L’exposition de Iris Van Herpen « Sculpting The Senses » vient apporter une touche de beauté et de douceur dans l’actualité, réveillant une nostalgie bienfaisante chez le visiteur. La jeune créatrice néerlandaise crée des robes uniques de haute couture, et s’inspire de l’observation de la nature pour créer des œuvres gracieuses et légères. Le musée des arts décoratifs à Paris accueille ce printemps une exposition de ses robes, jusqu’au 29 Avril.
Née en Juin 1984 à Wamel (Pays-Bas), Iris Van Herpen rêve enfant de devenir danseuse. Mais, alors qu’elle est lycéenne, elle prépare le concours de l’Institut des Arts Artez à Arnhem et se découvre une passion pour la mode. Diplômée à 22 ans elle part à Londres pour se former auprès du créateur de mode Alexander McQueen. Après une année à l’étranger, elle revient aux Pays-Bas et commence à travailler pour la maison de couture Claudy Jongstra. En 2007 elle présente sa première collection haute couture, baptisée Fragile Futurity. Par la suite, elle lance sa propre ligne dont les créations montrent dès le début son intérêt pour d’autres formes d’art. Sa démarche est à la fois de donner une forme matérielle à l’immatériel et d’explorer l’essence de la matière.
Curieuse de tout, c’est à l’origine un émerveillement devant la beauté et le délicat équilibre de la nature qui est une source d’inspiration pour l’artiste. Dans l’exposition, un focus sur le cycle des champignons, les lichens, la vie sous-marine montre une vie cachée magnifique. Mais c’est aussi le domaine de l’architecture, des structures, de la science ou encore de la musique qui l’inspire.
« J’essaie d’être réceptive et sensible à tous les signes de vie autour de moi et de connecter la Couture au monde dans lequel nous vivons ». Ses créations « peuvent être connectées à toutes les couches de la vie. Cela peut être lié à l’architecture, à la science, à la biologie, à la nature, à tout ce qui compte », dit-elle.
Sur le thème de l’eau, Iris Van Herpen a réalisé une collaboration qui lui tenait à cœur depuis longtemps, en 2023, avec l’apnéiste Julie Gautier. Le fait d’être sous l’eau en apesanteur révèle un des aspects particulièrement touchant des créations, qui est le mouvement, la manière dont les détails de la robe bougent avec les mouvements de Julie Gautier et de l’eau, mais aussi dans les défilés extérieurs avec le vent ou la démarche du mannequin qui donne cette impression gracieuse d’adéquation avec le monde extérieur, de force douce aussi pour aller de l’avant aussi dans l’adversité.
Iris a choisi cette collaboration avec l’artiste française Julie Gautier, qu’elle admire depuis longtemps. « Il y a une poésie de la beauté et de la force qui résonne en elle », pour justifier son choix de l’artiste française. « Nous sommes toutes deux des femmes artistes qui évoluent dans des environnements quotidiens très difficiles, et nous sommes convaincues que la créativité peut créer un changement significatif. En fusionnant son langage corporel et mon langage graphique, nous avons senti que nous pouvions soutenir une histoire importante à notre manière – sans mots – et inspirer les autres à continuer, à sensibiliser et à persévérer dans leurs difficultés personnelles.»
La créatrice avant-gardiste a reçu un prix de l’Andam Fashion Awards en 2014. Cela lui a permis de créer des collections de prêt-à-porter durant trois saisons. Mais dit-elle finalement, « je ne sais faire que des œuvres uniques ». Le fait que chaque robe soit unique révèle l’unicité de la personne qui la porte et rejoint une aspiration universelle d’être révélé dans une personnalité loin de l’uniformisation ambiante des pensées, des vêtements, …
La créatrice fait appel à un éventail de matériaux et de techniques, allant du verre soufflé au plexiglas thermoformé, de la découpe laser au Suminagashi, technique japonaise de dessins marbrés à l’encre pour donner vie à ses oeuvres. Son studio de création est une équipe de trente personnes. Bien que la créatrice utilise en partie des techniques assez sophistiqués, chaque élément de la robe doit être patiemment monté à la main et le travail artisanal est tout aussi à l’honneur.
« Beaucoup pensent que nous travaillons dans une sorte de laboratoire, en réalité ce n’est pas du tout le cas ! Bien sûr, nous collaborons avec des institutions scientifiques, mais la majorité de mes pièces est créée seulement avec un fil et une aiguille. »
Le résultat brillant de chaque robe est l’aboutissement d’heures de travail de précision, de réflexion d’une équipe entière, chaque robe nécessite quatre à cinq mois de travail.
Bien sûr, ces robes vont être vendues à prix d’or mais la partie intéressante est le temps et l’attention nécessaire pour une seule robe, une seule personne. Un vrai travail d’artiste en équipe !
Elle fait preuve d’une belle liberté dans la créativité, la réalisation mais aussi une capacité à vivre le présent, attentive et émerveillée de ce qui s’y déroule et pointe vers l’avenir.
« Je pourrais me fixer mes objectifs, mais je n’en ai pas envie. C’était déjà le cas quand j’ai commencé. En adoptant cette approche, j’ai pu emprunter un chemin complètement inattendu. C’est à mes yeux la plus belle manière d’avancer dans sa vie.»