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Greta Thunberg : victime instrumentalisée ou « icône d’ingratitude ? » ( II )

Il suffit de voir Greta parler ou d’écouter son discours pour voir son profond mal-être, son manque de liberté, tellement elle est prisonnière de ces angoisses qui la torturent. Angoisses semées par des adultes lui affirmant qu’il faut craindre l’apocalypse du réchauffement climatique. Angoisses d’autant plus monstrueuses quand on sait comment les personnes autistes ont du mal à les affronter. Face à cette instrumentalisation qui a fait du monde un ennemi pour Greta – car ce qui semble guider ses discours est bien moins l’admiration de la beauté du monde que le respect dogmatique d’un équilibre chimique dans l’atmosphère – peu de réactions ont surgi à l’encontre de ce mouvement de panique provoqué. 

 

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Scott Morrison, le Premier ministre australien, a réagi contre l’instrumentalisation d’une génération par celle de Greta, et ceci à travers le Journal Guardian : « Je ne permets pas que (les jeunes, ndlr) soient déformés de manière substantielle en faveur d’un point de vue particulier. J’apprécie qu’ils choisissent avec leur raison, mais j’aime aussi les rassurer car la pire chose qui puisse être imposée à un enfant est une anxiété injustifiée. Ils ont déjà assez de choses à se préoccuper. Par conséquent, nous devons permettre aux enfants d’être des enfants. Nous devons plutôt prendre des précautions contre la propagation de l’anxiété chez les enfants »

Andrew Bolt, journaliste du Herald Suna également déclaré : « J’espère que les alarmistes qui ont semé la terreur chez Greta Thunberg en lui faisant craindre l’apocalypse du réchauffement climatique ont honte d’eux-mêmes. Ils ont maintenant vu la peur de cette fille troublée qui pleurait et criait lors de la réunion des Nations unies sur le climat ».

Face à cette instrumentalisation qui mène au désespoir, une question profonde se pose : est-ce là l’éducation que nous voulons donner aux générations futures ? Pour mener sans critique des combats avec l’arme de la victimisation, et de la haine ? Une éducation qui va à l’encontre de l’Espérance et de l’amour, ces deux voies qui ouvrent sur la totalité de la réalité, arrachent à cette « tristesse de ce monde », à l’égoïsme et aident à reprendre conscience de la grandeur de la vocation humaine. Le Pape émérite Benoit XVI le rappelle à travers ces quelques lignes : 

« Dans l’Espérance, notre vie s’étend vers la totalité de toute la réalité, vers un avenir illimité qui nous devient accessible dans la foi. Cette pleine totalité de l’être, dont la foi nous donne la clé, est un amour sans réserve : un amour qui est un grand oui à mon existence et qui m’ouvre, dans sa largeur et sa profondeur, la plénitude de toutes choses. En elle, le créateur de toutes choses me dit : « Tout ce qui est à moi est à toi » (Lc 15, 31)

Cette « tristesse de ce monde » découle d’un manque de magnanimitas (grande âme), d’une incapacité à croire en la grandeur de la vocation humaine, celle qui a été pensée pour nous par Dieu. L’homme n’a pas confiance en sa propre grandeur, il veut être « plus réaliste ». Cette paresse métaphysique est donc identique à cette pseudo-humilité qui est si répandue aujourd’hui. L’homme ne veut pas croire que Dieu s’occupe de lui, le connaît, l’aime, le regarde, est proche de lui. Aujourd’hui, il existe une étrange haine de l’homme contre sa propre grandeur. L’homme se voit comme l’ennemi de la vie, de l’équilibre de la Création, il se voit comme le grand perturbateur de la paix de la nature, celui qui ferait mieux de ne pas être là, la créature égarée. Sa libération et celle du monde consisterait à se détruire et à détruire le monde, à éliminer l’esprit, à rendre l’être humain spécifique, afin que la nature retrouve sa perfection inconsciente, son propre rythme et sa propre sagesse de mourir et de devenir. Au début de la route, il fallait « être comme Dieu ». Il fallait se débarrasser du Dieu superviseur pour être libre ; reprendre le Dieu projeté au ciel et dominer comme Dieu sur la Création. Mais de cette façon, nous sommes vraiment parvenus à une sorte d’esprit et de volonté, qui étaient et sont contre la vie, et qui dominent la mort. Et plus cela se fait sentir, plus le but initial est inversé dans son contraire et reste prisonnier du même point de départ : l’homme qui a voulu être le seul créateur de lui-même et chevaucher sur le dos de la création avec une meilleure évolution conçue par lui finit par s’abîmer et s’autodétruire. Il trouve que c’est mieux s’il n’existe pas. Cette paresse métaphysique peut coexister avec beaucoup d’activités et d’affaires. Son essence est la fuite de Dieu, le désir d’être seul avec soi-même et avec sa finitude, de ne pas être dérangé par la proximité de Dieu. » [1]Benoît XVI, Speranza e amore 

Greta semble s’élever contre l’essence même de l’humain, celle de recevoir la vie d’un Autre. Elle ne reçoit plus sa propre vie, ni celle des autres, ni la création même – qu’elle prétend défendre- comme un cadeau, mais la réalité est devenue son ennemi. Son combat ne part pas de l’amour de la Création, de la beauté du monde, mais d’un monde imaginaire préservé de l’activité d’humaine. Ce qui l’intéresse ce n’est pas l’homme dans le monde, c’est le respect des écosystèmes : c’est la fine fleur de son discours à l’ONU : « Des écosystèmes entiers s’effondrent, nous sommes au début d’une extinction de masse, et tout ce dont vous parlez, c’est d’argent, et des contes de fées de croissance économique éternelle ? Comment osez-vous ! ». Elle ne défend pas la planète et l’homme mais l’équilibre des écosystèmes. Elle ne reçoit pas le monde dans une gratitude mais martèle une idéologie, celle d’un monde où de toute manière le problème central est l’homme. 

Elle dénonce la croissance économique éternelle alors qu’il est évident qu’un des moteurs de cette croissance est désormais la « croissance verte », que tant d’entreprises, d’organisations et de lobbies s’enrichissent grâce aux milliards d’euro de ce segment très prometteur de l’économie. Les gens qui aujourd’hui l’instrumentalisent [2]Une jeune répond à Greta en se posant une question intéressante : quels sont les intérêts économiques en jeu? https://www.youtube.com/watch?v=6Jujrmiyn18&t=494s sont ceux qui demain toucheront l’argent grâce à la réalité de la croissance économique éternelle et verte. 

Boyan Slat, âgé aujourd’hui de 23 ans, fondateur de l’Ocean Cleanup Foundation qui vise à nettoyer les Océans. À 16 ans il a inventé la première machine pour nettoyer les océans du plastique. Pourquoi n’est-il pas aussi recherché sur Google et médiatisé comme l’est Greta ? Pourtant Boyan affirme dans une vidéo que : « D’ici 2050, nous aurons éliminé la pollution plastique des océans ». Greta et Boyan, : deux réactions opposées face à un même problème de pollution. Greta, prisonnière de son angoisse devient ennemie du monde, et Boyan, en amoureux du monde, invente la première machine pour nettoyer les Océans. Greta annonce en 2030 la destruction du monde, et Boyan en 2050 les Océans propres du plastique…

 

Vidéo de Boyan Slat

 

Dans son discours incendiaire du 23 Novembre à New York, la jeune suédoise Greta accusait avec beaucoup d’amertume tous les adultes réunis- en occurrence, la génération de ses parents- d’anéantir la planète par négligence en matière de politique climatique. C’était le cri inquiétant d’une adolescente qui accusait en gros ceux qui l’avaient engendrée de lui avoir volé sa vie. Pourquoi Greta Thunberg nous rappelle combien il est important d’être reconnaissant ?

Photo : Source

 

Roger Köppel, père de 4 enfants, qualifie Greta d’« icône de l’ingratitude » dans un article publié le 18 décembre 2019, sur le journal allemand Die Weltwoche. Voici un extrait de cet article : 

« En tant que père de quatre enfants, le discours de Greta ne m’a pas ennuyé car je rejette les prémisses et les conclusions politiques de l’apocalypse verte. Je les rejette, mais ce n’était pas la raison de l’irritation. Ce qui m’a d’abord ennuyé, c’est l’ingratitude absolument égocentrique et égoïste de cette fille, qui a mis ici la vieille génération dans une position si exorbitante. Greta ne semblait pas penser une seule seconde que le monde dans lequel elle a pu grandir dans ce qui était, soit dit en passant, un environnement privilégié était l’œuvre de cette génération et des précédentes, contre lesquelles elle était désormais si détestable. Bien sûr, Greta n’est qu’une adolescente, et les adolescents se caractérisent par leur égocentrisme. La terrible intensité de l’hostilité dans sa performance était cependant extraordinaire. Et typique de l’époque. Nous vivons une époque ingrate, et Greta est l’icône de cette ingratitude. (…) Permettez-moi de dire d’emblée que je n’ai rien contre la protection de l’environnement ou contre la protestation des jeunes. Je peux même comprendre les plaintes de Greta dans une certaine mesure, car j’ai moi-même, une fois, sous l’impression de la forêt mourante, fait des excursions en Europe de l’Est pour découvrir l’état de la fin du monde sous forme de cadavres d’arbres blancs. Je peux comprendre tout cela, mais ce qui reste étrange, voire troublant, c’est l’idolâtrie collective de cette fille, qui soulève ses préoccupations environnementales pour déclarer la guerre à la génération de ses producteurs.

L’exemple de l’icône de l’ingratitude Greta nous rappelle combien la vertu de la gratitude est importante et rapidement oubliée. Je ne parle pas seulement de remercier après un cadeau ou une faveur. Je ne parle pas non plus du genre de gratitude que l’on ressent après une transaction commerciale ou un achat réussi lorsque les deux parties en ont bénéficié. La gratitude est quelque chose de plus fondamental, d’existentiel, c’est une attitude, une attitude de vie, sans laquelle une société ne peut pas exister à long terme, ne peut pas survivre. Le sociologue allemand Georg Simmel a un jour appelé la gratitude, dans une belle formulation, « la mémoire morale de l’humanité ». Il voulait dire par là que toute socialisation est basée sur « l’effet continu des relations au-delà du moment de leur émergence ». La gratitude, a écrit Simmel, est un « effet lyrique ». Par « un va-et-vient millénaire au sein de la société », la gratitude devient l’un de ses « agents de liaison les plus forts ».

La gratitude, en particulier la gratitude envers les générations précédentes, envers nos parents, nos grands-parents, nos ancêtres et tous ceux grâce auxquels nos ancêtres ont pu gagner leur vie, est pour Simmel le « terrain émotionnel fertile » sans lequel il ne peut y avoir de société, de cohabitation, de solidarité. La gratitude crée des liens, crée une connexion, c’est « être connecté » avec ce qui était, avec ce qui est, mais aussi avec ce qui est à venir. On est reconnaissant à ses parents du fait qu’on vit, sans avoir rien fait pour soi-même. Mais on est également reconnaissant pour toutes les réalisations et les accomplissements des générations précédentes, sans les sacrifices, les réalisations et les connaissances desquelles notre propre vie serait beaucoup plus difficile et plus défavorable malgré toutes les difficultés et les problèmes non résolus. La gratitude est l’état d’esprit fondamental d’un être humain lorsqu’il a réussi à se dépasser.

Dans la gratitude, résonnent le respect et l’humilité envers ce que le monde est devenu. La gratitude est la conscience que la vie est un don et aussi une obligation de faire le meilleur de ce don. Logiquement, la gratitude est le rejet d’un esprit révolutionnaire subversif, disons tranquillement : la pensée autiste tabula rasa, qui veut mettre de côté tout ce qui fait obstacle à la réalisation totale de soi.(…) Opposons-nous à cela : La gratitude, c’est la modestie, c’est surtout la conscience que mes soucis, mes espoirs et mes opinions personnelles ne sont pas la mesure de toutes choses. « La gratitude », comme le savait déjà Cicéron, « n’est pas seulement la plus grande des vertus, mais aussi la mère de tous ». Celui qui est reconnaissant échappe au donjon de son ego. La gratitude, et non l’intérêt personnel, est le ciment qui maintient notre société unie. »

 

References

References
1 Benoît XVI, Speranza e amore
2 Une jeune répond à Greta en se posant une question intéressante : quels sont les intérêts économiques en jeu? https://www.youtube.com/watch?v=6Jujrmiyn18&t=494s
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1 Commentaire

  1. Jacques

    Roger Köppel n’est pas ma tasse de thé, mais là il parle en père, ce qui est plus humain.. Par contre ce que l’article aurait pu analyser aussi c’est les raisons de cette angoisse climatique. Car l’histoire nous enseigne beaucoup à ce sujet. Avant le Christ, les hommes paniquaient déjà et l’apocalypse a été prédite à toutes époques depuis : Platon pensait qu’il y a fait trop de personnes sur terre et que cela exploserait, puis ce fut la peur du déluge, la peur que l’eau s’échappe de la terre plate, la peur que le « ciel nous tombe sur la tête », puis la peur de l’apocalypse à la chute de l’empire romain, puis la peur des épidémies, puis la peur de la fin du monde, puis de la fin du pétrole, etc…