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J.S. Bach et Marie au Musikverein de Vienne !

Saviez-vous que le très grand génie Jean-Sébastien Bach, protestant, avait composé des œuvres pour la Vierge Marie ? C’est en les proposant à son public dans la Salle dorée, la plus prestigieuse de Vienne que le Musikverein rend un hommage tout spécial à l’Immaculée Conception en ce 8 décembre.. Une méditation de Dr. Christiane Kohler-Weiß, pasteure et professeur de théologie, est postée à cette occasion sur le site du Musikverein. En voici quelques extraits. 

Etre regardé avec amour

Etre regardé avec amour et chercher la considération, voilà peut-être l’un des désirs plus profonds de la vie humaine. Que ne ferait-on pas pour se démarquer, pour se faire remarquer, pour gagner en considération ! Dans le Magnificat aussi, la raison de la joie de Marie est que Dieu l’a regardée. Du fait d’avoir été regardée par Dieu, sa transformation commence : de l’humble jeune fille, elle devient la Reine du Ciel, de la jeune femme insignifiante, la Mère de Dieu, d’une personne sans voix, un témoin courageux et puissant des grandes œuvres de Dieu. Tout commence par ce regard de Dieu sur Marie, par ce prix qu’elle possède aux yeux de Dieu et qu’Il lui donne en la regardant. C’est pourquoi le thème « d’avoir été regardée » (Angesehenwerden ») joue un rôle important dans les trois compositions.

Regard de l’amour, regard de la grâce

Dans les deux cantates de Marie, ce sont surtout les arias sopranos qui dressent un pont entre Marie et nous. Remarquez dans l’air « Seigneur, toi qui es fort et puissant. » (BWV 10) le « me » merveilleusement inséré dans l’affirmation « Tu me vois misérable ! ». Tandis que cette aria exprime surtout la force et la puissance du regard transformateur, l’aria « Prépare-toi, Jésus, le chemin pour toi-même  » (BWV 147), manifeste avant tout le profond désir d’être regardé.

La plénitude promise aux  pauvres

Dietrich Bonhoeffer appelait le Magnificat « le chant de l’Avent  le plus passionné, le plus sauvage, on voudrait presque dire, le plus révolutionnaire jamais chanté. Ce n’est pas Marie la douce, la tendre, la rêveuse, vue sur certains tableaux, mais c’est Marie la passionnée, l’enchantée, la fière et l’enthousiaste qui parle ici… un chant fort et dur sur les trônes renversés et les seigneurs de ce monde humiliés, sur la puissance de Dieu et l’impuissance de l’homme ». Il n’est pas étonnant que la fête de la Visitation de Marie (2 juillet), pour laquelle John Sebastian Bach composa ses deux cantates de Marie, et à laquelle le franciscain Bonaventure donna une place fixe pour la première fois dans le calendrier liturgique de son Ordre – soit autant apprécié des amis des pauvres, de François d’Assise au Pape François.

La révolution de la Miséricorde

Les cantates mariales de Bach témoignent de la révolution de la Miséricorde de Dieu de différentes manières. La BWV 147 tient compte du fait que beaucoup de gens vivent ainsi, comme si la libération de l’homme du péché n’avait pas encore eu lieu, comme s’ils ne savaient rien de « l’apparition consolante du Christ » et de la possibilité de salut qui lui est associée pour tous les hommes. Ils sont aveuglés par les puissances du monde et la splendeur des riches, et leurs cœurs s’endurcissent contre la volonté de Dieu – jusqu’à ce que Lui-même les secoue. Dans le récitatif basse (n° 4), c’est le violoncelle qui est en charge de cette rupture. Apparemment, il faut de tels  tremblements, pour que les chrétiens, avec « le cœur et la bouche, les actes et la vie », puissent chanter des chants d’espérance. Dans BWV 10, l’aria basse (n°4) dans une adaptation poétique du « Magnificat », annonce les actions révolutionnaires de Dieu : Les puissants sont précipités jusqu’à la limite du chantable vers le bas, tandis que les affamés peuvent se rassasier de l’océan de grâce de Dieu. ( …)

Dans le cadre immédiat du « Magnificat » (BWV 243), le saint renversement de Dieu occupe le plus grand espace. En quatre sections (n° 7 – n° 10), le bras puissant de Dieu est chanté en coloraturi saisissantes, le chœur et les trompettes jubilent jusqu’à l’épouvante des puissants, de mélodieuses montées et descentes sont effectuées, ainsi que des renversements harmoniques, les flûtes évoquent les affamés comblés de biens dans un Règne de paix, et la fidélité de Dieu est assuré à ce petit peuple d’Israël occupé par la grande Rome. Marie ne danse pas selon le sifflet de ceux qui sont au pouvoir et qui règnent avec la mort – elle chante la vie, un chant d’espérance pour tous ceux qui ont faim de justice.

L’art du laisser-faire

Dans les cantates de Bach, le dialogue entre l’ange Gabriel et Marie n’est pas mis en musique, en revanche l’attitude (le fiat) de Marie s’exprime encore et encore, par exemple dans le domaine linguistique, ce que Dieu a fait « pour elle / pour moi » (an mir, an ihr). C’est particulièrement évident dans le cas de la Soprano aria « Seigneur, qui es fort et puissant. » (BWV 10, n° 2). Il est dit : « Tu as fait tellement de choses pour moi, que je ne peux toutes les compter ni les remarquer. » Par un recul progressif de l’orchestre dans l’accompagnement de la voix, est exprimé en musique que l’œuvre de Dieu se déroule souvent en secret, au-delà de ce que nous pouvons comprendre et percevoir consciemment

Interpretes :
Concentus Musicus Wien
Arnold Schoenberg Chor
Stefan Gottfried – Chef d’orchestre
Emőke Baráth – Soprane
Catriona Morison – Soprane
Marie-Claude Chappuis – Alto
Werner Güra – Tenor
Krešimir Stražanac – Bass

 

L’article complet sur le site du Musikverein.
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