Deux ans après le tremblement de terre survenu en Haïti le 12 janvier 2010, les dégâts restent considérables et le pays commence à peine à se relever. Mgr Bernardito Auza, Nonce apostolique, revient sur le rôle de l’Eglise et des œuvres catholiques dans l’effort de reconstruction.
L’Eglise haïtienne a-t-elle beaucoup souffert du tremblement de terre de 2010 ?
Les deux institutions les plus touchées par le tremblement de terre sont l’Etat haïtien et l’Eglise catholique, pour la simple raison qu’elles sont les plus grandes du pays. Nous avons, entre autres, perdu deux Cathédrales (celles de Port-au-Prince et de Jacmel), les deux grands séminaires nationaux (Philosophie et Théologie), le Centre inter-instituts de formation religieuse, une quarantaine d’églises paroissiales, ainsi que beaucoup de maisons de formation religieuses et d’écoles. Bien évidemment, la destruction des infrastructures et la dispersion des communautés paroissiales ont modifié la pastorale. Aujourd’hui encore, les célébrations liturgiques se célèbrent sous des structures improvisées et dans des groupes dispersés. Quant aux séminaristes, ils vivent dans des tentes en attendant que de nouveaux séminaires soient prêts à les accueillir.
Que revêt l’importance de la pastorale après un tel drame ?
L’Eglise en Haïti et ses fidèles participent aux joies et aux tristesses, ainsi qu’aux énormes problèmes et défis de la Nation. La pastorale revêt une importance très particulière dans des situations de profond malaise et de désarroi total, comme c’est le cas ici depuis le grand tremblement de terre. « Inventer » une pastorale dans son style et dans son contenu, plus adaptée à une telle situation, est toujours un très grand défi pour l’Eglise. Par ailleurs, les religieux et surtout les religieuses jouent un rôle très important dans l’éducation. Les établissements catholiques rassemblent un tiers de la population estudiantine du pays. Malheureusement, malgré tous les efforts, plus de la moitié des enfants ne fréquent toujours pas l’école.
La priorité est de reconstruire les bâtiments qui ont été détruits ou endommagés afin que l’Eglise haïtienne puisse pleinement reprendre toutes ses activités pastorales et sociales au bénéfice de la population. Elle a ainsi créé sa propre Commission pour la reconstruction, pour s’assurer que les nouvelles structures soient en règle avec les meilleurs critères internationaux, donnant ainsi un exemple au pays d’une nouvelle manière de faire les choses. Mais c’est une Eglise matériellement pauvre qui a besoin de la solidarité de l’Eglise universelle.
Haïti est souvent présenté comme un pays « sous perfusion », dépendant d’une multitude d’ONG. Que peuvent apporter les œuvres d’Eglise dans un tel contexte ?
On parle d’Haïti comme une « République des ONG». Selon la Banque Mondiale, c’est le pays avec la plus haute concentration des ONG par rapport à sa population. Elles sont plus de 10 000 ! Cela veut dire que l’Etat n’a pas encore la capacité pour satisfaire les besoins les plus fondamentaux de sa population. Mais la question est moins de connaitre le nombre d’ONG présentes en Haïti que de savoir comment elles dépensent leurs ressources et comment elles s’insèrent dans le grand projet d’ensemble, pour assurer le meilleur impact possible pour les haïtiens en grande néces