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« Mamba Out » ( I ) : un génie du basket tire sa révérence

Le 13 avril 2016, le « Black Mamba », surnom de la star des Lakers, Kobe Bryant, joue son dernier match NBA. En entendant crier la foule venue le voir, il se murmure « oh don’t suck » (ce qu’on peut traduire élégamment par : « oh, ne te loupe pas » !). Il pulvérise son record de la saison en marquant 60 points, dont une série folle de 12 points lors des 130 dernières secondes pour arracher la victoire. Acclamé par son public, il tire sa révérence disant simplement : « Mamba out » (Le Mamba s’en va). Quatre ans plus tard, le 26 janvier dernier, il meurt dans un accident d’hélicoptère avec sa fille Gianna.

 

Kobe Bryant, le Black Mamba (Crédit : Kobe Bryant – AFP Stan Honda)

 

Sa mort a provoqué une onde de choc, tous les journaux en ont parlé, de nombreuses stars ont réagi, le match des Lakers a été annulé : « C’était trop, insistaient les responsables des Lakers, le club où Bryant joua durant 20 ans, de demander aux joueurs et aux employés du club d’organiser un match télévisé à l’échelle nationale deux jours seulement après la mort de Bryant » [1]Traduction libre – https://www.nytimes.com/2020/02/01/sports/basketball/kobe-gianna-bryant-mamba-academy.html 

Mais qui est Kobe Bryant ?

En 1996, Kobe Bryant n’a que 17 ans et fait partie des rares joueurs à être sélectionnés en NBA directement depuis le lycée. Il entre chez les Hornets puis passe rapidement chez les Lakers (Los Angeles), équipe à qui il restera fidèle toute sa carrière.

Kobe Bryant, c’est un des meilleurs palmarès de l’histoire de ce sport : 5 titres de champions NBA, 33 643 points marqués en 20 ans, ce qui le place dans les 5 meilleurs joueurs de l’histoire, double champion olympique à Pékin en 2008 et à Londres en 2012 avec l’équipe USA, nommé MVP (meilleur joueur) de la saison en 2008.

 

 

Kobe Bryant aime passionnément le basket et la compétition, il ne s’est jamais caché de son but : gagner des titres. Et pour cela, il avait une éthique de travail radicale : « Je suis un travailleur maniaque, et si vous ne travaillez pas aussi dur que moi, je vais vous le faire savoir » [2]Traduction libre – https://www.gq.com/story/kobe-bryant-nba-allstar . Il travaille chaque jour dès 5h du matin. A un coach qui lui demande, tard dans la nuit, à quelle heure il avait terminé son entrainement, Bryant répond « à l’instant, je voulais réussir 800 tirs avant de quitter la salle ». Non sans humour, il se compare à Mozart : « J’ai trop tiré depuis que j’ai huit ans. Mais « trop » est une question de perspective. Certaines personnes pensaient que Mozart avait trop de notes dans ses compositions. Permettez-moi de le dire ainsi : Je divertis les gens qui disent que je tire trop. Je trouve cela très intéressant. Pour en revenir à Mozart, il a répondu aux critiques en disant qu’il n’y avait ni trop de notes ni trop peu. Il y en avait autant que nécessaire » [3]Traduction libre – https://www.gq.com/story/kobe-bryant-nba-allstar

En 2008, sélectionné comme capitaine de la Dream Team USA pour les Jeux Olympiques de Pékin, Kobe Bryant arrive au petit déjeuner à 8h du matin le premier jour, transpirant, avec des packs de glaçons sur ses jambes, entourés de ses coachs. Il s’était levé à 5h du matin pour s’entraîner. Cette scène a ébranlé tous les joueurs. Kobe raconte « Dwayne Wade a été le premier à se joindre à moi. Il se pointait au gymnase à 5h. Puis LeBron s’est pointé à 5h. Et puis, très vite, la plupart des gars étaient présents à 5h. Ils restaient aussi après l’entrainement avec moi pour des séances de shoots. C’est comme ça que j’ai appris à les connaître » [4]https://www.youtube.com/watch?time_continue=526&v=kFzlftLJZ0c&feature=emb_title . Les Etats-Unis remportent la finale des JO contre l’Espagne. Ils remettent ça en 2012 à Londres.

Un travailleur acharné doublé d’une combativité hors pair, jouer avec lui donnait l’impression que rien n’était jamais perdu. Par exemple, il se casse le doigt en plein match, se le fait remettre, continue à jouer et gagne. Se déchire le tendon d’Achille sur une action, sort et finalement revient pour tirer son lancer-franc quand il voit que l’arbitre a sifflé une faute.

L’autre trait qui le caractérise le plus, c’est sa capacité à prendre un match à son compte quand son équipe est dépassée. Ses entraîneurs sont souvent impressionnés par son audace, même sous pression, dans les dernières minutes où il excellait particulièrement, il tente et réussit à marquer des points proches de l’impossible que bien d’autres joueurs auraient ratés. Comme il le résume lui-même : « Vous êtes le capitaine du navire, vous gagnez ou vous coulez avec le navire » [5]https://www.youtube.com/watch?v=VH1wT4osLxQ

 

Kobe Bryant et Shaquille O’Neal, célèbre duo des Lakers (Crédit)

 

Le revers de la médaille de ce talent et de cette exigence folle, qui n’épargne aucune star, est un ego extrêmement difficilement gérable, ce qu’il reconnaît avec humour. Quand son ami des Lakers Shaquille O’Neal lui fait remarquer qu’il a peu fait tourner le ballon sur un match en lui disant énervé : « il n’y a pas de « je » dans une équipe » Kobe lui répond désolé : « je sais, mais il y a un « moi » encombrant » (there is a « ME » in this mother f***er) [6]Traduction libre – https://www.businessinsider.com/kobe-bryant-memorial-shaquille-oneal-jokes-no-i-in-team-2020-2 . La presse voulut faire un buzz de leur inimitié. Mais pour Kobe rien de tel : « si vous ne travaillez pas aussi dur que moi, je vais vous le faire savoir. C’est pourquoi Shaq et moi avons toujours une bonne relation : Il sait que je n’ai pas peur de lui. Je lui disais ce qu’il faisait et ce qu’il ne faisait pas. Et vice versa. Il y a eu des moments où nous ne pouvions absolument pas nous supporter l’un l’autre. Nous ne pouvions pas être dans la même pièce ensemble. Mais nous nous sommes poussés jusqu’au bout l’un l’autre. » [7]Traduction libre – https://www.gq.com/story/kobe-bryant-nba-allstar Ensemble, ils formèrent le duo le plus redouté de la NBA et remportèrent 3 titres NBA consécutifs en 2000, 2001 et 2002, avant que Shaq ne parte pour un autre club. Dans son hommage, Shaq confiait : « La dernière fois que nous avons parlé c’était au Staples Center et je lui demandais de marquer 50 points. Ce soir-là, il en a inscrit 60 ! » [8]https://www.cnews.fr/basket/2016-04-14/avec-ses-60-points-kobe-bryant-releve-le-defi-de-shaquille-oneal-727295

La retraite professionnelle

A 41 ans, le « Black Mamba » prend sa retraite. Il se confia sur ce que lui avait coûté de jouer à un tel niveau pendant 20 ans : « en vieillissant, votre corps commence à lâcher, et il faut vraiment aimer le cours de la vie pour s’en sortir. Comme, en ce moment, j’ai mal. Les articulations de mes chevilles, les articulations de mes genoux. Mon dos. Mes cuisses sont douloureuses ». Il décrit à ce moment une véritable expérience de mort : « On ne peut pas avoir la vie sans la mort. La lumière sans l’obscurité. Donc c’est une acceptation de tout ça. Quand est venu le moment de décider si je devais prendre ma retraite ou non, [c’était] vraiment une acceptation de cette mortalité à laquelle tous les athlètes sont confrontés. Et si vous la combattez, vous aurez toujours cette lutte intérieure en vous. » [9]https://www.parismatch.com/People/Quand-Kobe-Bryant-evoquait-son-rapport-a-la-mort-1670829

Kobe Bryant reste profondément reconnaissant pour le basketball. Il réalise un court-métrage oscarisé appelé « Dear Basketball » dans lequel il parle de cette rencontre avec ce sport qui a changé sa vie, d’une passion qui l’a fait vibrer depuis son enfance. « Cher basket, tu as donné un rêve aux couleurs des Lakers à un enfant de 6 ans, je t’aimerai toujours pour cela, mais je ne peux plus t’aimer aussi obsessivement encore longtemps. (…) Mon cœur peut accepter les critiques, mon esprit peut gérer les efforts, mais mon corps sait qu’il est temps de dire au revoir. » 

 

 

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