Home > Politique > Goodbye Maggy !

de Pierre Seillier   12 avril 2013
Temps de lecture 3 mn

« Là où il y a de la discorde, apportons l’harmonie. Là où est l’erreur, apportons la vérité. Là où il y a le doute, apportons la foi. Là où il y a du désespoir, apportons l’espérance. […] Il y a à présent du travail à faire ». C’est par ces mots que Margaret Thatcher cita Saint François d’Assise lors de son arrivée à Downing Street le 3 mai 1979.


CC BY White House Photographic Office

Dans un contexte marqué par une crise à la fois économique, sociale, politique et culturelle, Margaret Thatcher mena les conservateurs à la victoire. Jamais dans l’histoire un dirigeant politique n’avait montré une telle volonté de redonner l’espoir et la confiance à son pays. L’écho de son décès n’est pas anodin dans le contexte troublé que nous connaissons actuellement et qui semble rappeler son arrivée au pouvoir. Pourtant, tout n’aura pas été simple pour Margaret Thatcher tant les défis ont été nombreux à relever.

D’abord parce que son accession au pouvoir aura été une longue marche contre les conservatismes et les préjugés du monde politique, notamment de son propre camp, à l’égard des femmes en général. Margaret aura dû se battre contre les barons du parti conservateur qui ne voyaient en elle qu’une simple fille d’épicier. Ses succès électoraux, son travail et sa persévérance auront raison de ses détracteurs. Sa ténacité fera d’elle l’unique femme à avoir été premier ministre du Royaume Uni. La première victoire de Margaret Thatcher est d’abord une victoire morale.

Ensuite, il faut se rappeler que lors de son arrivée au pouvoir la situation économique de la Grande-Bretagne était catastrophique. Comme certains l’ont mentionné, la situation de la Grande-Bretagne en 1979 était presque comparable à celle de la Grèce aujourd’hui, le pays ayant dû solliciter en catastrophe l’aide financière du FMI[1]. Au prix d’une grande intransigeance, décriée par ses opposants, et qui lui a valu le surnom de « Dame de fer », Margaret Thatcher va s’employer à remettre sur pied « l’homme malade de l’Europe ».

Pour cela, elle fera le choix d’utiliser des solutions prônées par les plus grands économistes libéraux de l’époque. Considérant les solutions libérales comme les seules valables, tant l’échec des gouvernements précédents était retentissant, elle mit fin à l’Etat–providence. Les mines de charbon non rentables furent fermées ; British Airways et British Steel privatisées. Ainsi s’est opérée la transition sectorielle de la Grande-Bretagne. La deuxième victoire de Margaret Thatcher a donc été économique et doctrinale.

Le fait est que, parmi tous ses détracteurs, qu’ils soient travaillistes ou conservateurs, aucun ne remettra en cause ses réformes. Pourtant, il est évident que les réformes de Margaret Thatcher, au delà des mouvements sociaux massifs qu’elles ont entrainés, ont aussi provoqué des souffrances sociales. En ce sens, on peut se demander dans quelle mesure le Thatchérisme a contribué à l’avènement du Blairisme ?  En effet, l’élection de Tony Blair en 1997 a-t-elle été une réaction à la cure drastique imposée par le gouvernement Thatcher ? Ou a-t-elle été un luxe d’un pays guéri de la crise ?

Par ailleurs, la rigidité de sa politique a entrainé un musellement démocratique, syndical et politique, qui contribueront à couper Margaret Thatcher de sa base… contribuant à sa chute en 1990. Là encore, se pose la question de savoir dans quelle mesure le Thatchérisme a permis l’avènement d’une contre-culture réactionnaire ? On pense notamment aux multiples groupes ou chanteurs de rock qui ont été inspirés par cette période !

Enfin, les années Thatcher ont été marquées par une série d’événements internationaux majeurs qui ont contribué à mettre la Grande-Bretagne sur le devant de la scène. La guerre des Malouines, le combat contre l’IRA, la guerre froide… tous ces événements ont donné l’occasion à la puissance insulaire d’afficher une ligne forte et ferme. Comme en politique intérieure, Margaret Thatcher ne lâchera rien… et gagnera ! La troisième victoire de Margaret Thatcher aura été politique.

En conclusion, nous pouvons affirmer, que l’on soit partisan ou opposant, que Margaret Thatcher a marqué l’Histoire. Incontestablement, elle a contribué à réaffirmer la puissance britannique en devenant une de ses plus grandes icônes. Sa détermination, sa fidélité à ses valeurs et son courage doivent être une inspiration pour tous les leaders politiques de notre génération. En 1979, la vision de Margaret Thatcher a permis de redonner l’espoir aux sujets de sa majesté. N’est-ce pas ce dont nous avons tous besoin ?

Goodbye Maggie !


[1] Serge Schweitzer, « Thatcher : une source d'inspiration pour la France ? », 8 avril 2013 : http://www.contrepoints.org/2013/04/08/120913-thatcher-une-source-dinspiration-pour-la-france

 

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7 Commentaires

  1. Jean-Marie

    L'esprit chagrin se scandalise de la boue, et ne voit pas ce qu'elle macule. Une triste myopie qui semble saisir pour l'instant tous nos médias. Merci pour cet article, qui lui ne joue pas ce jeu, et relève ce qu'il y a d'admirable en "Maggie", loin de la grisaille ennuyeuse des accusateurs patentés.

  2. Denis depuis le Chili !

    "Amie de Pinochet" et "Boue", c'est un peu court !!!

    Depuis la colonisation, l'Argentine et le Chili ont été en conflit à propos du Canal du Beagle, près du Cap Horn. En 1967 (Sous le gouvernement Allende au Chili!!!!!), les deux pays accèptent l'arbitrage britanique pour la question du partage du territoire Patagon. Mais à l'arrivée de la dictature Argentine, Videla, profitant de la menace d'une alliance avec le Pérou et la Bolivie, contre le Chili, révoque l'accord et occupe les territoires patagons. En décembre 78, après avoir demandé la médiation du Vatican, que la mort de Paul VI et Jean Paul Ier ont rendue difficile, le Chili envoi sa flotte pour riposter à l'occupation Argentine. L'opération est stoppée providentiellement par une tempête. C'est alors que Jean Paul II, à peine nommé, intervient et réussi à juguler un conflit qui eut été catastrophique pour toute l'Amérique Latine.

    Un traité de paix ne sera signé que le 29 novembre 84 au Vatican. Mais en attendant, voyant sa popularité s'effondrer (l'histoire se répète aujourd'hui dans les mêmes termes…), la junte, par le général Galtieri lance une opération de débarquement et de ce fait déclare la guerre au Royaume-Uni. Motif 1:   lenteur à appliquer la Déclaration sur l'Octroi de l'Indépendance des pays Coloniaux (1960).  Motif 2 :  la proximité (500 km de Puerto Santa Cruz) des îles Malouines, Georgie du sud et Sandwitch de sud, etc. pour en faire une colonie argentine plutôt qu'anglaise. Dans ce contexte, le Chili, alors dirigé par Pinochet, met en effet à disposition ses ports pour donner une base au RU. Retournement:  l'Argentine est suprise par la riposte imméditate de Thatcher. Le croisier General Belgrano sera effectivement coulé (300 argentins vont mourir dans cette tragédie) hors de la zone d'interdiction, et mettra fin au procesus de pourparler entammé par les Etats Unis étant, alors en faveur de l'Argentine. Au cours de cette guerre de 72 jours, Thatcher s'est opposée à trois reprises au demande de Reagan d'un cessé le feu en faveur de l'attaquant. L'Argentine perd la guerre le 14 juin 1982.

    On déplorera la mort de 907 militaires Argentins (649) et Britaniques (255). Il ne s'agit pas non plus de disputer ici le droit de l'Argentine à revendiquer les Malouines (voir le journal de Thatcher + pour l'heure actuelle, le récent referundum de mars 2012 organisé par le RU aurpès de ses quelques 1600 habitants, pour la plupart d'ascendance britanique).  Mais il faudrait noter que l'intervention du RU provoque la chutte immédiate de la junte militaire et la transition démocratique en Argentine.

  3. Bruno ANEL

    "Jamais dans l'histoire un dirigeant n'avait montré une telle volonté de redonner l'espoir et la confiance en son pays". Cette appréciation me semble  exagérée, ne serait-ce que parce que son auteur oublie Winston Churchill, qui eut à faire face à des périls autrement plus graves que ceux que dût affronter Maggie Thatcher, qui ne vainquit que les mineurs en grêve et les généraux argentins. Si elle a redonné espoir à la City et aux entrepreneurs, ce ne fut pas le cas pour tous les Britanniques, tant s'en faut. Son bilan est aujourd'hui fort discuté par les économistes. La référence à François d'Assise est d'autant plus surprenante que la dame préférait incontestablement l'affrontement au consensus. La reine Elizabeth elle-même sortit à l'époque de sa réserve pour s'inquiéter des conséquences sociales du thatcherisme.Si les finances furent redréssées, les services publics en sortirent exangues et la désindustrialisation fut accélérée, et la confiance en l'économie de marché trouva ses limites en 2008 avec la crise financière. Mais quel personnage! Le thatcherisme fut  une posture avant d'être une politique.

  4. Helen

    Gracias "Denis depuis Chili" por tu intervención clara e histórica sobre el tema. Margaret no es recordada como Maggie por ningún argentino, todo lo contrario será el símbolo de la guerra y la discordia entre los países. lejos, muy lejos está de San Francisco "donde haya odio, ponga yo amor". Gracias!

    1. Denis depuis le Chili

      Helen, gracias por tu intervención.

      Thatcher es "símbolo", lo que se puede entender desde la herida todavía viva en Argentina. Sin embargo, me parece que hoy,  el "símbolo" está muy utilizado como en el tiempo de la dict., de tal modo que se pierde toda objetividad. Además, se ha descubierto petróleo en el Archipiélago…

      En cuanto a mí, a pesar de los actos extraordinarios de coraje y táctica de parte de los aviadores argentinos que han dejado a todos sin voz, creo que la intervención de Galtieri fue una irresponsabilidad cometida para distraer a los Argentinos del caos, sobre todo cuando uno mira a los jóvenes del norte que han sido largados al frío y en la violencia sin saber nada del mundo. Estrictamente hablando, según mi parecer, independentemente de si el motivo es legítimo o no, la intervención de Argentina fue una agresión, y una agresión imprudente.

      A propósito de las relaciones entre Chile y Argentina, el contexto explica las causas, sin embargo, me alegro mucho de que nunca tuvo una guerra, hubiera sido un fratricidio irreparable.

      Amo tanto a Argentina como a Chile !!!!!!!

       

       

  5. M.P-H

    I have dealt with British politics for a term paper lately and therefore read your article with great interest (a translation to be honest). Congratulations for a balanced an unbiased piece. I also liked the conclusion, I have never looked at it this way. You are absolutely right about our need for courageous and principled politicians, there´s a lack of such all across Europe these days. However, and you rightly mentioned this, Thatcher caused a lot of social damage as well. And don´t you think the current crisis is a result of her rigid economic politics (among others, of course)? Anyway, I enjoyed reading an article on Thatcher that was not full of left-wing hatred or right-wing praise.

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