Le 4 janvier 1960, Albert Camus disparaissait brutalement dans un accident de voiture, laissant inachevé son roman autobiographique, « le premier homme », dont voici un extrait du dernier chapitre :
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« … La vie avait été ainsi dans l’île pauvre du quartier, liée par la nécessité toute nue, au milieu d’une famille infirme et ignorante, avec son jeune sang grondant, un appétit dévorant de la vie, l’intelligence farouche et avide, … cherchant à comprendre, à savoir, à assimiler ce monde qu’il ne connaissait pas, et l’assimilant en effet parce qu’il l’abordait avidement, sans essayer de s’y faufiler, avec bonne volonté mais sans bassesse, et sans jamais manquer finalement d’une certitude tranquille, une assurance oui, puisqu’elle assurait qu’il parviendrait à tout ce qu’il voulait et que rien, jamais, ne lui serait impossible de ce qui est de ce monde et de ce monde seulement, se préparant à se trouver à sa place partout, parce qu’il ne désirait aucune place, mais seulement la joie, les êtres libres, la force et tout ce que la vie a de bon, de mystérieux et qui ne s’achète et ne s’achètera jamais. »[1]
Jacques, qui n’est autre que Camus lui-même, vit au sein d’une famille très pauvre, dans un quartier populaire d’Alger des années 1914-1934. Ce livre est comme un ultime message laissé par l’écrivain ; l’hommage d’un homme à sa mère qui, malgré son handicap et son veuvage, au milieu d’un monde misérable et austère, illumine l’enfant par sa sensibilité et sa présence discrète mais toute maternelle ; l’hommage à son vieil instituteur, Mr Germain, qui, par sa paternité sut lui transmettre sa passion du langage et de l’écriture[2] ; un hommage à toutes les personnes qui ont formé le paysage de cette enfance pauvre sur une terre algérienne déjà tourmentée. Un hymne à la beauté de la vie malgré les circonstances difficiles de la misère, des divisions entre deux peuples, de la guerre… Le philosophe qui, par toute de son œuvre, dénonçait l’absurde[3] de la condition de l’homme dans ce monde laisse place, ici, à celui en qui l’ « appétit dévorant de la vie » l’emporte contre tout.
[1] Le premier homme éditions Gallimard p256
[2] Grâce à cet instituteur qui sut reconnaître certains talents chez le jeune Camus, ce dernier put obtenir, contre toute attente, les bourses nécessaires pour entrer au lycée. Camus lui dédiera son discours de prix Nobel de Littérature en 1957.
[3]« L’absurde naît de cette confrontation entre l’appel humain et le silence déraisonnable du monde » Le mythe de Sisyphe -Albert Camus
je me laisse interpeller par cette phrase d'Albert Camus
L' ABSURBE NAIT DE CETTE CONFRONTATION ENTRE L'APPEL HUMAIN ET LE SILENCE DERAISONNABLE DU MONDE