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Morgan O’Kane, son Banjo, les rues de New York.

Morgan O’Kane est musicien Nord-Américain originaire de la Virginie. A l’âge de 22 ans il fait de New York son port d’attache. Comme presque tout migrant arrivant dans la ville il rejoint sa communauté d’origine faite d’amis venus de Virginie. Lors d’un concert des Hackensaw Boys (un groupe venant lui aussi de Virginie) il est marqué par Robert St Ours, au banjo, au point de se décider à apprendre à jouer de cet instrument.  Après s’être cassé les deux pieds, conséquence d’une chute lors de travaux de peinture, confiné sur sa chaise roulante, il apprendra tout seul à jouer de l’instrument de ses rêves. Il ne cesse, depuis, de jouer dans les rues et les métros de New York faisant de ces lieux ses salles de concert !

 

Morgan O’Kane. Photo : Source

 

Morgan vient d’un État du Sud-Est faisant partie des 13 premières colonies des États-Unis. Mais c’est surtout un État connu pour la richesse de sa tradition musicale dite des Appalachians. Les Appalachians, chaîne de montagnes s’étalant de l’Alabama jusqu’au Maine, sont le berceau de la musique traditionnelle, dite folk, américaine. Morgan a grandi dans cette tradition. De plus, lorsqu’il entend Bobby St Ours, son cœur est emporté par le son et le rythme du banjo, instrument typiquement américain. Il est, pour ainsi dire, destiné à être musicien de Folk Music.

O’Kane n’est pas reconnu comme un musicien de Folk Music uniquement parce qu’il est originaire des Appalachians et joue du banjo. Il prend part à la dynastie des musiciens folk parce qu’il crée de nouvelles chansons et musiques en s’appuyant sur les fondations Folk tout en se laissant imprégner par la vie, la réalité qui l’entoure. Sa musique respecte les canons traditionnels mais est inspirée de la rue, de cette vie jaillissante, de cette ville qui ne dort jamais, des gens qui courent, stressent quotidiennement et à toute heure dans le métro. C’est d’ailleurs ce lieu qu’il choisit pour jouer et qui, peu à peu devient sa salle de concert et l’origine de son inspiration.

Cette ambiance, cette réalité vivante est la matière qui permet d’enrichir la « tradition », dans le sens où il ne joue pas simplement une musique composée dans le passé, riche de l’expérience d’autres venus avant, mais il arrive à mettre ses qualités de musicien, son génie, au service de la réalité d’aujourd’hui, de la vie qui jaillit  maintenant. Cela n’est-il pas aussi du Folklore quand on met en musique les aspirations, les recherches et même les cris de la personne humaine dans sa réalité d’aujourd’hui ?

 

 

Malgré les quelques tournées musicales internationales et le succès rencontré, sa salle de concert préférée reste la ville de New York, ses rues et ses stations de métro. Il le dit souvent dans ses interviews que ces lieux sont pour lui extrêmement enrichissants puisqu’ils sont à la fois espace de concert et lieu d’inspiration. La plupart de ses morceaux révèlent, par leur rythme très entraînant et plein de vie, la réalité des gens qu’il observe. Pour lui, jouer dans le métro, « c’est absolument incroyable car il y a une sorte de connexion humaine [qu’il] n’expérimente pas forcément en concert ou en salle d’enregistrement ». Dans le métro, « il y le moment présent, une rencontre qui se fait là maintenant et qui est vivante, spontanée ». Ce n’est pas quelque chose de conditionné, puisque le passant tombe par hasard sur le musicien qui joue, démarche un peu différente du concert où les gens réservent à l’avance et prévoyant, dans leur planning, un temps particulier pour l’écouter. Et puis c’est aussi un espace qui offre une grande liberté au musicien. Il peut s’exprimer plus simplement que dans une salle où il y règne une certaine pression, avec des gens qui payent et qui ont une certaine attente voire une exigence.

 

 

Hey Mama, Morgan O’Kane

 

« Hey maman aime moi / Hey maman pleure / Hey maman embrasse-moi encore une fois / Hey maman aime moi / Hey maman meurs / Hey maman reprends-moi encore une fois / Serre-moi dans tes bras / Serre-moi dans tes bras, s’il te plaît / Serre-moi dans tes bras / Hey maman aime moi / Ne me dis pas de mensonges / Emmène-moi à la rivière / Et laisse-moi là / Laver la douleur / Enlever le péché / Mets-moi dans tes bras et aime-moi encore / Tiens-moi dans tes bras / Prends-moi dans tes bras, s’il te plaît / Prends-moi dans tes bras »

 

Dans la rue, des personnes s’arrêtent pour l’écouter jouer, certaines lui donnent de l’argent en signe de reconnaissance, d’encouragement. Par ce geste il y a, selon Morgan, une sorte de connexion qui se vit entre lui et la personne qui offre cet argent. En route pour le travail, choisissant de s’arrêter pour écouter, le spectateur s’engage pour un instant avec le musicien. Ces petits engagements non programmés émeuvent beaucoup Morgan et ils lui sont extrêmement importants. Il dit que cet argent laissé après un temps d’écoute est pour lui la transaction la plus honnête qui soit. Car chacun donnera à la mesure de son amour pour sa musique. Comment ne pas voir dans ces rencontres de quelques instants, non programmées, une forme de surprise et de gratuité : le musicien est là, il joue ; le passant s’arrête, il écoute la musique et s’engage, se donne à son tour. Il y a une offrande qui est faite dans les deux sens, une offrande libre et qui naît justement de la rencontre, de la joie et de la beauté de la musique.

 

 

Cet espace de liberté permet également au musicien la possibilité d’une plus grande spontanéité, laissant à l’inspiration et au génie l’ouverture pour un déploiement. Il est émouvant de voir la joie des gens qui chantent avec lui, ou dansent tout simplement en l’écoutant, rien que pour un moment en attendant le métro…

 

 

À regarder ses vidéos, j’ai hâte qu’il puisse reprendre son banjo pour jouer à nouveau dans le métro newyorkais. Pendant ces 2 derniers mois de confinement quasiment tous les habitants de notre planète ont pu faire l’expérience du silence, de la solitude, certains ont même pu découvrir leurs richesses et faire l’expérience de ces dimensions si éloignées de la frénésie de notre quotidien. Cette expérience de confinement, douloureuse pour certains, enrichissante pour d’autres, a, semble-t-il, également soulagé la nature qui retrouve un peu ses droits, notamment dans les villes, où le chant des oiseaux est presque devenu le seul bruit que l’on entend !

Ici et là court la rumeur d’une crainte face à l’éventualité d’un retour à la frénésie d’autrefois ; la course au travail, le bruit des moteurs et les gaz d’échappement pour ne pas nommer tous les désagréments de ce passé.

Morgan O’Kane nous aide à relever le défi qui se présente à nous en nous révélant que dans cette frénésie il y a la vie, il y a un quotidien qui a ses richesses et beautés, qui inspire, qui permet le don de soi, qui produit, procure de la joie… Ses musiques parlent de la réalité du quotidien, de toutes ces personnes qui viennent à sa rencontre. Elles sont remplies de visages, et chantées pour des visages rencontrés un instant, dans le métro, dans la rue. Pour Morgan, retrouver la vie dans la ville de New York, c’est aussi retrouver cet espace créatif, de liberté, d’offrande, d’honnêteté, de gratuité, de spontanéité.

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