Adeline a vécu quatorze mois de mission au Point-Cœur de Buenos Aires. Dans sa dernière lettre adressée à ses parrains, elle s'émerveille de ce que peut ouvrir dans une personne une amitié fidèle.
Adeline et Alan © Points-Cœur
Avec Alexiana, l’Argentine qui a terminé sa mission le 8 mars comme moi, nous avons été très marquées par la courte visite que nous avons réalisée chez Yoana, notre voisine d’en face. Yoana est une jeune femme, qui a exactement mon âge, mais quatre enfants, et l’aînée a déjà presque dix ans. Elle vit avec son mari et ses enfants dans une seule pièce, et elle a fait un AVC, il y a quelques mois. Son histoire personnelle et familiale est difficile et lourde de peines et de rejets. Lorsque je suis arrivée, Yoana avait une attitude très agressive, elle criait, nous insultait, venait dix fois par jour au Point-Cœur pour nous emprunter des objets… Que dix fois par jour, tous les jours, pendant au moins deux semaines nous étions obligés de réclamer car elle “oubliait” de nous les rendre… Stoïquement, nous supportions ses cris, ses insultes, ses intrusions, ses enfants terribles, et nous l’accueillions avec tendresse, patience et surtout avec le sourire. Nous sommes allés plusieurs fois la voir à l’hôpital lorsqu’elle a fait son AVC. Petit à petit, au cours des mois, nous avons pu constater une vraie évolution dans son comportement. Les objets empruntés nous étaient plus facilement rendus, elle était plus agréable dans les relations, et un peu plus tendre avec ses enfants, sa façon de s’exprimer s’est légèrement modifiée. Ces changements sont presque imperceptibles pour un œil extérieur, mais pour nous, ils sont incroyables, miraculeux. Certes, il y a encore beaucoup de chemin à faire, mais quelle joie ! Et, lors de notre dernière visite chez elle, lorsqu’elle a appris notre prochain départ, Yoana a presque montré des signes d’émotion, elle voulait sortir avec nous avant notre départ et nous emmener voir les carnaval à Buenos Aires Capitale.
Pourquoi vous racontez cela, pourquoi vous racontez ce “rien”, ce changement insignifiant ? Peut-être parce que c’est l’une des plus belles choses que cette mission m’a apprise… Vivre attentif, avoir l’œil ouvert, être éveillé aux “pépites”, à ces “mini-miracles” du quotidien, et les transmettre, les diffuser, les mettre en lumière, et rendre grâce d’en être les témoins… Il s’agit de notre mission de catholiques, il s’agit de lutter avec courage pour convertir notre regard, il s’agit de chercher et de trouver la perle d’espérance au milieu de l’océan de souffrances qui nous entoure.
Adeline P.
Simple et frais: qu’il est bon de se rappeler la valeur d’une amitié dans la vérité!