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Faut-il un shutdown en France ?

La France s'endette de 4640 euros de plus chaque seconde, soit 12 milliards de plus tous les mois en 2013, et près de 174 milliards par an. Philippe de PORTZAMPARC président depuis 32 ans de la Société de Bourse Portzamparc (qui fêtera ses 150 ans en 2014) a accepté de répondre à nos questions sur la dette, les conséquences et les issues possibles.


La dette française en direct
 

1/ Philippe de Portzamparc, une étude récente sur la croissance de la dette prévoit que celle-ci atteindrait 95 % du PIB en 2014. Ce niveau de dette est-il supportable à moyen/long terme ?

Cette dette atteindra 2.000 milliards d'euros, soit environ 32.000 € par Français, et plus du double si on retient les Français fiscalisés à l'impôt sur le revenu ou à l'ISF. C'est dangereux, et cela provient d'une absence de maîtrise des déficits annuels qui tournent autour de 70 à 90 milliards par an. Non seulement on ne rembourse par le stock de dette, mais on continue à empiler les déficits année après année à un rythme inquiétant.

2/ Comment se fait-il que malgré ce niveau de dette, la France emprunte à un taux étrangement bas ?

La France profite des taux mondiaux bas et de son image de n°2 en Europe, derrière l'Allemagne. Les investisseurs sont contraints de diversifier leurs risques en n'investissant pas uniquement sur la dette allemande, mieux notée mais moins rémunératrice. Même si la crise de l'Euro est derrière nous, la démarche vertueuse des pays de l'Europe du Sud et l'absence d'efforts réels de la France dans la maîtrise de ses dépenses amèneront inévitablement les agences de notation à dégrader notre signature. Notre dépendance aux non-résidents pour financer cette dette nous rendra fragiles et vulnérables, risquant de devenir la cible d'attaques spéculatives renchérissant le coût de cette dette.

3/ Comment la France peut-elle rembourser une telle dette ?

Pour l'instant, aucune hypothèse de remboursement n'est évoquée puisque l'on continue à subir un déficit annuel significatif. Il faut donc continuer à emprunter l'équivalent de ce déficit… qui nous permet de régler entre autres les intérêts de la dette (environ 50 milliards par an). C'est une spirale qui est loin d'être vertueuse. Les contribuables "cautionnent" cette dette, et si la croissance n'est pas au rendez-vous, le niveau des prélèvements déjà très lourd (46 % du PIB) ne pourra qu'augmenter avec ses conséquences dépressives. Si une rumeur de non remboursement se propageait sur le marché, comme pour la Grèce il y a 2 ans, imaginez les conséquences catastrophiques sur nos taux d'intérêt !

4/ L'étude en question montre que la courbe de la dette tendrait à s'inverser à l'horizon 2015-2017. Cela serait une première après avoir atteint un tel niveau ! Est-ce bien réaliste ?

La France ayant été contrainte de prendre des engagements vertueux vis-à-vis de l'Europe et des régulateurs mondiaux, elle vient de présenter pour son budget 2014 des hypothèses assez optimistes d'un retour à la croissance autour de 2 % pour 2015 à 2017. Si cette croissance n'est pas au rendez-vous, la baisse des déficits est illusoire, et cela explique pourquoi Bruxelles est en train de passer au tamis les documents fournis par Bercy. On fêtera en 2014 la 40ème année de déficit budgétaire, et on ne perçoit pas la volonté d'un groupe politique de nous proposer un jour un budget en équilibre, sans parler d'un budget excédentaire !

5/ Quels sont les leviers qui permettraient l'inversement de cette courbe, où voyez-vous des efforts possibles ?

Dans la mesure où la croissance ne se décrète pas et repose avant tout sur la confiance, il y a un vrai risque pour les années à venir si une prise de conscience collective n'est pas rapidement assumée. Le vrai levier repose sur la dépense publique qui atteint des niveaux insupportables. Un petit rappel simplifié nous fait constater pour la France qu'il y a 100 de recettes pour 130 de dépenses… ce qui veut dire en jargon de "père de famille" un déficit de 30 %. Normalement cela entraîne la faillite ou, à tout le moins, la Commission de surendettement de la Banque de France. C'est pour éviter cela que l'effort doit être massif, volontaire, d'autant plus que les Français supportent mal les pesanteurs administratives, les empilements de réglementations, les normes qui freinent l'initiative et ont provoqué nombre de délocalisations d'entreprises et de Français. Si notre classe politique ne veut assumer la situation, si notre sursaut n'est pas rapide… le pays risque de subir une crise économique, politique et sociale significative. A mon avis, les Français sont prêts à bouger, ils attendent le signal à défaut de quoi le réveil pourra être douloureux pour les contribuables, les épargnants, les retraités et les fonctionnaires… Rêvons un peu que l'on instaure un "shut down" à la française !!

de Philippe de Portzamparc

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5 Commentaires

  1. Vincent

    Joyeux anniversaire "budget en deficit"!

    Je trouve cela incroyable que l'on puisse gouverner en faisant si peu cas des generations a venir. Quel beau cadeau de naissance pour le bebe qui vient au monde! Je ne jette pas tant la pierre aux differents gouvernements qu'aux electeurs car personne n'eleve la voix sur le sujet. 

    Merci pour cet article qui reveille! Je trouve particulierement interessant la comparaison avec le pere de famille, qui au bout d'un an avec un tel deficit irait directement a la commission de surendettement de la bamque de France. Interessant aussi de relever que mesurer le deficit par rapport au PBI n'a pas de sens puisque le PIB n'est jamais de l'argent disponible. 4/5% du PIB c'est surtout 30% des recettes de l'Etat. Imaginons que le club de petanque de Pignans mesure son deficit par rapport a la somme des salaires de ses membres…

     

  2. le puil

    P { margin-bottom: 0.21cm; }A:link { }

    Par theodorum – Forum Economie de Boursier.com du 3 Octobre 2013.

    Les USA cherchent leur identité !  : Le ( mauvais ) modèle !

    A force de vouloir grossir en obligeant le Monde à s'ouvrir à leur commerce ils ont réveillé la Chine ! Au lieu de profiter de la misère du Monde pour s'enrichir , consommer et polluer à tout va ( après eux le déluge ) ils auraient pu aider les pays sous-développés à s'équiper en routes, écoles, hôpitaux, usines pour produire pour eux et chez eux, qui sont pauvres et non pour eux qui sont riches.
    Le temps n'est pas que de l'argent ( time is…) et la supériorité implique des devoirs; Le matérialisme ( comme la permissivité morale ) ne rend pas l' homme heureux ! Ils commencent à s'en apercevoir, d' où leur spleen ! Ils sont mal vus partout dans le Monde alors qu'ils auraient pu être des bienfaiteurs. Nous avons été contaminés et les technocrates qui nous gouvernent et qui sont des fonctionnaires d'abord, j'allais écrire Ponctionnaires !, c'est-à-dire qu'ils ne subissent pas la concurrence, qu'ils ont profitent seulement! n'ont pas su protéger le marché commun à 6 qui avait du sens ( du bon sens même ! ) mais il n'est pas trop tard, la dette, qui ne peut que croître, nous oblige à innover, ce que les fonctionnaires demandent au secteur privé d' habitude.
    En fait c'est à l'administration d'innover comme par le changement d'assise des charges sociales ( l'entreprise vache à lait a assez donné, comme la main invisible du marché ! )
    au moyen du droit d'accise ( plus qu'un changement d' orthographe ! ) laissé à libre disposition des gouvernements par le droit européen ( Ouf ! une fenêtre qu'ils ont oublié de fermer ! – Avec Giscard, l'ancien major de polytechnique, nous avons eu chaud, le droit de travailler a failli remplacer le droit au travail ! plus qu'une nuance ! ) car c'est un droit ( ou taxe ) neutre en matière de concurrence, fixé à un niveau dépendant du niveau de vie du pays de consommation et indépendant du prix ou de la provenance, on pourrait dire physique, comme les droits sur les alcools, le tabac ou les carburants, au litre, au poids, au M2 ou à la pièce.
    Ainsi le poids des charges sociales serait effacé vis à vis des pays où elles n'existent pas, cela pourrait aussi concerner l'empreinte carbone, etc…enlevant donc aux consommateurs ( et aux fonctionnaires – c'est d'autant plus nécessaire qu'ils vivent des impôts handicapant en cas d'excès ( le clientélisme ) la compétitivité du secteur productif- la tentation d'échapper à la solidarité .
    De cette façon, exportant hors TVA ( déjà ) on exporterait aussi hors charges, ce qui nous rendrait non seulement très compétitif, mais obligerait tous les pays concurrents à nous imiter: Est-ce logique de faire payer aux étrangers nos cotisations chômage, sécu et retraite alors qu'ils n'y ont pas droit ? N'est-il pas normal aussi d'imposer également tous les produits que nous consommons ?
    Une 2 ème mesure, pour s'assurer qu'en face du droit au travail ( ou voeu pieux ) il existe
    une obligation, celle d'employer, la solution consisterait à instituer un Contrôle de la valeur ajoutée brute ( CVAB ) de 50 % d'où on aurait le droit de déduire la masse salariale dans la limite ( en France ) de 2 SMIG par salarié. On pourrait payer plus sur les 50 % disponibles. Toutes les entreprises ont intérêt à ce que toutes les autres, sauf elles-mêmes, paient bien leurs salariés parce qu'ils sont des clients éventuels. Il faut donc une loi qui les y oblige dans la mesure du possible. De même du fait de l'interdépendance entre pays chacun attend que les autres bougent.
    Une 3ème mesure pour finir, les 2 autres ont réglé une grande partie du problème! valable pour tout pays – donc une administration puissante est nécessaire, ce qui ne veut pas dire obèse ! – serait le contrôle de la valeur ajoutée de 20 % d'où les entreprises pourraient déduire un smig amélioré assorti d'un crédit d'impôt, de façon à rééquilibrer la concurrence où l'incidence des frais fixes pénalise les plus petits ou moins bien placés et à reprendre les remises exigées des fournisseurs par les plus gros concurrents. Une concurrence saine a besoin d'être homogène.
    Concernant ces 2 CVAB il faut préciser qu'ils ne s'agit pas de procurer de l'argent à l' ETAT mais d'inciter à employer et payer correctement. Avec ces 3 mesures on n'entendrait plus parler de travail le Dimanche, qu'on pourrait laisser libre, ni de déficits divers, ni, sans doute de chômage, car le Progrès servirait aussi à diminuer la durée du travail, mais pas de façon uniforme, donc injuste , tous profitant en ce cas de la pénibilité du travail de certains qui auraient mérité une diminution supérieure, comme un PIB moyen ne veut rien dire !
    Ces 3 mesures constituent un nouveau modèle durable et remettraient les Américains à leur place !

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