Home > Economie > les canaris volent au secours des pigeons

les canaris volent au secours des pigeons

Depuis 32 ans, Philippe de PORTZAMPARC est président de la Société de Bourse Portzamparc qui fêtera ses 150 ans en 2014. Il répond à nos questions concernant son collectif « les canaris ».


© CC BY caldassergio

 

1 – Monsieur de Portzamparc, vous êtes membre du collectif «  les canaris rejoignent les pigeons »…
Avec plusieurs autres entrepreneurs de toutes tailles de la région, nous avons réagi vivement dans la continuité du mouvement des « Pigeons », en interpellant le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, que nous connaissons bien, et avec qui le dialogue était assez naturel à Nantes. Nous avons trouvé le Projet de Loi de Finances 2013 brutal, injuste, inefficace et déconnecté des réalités du monde actuel, dans un climat de stigmatisation du chef d’entreprise trop facilement assimilé à un « patron-voyou ».
Au-delà de la spoliation qui était proposée dans le projet initial pour les plus-values (jusqu’à 62% de taxation), c’est l’esprit général qui nous perturbe aussi : l’alignement de la taxation des revenus du capital sur celle du travail est injuste (double peine ?) car le capital a souvent subi plusieurs taxations au titre des revenus, des plus-values ou de la transmission.
 
2 – Quels peuvent être les impacts sur l’économie en général et sur une PME comme la vôtre ?
Sur l’économie, c’est un peu la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Trop d’impôts tuent l’impôt, comme le dit le dicton. Beaucoup de chefs d’entreprises, souvent vrais patriotes songent à « poser le sac » ou pire à « prendre la valise ». Si la confiance est ébranlée, c’est le cercle vicieux qui s’enclenche : moins d’investissements, moins de projets de croissance et au final moins d’emplois. Les salariés sont également perturbés par des pertes de pouvoir d’achats (taxations des heures supplémentaires) ou par des mesures qui vont pénaliser l’intéressement et la participation. Pour mon entreprise, ce sera aussi moins d’épargnants car le risque n’est plus encouragé, et donc moins de financement pour l’économie en général.
 
3 – Quelle image du patron défendez-vous ?
Jean-Marc Ayrault nous connaît bien et sait que parmi nous, bien  peu mettent l’argent au cœur de nos  priorités. Nous sommes pour le développement harmonieux de nos entreprises, qui entraine nos salariés et leur permet un juste retour de leurs engagements. Je plaide dans mon métier depuis toujours pour l’épargne utile, qui aille s’investir dans du développement responsable avec une vision à long terme, bien loin de l’aspect spéculatif de court terme qui  donne lieu à trop de caricatures. J’ai moi-même proposé de taxer la spéculation sur les matières premières qui déstabilise les pays en développement. Nos dirigeants, ceux d’aujourd’hui, comme ceux d’hier, doivent faire attention à ces réactions « d’indignés », car nous ne comprenons pas que depuis 30 ans les finances publiques dérapent, la dette est mise sur le dos de nos enfants et que bien peu de mesures courageuses ont été prises pour réduire le poids de nos dépenses publiques.
 
 
Les pigeons, les canaris, corbeaux ou autres moineaux qui se rebiffent aujourd’hui ne veulent pas se faire couper les ailes sans réagir et veulent se faire entendre.


© CC BY GIPE25
 
 

Lien :  https://euroweb.b-capital.com/pz/Actualites/Edito-Interview/Edito-de-Philippe-de-Portzamparc

 

Nota : Photo en page de garde © CC BY zigazou76

Vous aimerez aussi
La créativité, selon Rilke
Dédé la Sardine… et la finance vertueuse !
Super Mario (Draghi) ou la fuite en avant du banquier de l’Europe
Faut-il un shutdown en France ?

1 Commentaire

  1. Bruno ANEL

    On ne peut qu'être d'accord avec M. de Portzamparc: trop d'impôt tue l'impôt. Ce slogan était déja celui de Ronald Reagan il y a 30 ans. Cela n'a pas empêché ce même Reagan d'accroitre les dépenses publiques et le déficit, notamment avec son programme de "guerre des étoiles". Réduire les dépenses: oui mais lesquelles : l'éducation, la santé, la police, la justice, la défense…? Alors on se tourne souvent vers les recettes nouvelles: or tous les contribuables considèrent peu ou prou l'impôt comme une "spoliation" du fruit de leur travail: les entrepreneurs,  les médecins, les salariés, les agriculteurs…: tous se considèrent tour à tour comme les "pigeons" du fisc. A chaque alternance politique, il y a des modifications: les uns "spolient" un peu plus le travail, les autres le capital. Il serait tout de même bon de rappeler que l'argent prélevé par le fisc est  réinjecté dans l'économie sous forme de salaires, de marchés publics et d'équipements collectifs. Pigeons et canaris ne dédaignent pas de bénéficier de cette manne publique.