En 1973, alors amateur, il remporte la même année le Tour d’Italie et le Tour de France, il avait de bonnes jambes ! Puis dans sa carrière professionnelle de 1974 à 1979, il monte deux fois sur le podium du tour d’Italie, une fois second puis troisième, deux tours en Lombardie et de nombreuses autres victoires, plus de 90, mais Giambattista Baronchelli est aussi rappelé pour ces fameuses, ces terribles 12 secondes qui vous font perdre la victoire.
Bernard Hinault et Gianbattista Baronchelli lors des championnats du monde 1980 à Sallanches. Source
Que sont ces 12 secondes, que signifient-elles pour vous, tant d’un point de vue sportif qu’humain ?
Giambattista Baronchelli : Le premier Tour a certainement été comme une victoire parce que derrière moi, il y avait Eddy Merckx surnommé « Il Monstro » qui a concouru plus de 1000 courses et en a gagné pas loin de 500. Pour moi, ce moment était définitivement une victoire mais avec le temps, je n’ai plus été capable d’atteindre l’objectif que je m’étais fixé de gagner au moins un tour d’Italie. Malheureusement, cela ne s’est pas réalisé, c’était donc un échec. J’ai remporté de plus de 90 courses professionnelles qui ne sont pas rien, n’étant pas un pur sprinter j’ai tout de même remporté quelques sprints. Mais au final, ce fut une désillusion pour moi et c’est pourquoi dans le livre, je me définis comme un demi-champion.
Vous vous définissez comme un demi-champion parce que tant de victoires vous ont échappé d’un seul souffle, ces fameuses 12 secondes. Dans votre livre vous décrivez un sprint vers le ciel, vers la sainteté, être un demi-champion vous a-t-il aidé sur votre chemin de la foi ou était-ce un obstacle ?
Giambattista Baronchelli: Je crois qu’en fin de compte, cela m’a aidé. Je me sens aussi comme un demi-champion parce que d’amateur j’ai essayé de devenir un « super », parce qu’un gars de vingt ans qui remporte le Tour de France et le Tour d’Italie s’illusionne rapidement d’être un super. Et donc mes attentes étaient d’atteindre les objectifs les plus importants : gagner les deux autres tours, gagner un tour, gagner le championnat du monde. Alors n’oublions pas que je suis arrivé deuxième au championnat du monde, le plus difficile de l’histoire, derrière le superchampion Bernadino auquel j’ai été le dernier à résister. Je pense que pour ma conversion, la rencontre avec Jésus-Christ tout ceci a été un avantage.
Mais la goutte qui a fait déborder le vase a été l’expérience de mon mariage qui était en train de se briser. Je l’ai vécu comme un échec et je suis entré en pleine dépression, puis il y a eu un moment particulier où mon voyage a commencé. L’éclair est venu tout à coup dans un moment très difficile, celui de la perte de ma mère qui avait presque quatre-vingt-dix ans. Je l’ai vraiment ressenti le matin du 4 avril quand j’ai prévenu ma sœur d’aller dans la chambre de ma mère qui est morte dans son sommeil dans la nuit suivante. Mon frère lui a donné la communion, l’évêque l’avait autorisé à le faire, nous étions presque tous ensemble, nous avons ri, fait des blagues, même si depuis quelques mois elle n’allait pas bien. Bref, on peut dire que c’était presque la fin. Ainsi, le matin du 4 avril, lorsque je me suis précipité dans sa chambre pour lui donner le dernier baiser, j’ai senti une force entrer en moi et à partir de ce moment, ma nouvelle course a commencé. C’est pourquoi j’ai appelé ce livre pédaler vers le ciel : je suis un cycliste donc je dois pédaler malgré les difficultés. J’ai passé des années très difficiles, des épreuves j’en ai passé beaucoup. Et Il a sûrement permis ces épreuves car Il voulait que je me mette à l’œuvre, ce que je fais à 80% car au final les croix, c’est le Seigneur seul qui en porte le plus gros poids.
La mort de votre mère a donc marqué un moment décisif mais avant vous ne croyiez pas, vous n’alliez pas à la messe du dimanche. Quel était vraiment ce changement ?
Giambattista Baronchelli : Disons que j’ai été élevé dans une famille de neuf enfants et qu’avant d’avoir dix ans, je devais aller à l’école puis à mon retour de l’école j’allais travailler dans les champs. La chose la plus belle et la plus importante que mes parents m’ont donné était l’éducation de la foi et hier, je suis allé au cimetière pour remercier encore une fois maman et papa qui m’ont appris la chose la plus importante qu’un parent doit apprendre à ses enfants. Bien sûr, la rencontre est toujours personnelle. Ma mère est restée dévote pendant 58 ans et je me souviens d’elle tous les jours – nous vivions dans les champs à 1 km du village – et tous les jours elle allait à pied à la messe et pour moi ça a été très important. Mais en fin de compte, je pense que c’était aussi une volonté de ma mère de laisser la foi à ses enfants. J’espère que tous les parents ont ce désir. Lorsque l’évidence de la foi s’est manifestée en moi, après quelques mois, j’ai trouvé un document écrit par ma mère dans lequel elle parle de choses essentielles, simples mais importantes.
En effet, dans ce testament spirituel votre mère indique les trois quatre points si importants : la confiance en Dieu, prier, Marie, les sacrements et c’est tout ! Une recette très simple pour le bonheur. La dernière question qui pourrait aussi être la première : pourquoi avez-vous ressenti le besoin d’écrire cette autobiographie ?
Giambattista Baronchelli : Il y a une autre chose que ma mère dit dans ce document c’est de garder unie sa famille et cela m’a frappé d’une manière particulière parce que j’étais dans une situation familiale très difficile à ce moment, je devais suivre la volonté de ma mère. Devant le Saint Sacrement, j’ai vraiment demandé ceci : « Seigneur, si j’ai la plus petite pensée de rompre mon mariage, faites-moi mourir ». Je suis donc toujours en vie, ma famille est unie et je crois que c’est un miracle.
Et pourquoi ce livre ?
Giambattista Baronchelli : Parce que je crois que mon expérience peut aider beaucoup de gens, parce que beaucoup de gens trouveront sûrement cela important et dans les moments difficiles, ils comprendront sûrement que peut-être ils auront aussi la grande grâce de rencontrer Jésus-Christ. Je crois que c’est la plus belle victoire qui puisse arriver à une personne. Je n’ai pas de grandes luttes, malheureusement, cela arrive quand on s’engage sur un certain chemin, parfois quelque chose de vraiment grave nous arrive. Il ne m’est rien arrivé de grave, et je dois donc remercier doublement le Seigneur parce qu’Il m’a rencontré, parce qu’Il est présent et qu’Il m’a appelé tant de fois. Mais la désillusion de ma carrière et le risque de briser ma famille m’ont fait comprendre que je n’étais pas un raté et que j’avais besoin d’un médecin, d’un vrai médecin et le Seigneur m’a pris, il m’a porté sur ses épaules. Et depuis il me porte et naturellement je dois y mettre ma volonté.
Traduit de l’italien par Enrico Salvatore. Video de l’interview