Home > Musique, Danse > Les passants, de Yoann Bourgeois

Que peuvent bien communiquer des hommes, des femmes, des enfants et des vieillards qui ne font qu’apparaitre, déambuler quelques instants, se croiser et disparaitre ? Bien peu de choses nous semble-t-il. Cependant, Yoann Bourgeois ( déjà connu des lecteurs de ce blog : Yoann Bourgeois, le saltimbanque de la communion ) nous prouve le contraire dans sa présentation “Les Passants”, à laquelle les Lyonnais de passage sur la place Bellecourt ont eu la chance d’assister.

Par une belle après-midi d’été une foule innombrable se masse autour d’un étrange appareil rond d’une vingtaine de mètres de diamètre, la moitié du cercle semble plat tandis que l’autre est étrangement surmonté d’un escalier ne menant nul part, si ce n’est qu’à mi-hauteur celui qui s’y serait aventuré aurait encore la possibilité de quitter ce drôle de vaisseau pour rejoindre la foule amassée sur la place.

Soudain tout se met en mouvement ! Ce qui se révèle être une scène se met à tourner et un petit enfant sorti d’on ne sait où marche quelques instants sur le devant de la scène contre le sens de la marche. Le public perd tout repère, il marche mais reste immobile, il n’avance pas mais ce sont les différents éléments de la scène qui viennent à lui. Déjà, la roue du destin est en marche et l’on n’a plus de prise sur lui, impossible désormais de faire demi-tour sans être entrainé dans un tourbillon infernal, impossible aussi d’imaginer un retour à l’immobilité. Cependant l’enfant nous montre sans aucune angoisse qu’un autre équilibre est possible, que le bonheur est devant lui, vient à lui, et lui-même marche à sa rencontre d’un pas décidé.

Soudain l’enfant disparait aussi mystérieusement qu’il était apparu, la scène est à nouveau vide. C’est alors un jaillissement de vie qui s’offre à nos yeux ébahis, l’enfant a grandi, rencontre une femme, aime et donne la vie, d’autres personnages surgissent faisant foisonner ce monde clos en l’ouvrant sur quelque chose qui les dépasse. L’espace est restreint mais prend la dimension d’un monde, l’instant prend la mesure d’une génération. La scène se rempli puis se vide le temps d’une révolution. L’histoire de chacun croise celle de l’autre dans des moments de liesse comme ces enfants qui chantent ou de drame comme ce groupe inerte dans l’escalier. Le mouvement perpétuel est parfois accentué comme lorsque quatre jeunes hommes entament une sorte de danse extraordinaire en transformant leurs corps en de véritables quilles d’un jongleur invisible. Parfois au contraire tout se fige et nous sommes aussi troublés que lors de la visite d’un musée de cire.

Durant une dizaine de minutes Yoann Bourgeois parvient à nous rendre spectateur du drame et de la beauté de la vie, de la douleur de l’absence de sens et de la mystérieuse joie de sentir que nos vies, jamais isolées, sont dans les mains d’une présence profondément bonne, qui nous aime, nous porte, nous relève et nous invite à vivre tout ouverts et émerveillé ; comme des enfants.

Video de l’Ouverture de la 18eme biennale de la danse à Lyon, le 16 septembre 2018

Passants – Yoann Bourgeois – Reportage TéléGrenoble

Vous aimerez aussi
Pina Bausch-Sacrifice et vie
Il y a là quelque chose d’infini
António Casalinho : Lauréat du Prix de Lausanne 2021
Dance for the Apocalypse

1 Commentaire

  1. CI

    Merci Vincent de nous aider à garder le lien avec cet incroyable artiste. Son sourire, les quelques mots qui prononcent pour expliquer cette nouvelle oeuvre, parlent d'eux-mêmes : c'est quelqu'un qui aime!