirmé alors qu’il n’était pas possible de séparer le Christ de l’histoire de ma nation. Est-il possible de le séparer de l’histoire de quelque autre nation ? Est-il possible de le séparer de l’histoire de l’Europe ? De fait, c’est seulement en lui que toutes les nations et toute l’humanité peuvent « entrer dans l’espérance » ! » [10]Op. cit. p. 29

Concernant cette capacité d’autodéfense de la Pologne grâce à sa culture ancrée dans le Christ, Jean-Paul II cite un dialogue qu’il a eu avec un jeune Flamand lors de ses études à Rome.

« Le thème de notre conversation était la situation crée en Europe à la fin de la seconde guerre mondiale. Mon collègue s’exprima plus ou moins ainsi : « Le Seigneur a permis que l’expérience du mal tel que le communisme vous arrive … et pourquoi l’a-t-il permis ? » A la question il donna lui-même une réponse que j’estime significative : « Cela nous a été épargné à nous, en Occident, peut-être parce que nous n’aurions pas été capables de supporter une telle épreuve. Vous par contre vous y parviendrez » [11]Op. cit. p.62  

C’est en grande partie sa culture qui a permis à la Pologne d’offrir une résistance victorieuse. Ceci dit, Jean Paul II ne nie pas la grandeur de la culture occidentale, il en souligne même les très belles réalisations dans l’histoire [12]Ibid. p. 62 . Il déplore cependant qu’elle soit aujourd’hui marquée par « la réapparition persistante d’un refus du Christ », par une culture qui veut « vivre comme si Dieu n’existait pas » et donc vivre « en dehors des repères du bien et du mal, c’est-à-dire en dehors du cadre dont Dieu lui-même est la source » [13]Ibid. p. 63.  C’est le refus de toute norme au sujet du bien et du mal que Jean-Paul II met à la source des totalitarismes du XX siècle.

La Pologne, phare de la miséricorde

La culture polonaise s’est aussi enrichie d’une valeur fondamentale au XX siècle à travers la révélation au monde du Mystère de la Divine Miséricorde. Et c’est depuis la Pologne qu’est venue cette lumière, à travers sainte Faustine.

« Aux survivants de la seconde guerre mondiale, les paroles notées dans le Journal de sainte Faustine apparaissent comme un évangile caractéristique de la Divine Miséricorde, écrit selon la perspective du XXème siècle. Ses contemporains ont compris ce message. Ils l’ont bien compris à travers l’accumulation dramatique du mal durant la Seconde Guerre mondiale et au travers de la cruauté des systèmes totalitaires. Ce fut comme si le Christ avait voulu révéler que la limite imposée au mal, dont l’homme est l’auteur et la victime, est en définitive, la Divine Miséricorde. » [14]Op. cit. p.71   

On peut donc mettre deux grands facteurs à la source de la capacité d’autodéfense de la Pologne : sa culture ancrée dans le Christ et la richesse de sa miséricorde face à ses ennemis.   

En conclusion de sa méditation sur les idéologies du mal, saint Jean Paul II fidèle à lui-même, nous ouvre à l’espérance. Que nous enseigne l’histoire de la Pologne au XXème siècle ? Essentiellement que « le mal ne remporte pas la victoire définitive ! Le mystère pascal confirme que le bien est en définitive vainqueur ; que la vie est victorieuse de la mort et que l’amour triomphe de la haine ». [15]Op. cit. p. 72 C’est sans doute pour annoncer un tel message au monde entier que la Providence est allée chercher en Pologne un des plus grands papes de toute l’histoire.      

References

References
1 Jean Paul II, Mémoire et identité, Flammarion, France, 2005
2 C’est au dire au moment même du « miracle de la Vistule » lorsque les armées du général Pidsudski arrête l’armée rouge de Trotsky, sauvant ainsi l’Europe de l’expansion de la récente révolution soviétique
3 Op. cit. p.26-27
4 Op. cit. p. 27
5 Pour approfondir, lire le chapitre I, au numéro 4 intitulé « la Rédemption comme limite divine imposée au mal » in op. cit. p. 30-35
6 Op. cit. p. 60-61
7 Qui feront l’objet d’un prochain article
8 C’est sans doute pour cela que lors de la seconde guerre mondiale Jean Paul II, au lieu de prendre les armes, se lança dans la « résistance culturelle », jouant des pièces de théâtre clandestines, récitant des poèmes, approfondissant sa foi avec la lecture de Jean de la Croix
9 Juin 1979
10 Op. cit. p. 29
11 Op. cit. p.62
12 Ibid. p. 62
13 Ibid. p. 63
14 Op. cit. p.71
15 Op. cit. p. 72
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