Le premier film de l’acteur et réalisateur afro-américain Nate Parker, « The Birth of a Nation » (Naissance d’une Nation) vient de recevoir des récompenses aux festivals de Sundance et Tribeca (USA). L’on pourrait s’étonner d’un énième film sur l’esclavage aux Etats-Unis, 151 ans après que celui-ci ait été abolit par la Constitution, mais ce serait sans compter sur le besoin de toute mémoire d’être guérie en vérité (sortie en France : octobre 2016).
Nate Parker a porté ce projet durant sept ans. Années pendant lesquelles il écrit le film, recherche les fonds et prépare la réalisation. Il mène aussi sa carrière d’acteur, avec une quinzaine de films et séries à son actif depuis 2003. Il a pourtant décidé d’arrêter de tourner pendant deux ans afin de pouvoir se consacrer entièrement à la réalisation de ce projet.
Passionné depuis sa jeunesse par la vie d’un esclave, Nat Turner, – éduqué et alphabétisé par ses maîtres pour pouvoir tenir le rôle d’un contremaître, mais qui peu à peu, ne pouvant plus supporter les injustices et l’oppression que subissent les siens, se révolte et organise un soulèvement contre les planteurs Blancs – il désire réhabiliter la mémoire de cet homme dont la rébellion le mènera à la pendaison. C’est pour cela aussi qu’il prend le risque de donner à son film le même titre que celui tourné en 1915 par D. W. Griffith, et qui exalte la « White supremacy »[1]. Il prend ce risque car il s’agit pour Nate Parker d’appeler les hommes à une nouvelle naissance, une naissance intérieure, à la conscience du bien et de la justice. La parole est aujourd’hui aux hommes qui veulent être vraiment libres.
Le piège du système
Qui a t-il de différent dans la manière de voir de Nate Parker ? Il ne se contente pas seulement de dénoncer la terrible inhumanité de l’esclavage. Son regard est plus profond, plus subtil et a l’intelligence de pouvoir s’appliquer partout, pour toute situation de discrimination ou de violence, hier et aujourd’hui. Que nous dit-il ? On peut avoir les meilleurs intentions et pourtant se laisser prendre au piège – plus ou moins volontairement – d’un système injuste. C’est ce qui se passe pour les propriétaires de l’esclave Nat Turner qui, de bonnes gens qu’ils sont, vont tout de même se plier au système corrompu pour protéger leurs intérêts et sacrifier la vérité du cri de leur esclave.
Plus profondément, qu’est-ce qui anime Nate Parker dans cet engagement contre l’injustice ? Il le dit lui-même dans beaucoup d’interview. « Que pourront dire mes filles, de moi, plus tard ? Seront-elles fières de ce que j’aurai laissé derrière-moi, fais de ma vie ? » C’est en regardant ses enfants qu’il a d’ailleurs souvent repris courage, lorsque ses propres amis essaient de le dissuader de mener son projet ou lorsqu’il a effectué cette tournée incroyable pour récolter les 10 millions de dollars qui ont constitué le budget du film. Il est aussi animé par la conscience qu’il ne suffit pas que l’abolition de l’esclavage soit signée sur un papier, si elle n’est pas d’abord imprimée dans les coeurs et les mentalités.
L'indiférence ou le sacrifice
À 36 ans Nate Parker est un artiste engagé, un homme engagé. En 2014 Il réalise un court métrage : AmeriCAN[2] – en réponse aux troubles liés aux tirs meurtriers des policiers sur des jeunes Noirs. Il se rend à Ferguson et il va régulièrement parler là où on l’appelle, dans les lycées, les écoles. Il vient de créer une section de cinéma au Wiley College, au Texas, pour permettre aux étudiants Noirs de l’école de bénéficier de cette initiation au septième art. Il dénonce lui-même l’échec apparent de la jeune génération de sa communauté qui remplit les prisons. « Remplissez plutôt les Universités, les encourage t-il, visez des métiers qui demandent un sacrifice, des études, devenez des médecins, des avocats ». Il rappelle que le racisme est toujours une réalité actuelle aux États-Unis, tout le monde n’est pas Mickael Jackson ou Barack Obama.
Nate Parker court-il après les Oscars ? Durant son interview sur le site Vulture, à la journaliste qui lui demande pourquoi il n’est pas allé présenter son film au Festival de Toronto – histoire de mieux s’assurer un avenir oscarisé – il répond simplement qu’il est allé demandé conseil à son grand ami Denzel Washington, avec qui il a tourné dans « The Great Debaters » en 2007, pour savoir ce qu’il devait faire. Ce dernier lui répond : « Men gives an award and God gives a reward ».[3] Mais le film a déjà de toute manière donné sa mesure. À peine présenté au Festival Sundance[4] dont il a gagné le Grand Prix du Jury et eut l’honneur d’une standing ovation avant et après sa projection, le film a été acheté 17,5 millions de dollars par la Fox-Searchlight, ce qui pour un réalisateur quasi inconnu est plutôt exceptionnel. Nate Parker vient également de remporter le prix « Tribeca Disruptive Innovations Award » du Festival de Tribeca[5]. « Être un activiste est une place où l’on est seul » dit-il durant son remarquable discours de remerciements de huit minutes où il regrette que « l’apathie sois la norme » devant l’injustice. « Tout changement demande un sacrifice ».[6]
La blessure d'un pays
La bande annonce du film est saisissante, sur un fond musical tout aussi poignant, avec la chanson « Strange Fruit » écrite par Abel Meeropol, avec la version de Nina Simone dans le film. Cette chanson des années 30, qui dénonce les lynchages dont furent victimes les Noirs, jusqu'après la seconde Guerre Mondiale, value à Billie Holyday qui l’interpréta aussi, d’être mise à la porte de la ville de Mobile, en Alabama, où elle s’apprêtait à la chanter.
Penser que la cohabitation Blancs-Noirs aux Etats-Unis est totalement résolue serait une erreur. L’abolition de l’esclavage a engendré la ségrégation, et la ségrégation existe toujours, même si la loi « séparés mais égaux[7] » n’est plus en vigueur officiellement. Bien que la guerre de Sécession soit loin dans nos esprits, le vent n’a pas tout emporté. Aux Etats-Unis aussi, il y a le Nord et le Sud et il faut être Américain et aspirer à l’unité pour en souffrir encore. Le Sénat Américain a d’ailleurs demandé pardon en 2009 pour l’esclavage[8].
On sait que le droit de votre pour les Noirs, accordé en théorie le 26 février 1869, par le Congrès Américain, sous la forme du XVème amendement, ne prendra en réalité effet qu’un siècle plus tard, au prix de brimades incessantes et d’une longue lutte qui aura coûté la vie à nombre de personnes[9]. À ce propos un article très intéressant est paru dans Le Journal International signalant qu’une révision de cette loi a eu lieu en 2013, révision qui est un inquiétant retour en arrière.[10]
Non, la mémoire de la société Américaine n’est pas encore guérie de l’esclavage, surtout pour ceux qui sont descendants d’esclaves et qui porte encore le nom du propriétaire de la plantation où leurs ancêtres ont laissé leur vie. Si l’on en juge par le succès de l’initiative de la Witney Plantation en Louisiane, on peut se dire que le traumatisme est toujours présent.[11]
Dans son rôle du policier Kazam Nicol, dans le film Beyond the Lights (2014) de Gina Prince-Bythewood, Nate Parker prête à sa partenaire, en guise de présentation, une citation qui caractérise sa vie dans la réalité : « La vérité est la seule chose sur laquelle s’appuyer [12]» et elle pourrait effectivement lui servir de carte de visite. « Si les gens qui voient mon film acceptent cette confrontation honnête avec le passé, alors le changement surviendra.[13] »
Il faut vraiment être, et vouloir être, naïf en s'imaginant que le melting pot a été une réussite ….
On n'enlève pas comme çà, commme par un tour de magie, les fondamentaux d'une Nation qui a été fondée sur la suprématie de la race blanche calviniste, appuyée par ailleurs par nombre de francs-mac (la majorité sur les 52 fondateurs) et qui, à peine débarquée, a commencé par éradiquer les Indiens.
C'est d'ailleurs la même chose pour nous puique notre pays n'a toujours pas réussi son coming-out par rapport à 1789 et ses horreurs absolues basées sur l'Egalité !
Les USA ne sont pas sortis encore des ennuis, les noirs de là-bas encore moins, et quand on se souvient du tissu d'âneries qui ont été proférées dans les merdias à l'occasion de l'élection d'Obama, le Rédempteur de la Nation, on aurait envie de se taper sur les cuisses de rire à faire le bilan de ce triste sire en matière d'amélioration des rapports sociaux internes aux USA.
Et ce n'est pas l'arrivée au sommet de cette effroyable raie d'Hilary qui a de quoi rassurer (cf sur you tube, les qques secondes où elle parle de Khadafi / taper "On est venus, on a vu et … il est mort !" c'est une démente qui parle et elle fait penser, d'ailleurs, à Héléna …. mais si, rappelez-vous, la dingue de Roumanie !)