de Jonathan L. Pinkerton 7 mai 2013
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En montant dans la navette, je réalisai que j'avais sous-estimé l'incroyable énergie et enthousiasme qui précèdent et entourent le Marathon de Boston. En quelques heures, je me retrouvai au beau milieu de presque 27000 coureurs dans le "Village des athlètes". 96 pays étaient représentés.
J'étais coude à coude avec des personnes qui étaient incroyablement passionnées par les 42,195 km de la course. En réalité, c'était plus qu'une simple course ; c'était une célébration historique de notre sport, un hommage à l'endurance physique et mentale, et pour beaucoup de coureurs c'était aussi l'opportunité de courir au profit d'une œuvre de charité.
Après cinq heures de préparation, j'ai finalement rejoint la ligne de départ à Hopkinton. Ma famille et mes amis m'ont aidé pendant mon entraînement et ont soutenu mon effort en vue de courir Boston. J'étais donc particulièrement excité de participer à cette course légendaire pour la première fois. Mais surtout, je voulais montrer que nous pouvons tous parvenir à nos fins, petites ou grandes. Un sentiment d'immense gratitude m'envahit pour les nombreuses grâces qui m'avaient été accordées. J'étais au septième ciel.
Le coureur à côté de moi courait en mémoire d'un être cher atteint de leucémie. Beaucoup d'autres couraient en mémoire ou en l'honneur de quelqu'un qu'ils aimaient. Le marathon de Boston a récolté près de 18 millions de dollars en 2013 pour des associations caritatives. J'étais au milieu de héros : pour certains athlètes, le seul but était de venir en aide aux autres, pour d'autres, de se surpasser pour atteindre la ligne d'arrivée. Le marathon de Boston permet la participation de personnes en fauteuil roulant, de personnes aveugles et malvoyantes et de personnes handicapées moteur.
Avant la course, j'ai découvert l'histoire de Dick Hoyt, un homme de 73 ans qui pousse son fils handicapé, Rick, de marathons en triathlons à travers tout le pays. Dick Hoyt incarne ce qu'est la vraie compétition : il concourt par amour de son fils auquel il veut donner une chance de se sentir libre de son handicap. Au huitième kilomètre de ce marathon 2013, au milieu d'une bousculade énorme de coureurs, j'ai aperçu les Hoyt. J'ai eu la grande chance de pouvoir courir brièvement avec eux et de les encourager. Chaque kilomètre de la course était animé d'un magnifique esprit d'espérance.
Dick et Rick Hoyt au Marathon de Boston – 2009 CC BY-NC-ND Chris Wraight
Après avoir franchi la ligne d'arrivée, j'ai été rejoint par ma femme et mes filles. Nous étions dans le métro de Boston lorsque nous avons entendu parler des explosions. Ma famille et moi, comme beaucoup d'autres, avons été protégés par la bienveillance et la miséricorde de Dieu. Au milieu du chaos et de la panique qui ont suivi les attaques, nous avons perçu une vague de sympathie et de compassion soulevée par les bombardements. Immédiatement, des hommes et des femmes courageux se sont levés pour aider et soigner les blessés. Alors que nous rejoignions notre hôtel, nous avons vu des personnes porter secours aux passants. Les églises ont organisé des prières et d'autres institutions ont mis de l'eau, des abris et des toilettes à disposition. Énormément de personnes ont répondu aux attaques par une grande générosité.
Le lendemain nous sommes rentrés chez nous en Pennsylvanie. Bien que nous ayons quitté Boston, cette expérience continue de nous habiter. La plus jeune de mes filles et son amie ont colorié des banderoles et les ont accrochées aux arbres et aux poteaux électriques du voisinage. On peut y lire : « Priez pour Boston » et « Pour la famille du garçon de 8 ans ». L'office œcuménique du 18 avril célébré à la cathédrale de la Sainte-Croix a été un grand signe de consolation et de compassion pour nous et pour beaucoup de ceux qui ont été touchés par les attaques. Durant l'office, le révérend Roberto Miranda, de la congrégation du Lion de Juda à Roxbury (Massachusetts) nous a délivré le message suivant : "Dieu tisse une large tapisserie de bonté dont certains fils sont obscurs."
Je crois que notre foi nous appelle à affronter ces "fils obscurs" avec miséricorde. L'amour est toujours plus fort que les ténèbres, sa lumière n'a pas d'égale. Bien sûr, pardonner peut parfois demander du temps et de vrais efforts. Il arrive aussi que cela se fasse presque imperceptiblement, en posant patiemment et humblement des actes de compassion ; en priant comme continuent de le faire de nombreux enfants et leurs familles pour soutenir Boston.
Je rentre des Etats-Unis où j'ai pu constater l'émotion soulevée par l'attentat de Boston. L'Amérique est extrèmement tolérante avec les particularismes qui peuvent s'afficher comme bon leur semble, pourvu que l'attachement à la patrie d'accueil soit indéfectible. Tout ce qui vient troubler le consensus patriotique est ressenti comme un séisme.