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The Chosen : une excellente surprise

Lorsqu’un ami m’a parlé de cette nouvelle série télévisée sur la vie de Jésus (signée, qui plus est, par un réalisateur protestant, Dallas Jenkins) j’avoue que je ne me suis pas aussitôt enthousiasmé outre mesure. Puis un deuxième ami m’en a parlé, puis un troisième, toujours avec le même enthousiasme, à tel point que j’ai décidé de donner sa chance à The Chosen. Je n’ai pas été déçu.

 

 

Loin des caricatures habituelles, dont beaucoup souffrent à la fois d’une production médiocre et d’une vision caricaturale, mythologisante ou sentimentale des évangiles, The Chosen charme aussitôt par son parti pris réaliste et l’enthousiasme visible des acteurs impliqués dans cette aventure.

Nous rencontrons Marie-Magdeleine et nous entrons dans son drame et sa souffrance, Nicodème, déchiré entre ses obligations sociales et sa quête insatiable de Dieu, Simon (Pierre), bagarreur et tricheur, son épouse Eden qui le porte avec amour et avec peine, son frère André qui est à ses côtés comme sa conscience, Matthieu, le collecteur d’impôt autiste et névrosé… Bref, ce sont des gens normaux, des gens que l’on pourrait avoir rencontrés.

Ils ont une chose en commun: ils ont rencontré cet homme, Jésus, et l’ont reconnu comme le messie. Jésus est joué par Jonathan Roumie (catholique, pour le coup). The Chosen, c’est un regard à la fois intelligent et ému, plein de gratitude, sur l’événement de cette rencontre.

Le dilemme de la représentation de Jésus à l’écran, pour tous ceux qui s’y sont essayés, peut se résumer ainsi : comment manifester sa divinité à travers son humanité ?

Il en a résulté le plus souvent un Jésus dont l’humanité est mise en sourdine pour qu’elle ne fasse pas obstacle, aux yeux du spectateur, à sa divinité. Un Jésus hiératique au regard pénétrant (Zeffirelli), un orateur sévère et enflammé (Passolini)… Bref, un Jésus qui n’est pas 100% humain, mais, disons, 60 ou 50% humain…

Ce n’est pas le cas du Jésus campé par Jonathan Roumie, qui prend le parti de le montrer pleinement humain. Sans jamais tomber dans l’excès ou le kitsch, son Jésus possède au plus haut point la vertu d’eutrapélie, cette belle vertu que les anciens définissaient comme la « disposition à plaisanter, à tenir des propos fins, agréables et spirituels. »

Il est surprenant de voir Jésus qui fait tourner André en bourrique car il ne sait pas danser, qui tempère avec humour la tentation qu’a Pierre de tout organiser, et qui lorsqu’un miracle vient de tourner toute l’attention vers lui, n’hésite pas à détendre l’atmosphère par un mot d’humour. Bref, un Jésus dans lequel le surnaturel n’est pas révélé au détriment du naturel.

On pourra objecter qu’une représentation aussi détaillée de chaque passage de l’Évangile repose nécessairement sur l’invention d’une quantité de détails qui ne sont pas dans les textes, de sorte que la frontière entre réalité et fiction est nécessairement floue.

C’est vrai, mais il n’y a là rien de nouveau. Cela fait des siècles que les peintres représentent les scènes des évangiles avec beaucoup plus de détails que n’en donnent les textes, allant parfois jusqu’à les replacer dans un contexte contemporain. Par ailleurs, Saint Ignace de Loyola encourageait dans ses Exercices cette utilisation de l’imagination pour recréer en soi, de façon précise, circonstanciée, la scène et l’action des évangiles. 

Ce recours à l’imagination nous garde d’une tentation : celle de désincarner la vie du Christ en en faisant une lecture mythologique ou moralisante. The Chosen nous replonge dans la réalité historique des évangiles, qui sont tissés de rencontres réelles avec des gens réels, dans des lieux réels.

Dallas Jenkins ne méprise pas pour autant la reconstitution historique des lieux, des costumes, des coutumes… Le succès grandissant de la série (qui n’est financée par aucun studio mais repose exclusivement sur le crowdfunding) lui a d’ailleurs donné petit à petit les moyens financiers de déployer une reconstitution magnifique et crédible. Par ailleurs (tout protestant qu’il est !), il n’hésite pas à puiser dans les visions d’Anne-Catherine Emmerich les détails nécessaires à sa narration, comme cela est manifeste par exemple dans le magnifique épisode consacré au miracle de Cana (première Saison, épisode 5).

Cependant, une vision archéologique, qui ne chercherait la vérité que dans la reconstitution minutieuse et “exacte” (pour autant qu’une telle chose soit possible) des faits, manquerait la vérité des évangiles. The Chosen montre l’Evangile non seulement comme un fait historique mais comme un événement, c’est-à-dire une rencontre.

C’est la rencontre de Jésus avec la samaritaine, avec le lépreux, avec tel servant de Cana, avec Eden, la femme de Pierre… Par ailleurs, si cet événement est raconté avec tant de vérité et d’émotion, c’est qu’elle est elle-même racontée à l’intérieur d’un événement, c’est-à-dire à partir d’une véritable position de foi.

Je ne suis pas dans les coulisses de la production, mais je n’ai aucun doute que si les acteurs sont à ce point saisis par l’histoire qu’ils racontent, s’ils “l’incarnent” si bien (et non seulement les acteurs mais les écrivains, les costumiers, les compositeurs, etc.) c’est que cette production est elle-même née d’une rencontre et d’une amitié qui les a soudain rendus contemporains de l’événement racontés dans les évangiles : « le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous. »

Une dernière “bonne nouvelle” pour terminer : la série The Chosen (dont le modèle est, vous l’aurez compris, assez unique en son genre) est entièrement et gratuitement disponible sur le site Angel Studios ou sur l’application The Chosen — et les sous-titres sont disponibles dans plus de cent langues !

 

Quelques extraits à vous donner le goût de la série :

 

Après la « pêche miraculeuse » et son appel par Jésus, Pierre va trouver son épouse Eden pour lui annoncer la nouvelle…

 

Jésus quitte les alentours de Capharnaüm et il part pour la Samarie avec ses disciples. C’est là, près du puits de Jacob, qu’il rencontre une femme venue puiser de l’eau à l’heure la plus chaude du jour.

 

2 Commentaires

  1. Paul

    Lorsque vous ouvrez une vidéo sur le site de Angel Studios, vous verrez trois petits points superposés dans le coin en bas à droite de la fenêtre. Lorsque vous cliquez dessus, l’option par défaut « caption off » apparaît — en cliquant à nouveau vous activitez l’option sous-titres et le site vous donne alors l’option des différentes langues.

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