ITB Berlin, le plus grand salon du tourisme mondial, a fermé ses portes dimanche soir. Rencontre avec Christopher Kelly, venu y présenter la Maison du Visiteur de Vézelay. Grâce à un diaporama et une maquette, le visiteur peut y trouver une introduction à la visite de la Basilique mais aussi, appréhender de manière didactique, le jeu qui lie de manière exceptionnelle pierres et lumière et qui atteint son paroxysme aux solstices d’été et d’hiver.
Au moment du solstice d’été, le soleil forme un chemin de lumière au centre de la nef,
neuf taches qui vont du narthex jusqu’au chœur
Comment est née la « Maison du Visiteur » ?
Cette maison a été fondée par une famille en mémoire de leur oncle, le Père Doncoeur, qui a vécu à Vézelay après la guerre. Dans les années 70, M. Doncoeur a acheté une maison dans laquelle il a créé une association avec des amis, « Présence à Vézelay ». Leur but était d’accueillir chaque visiteur comme un pèlerin en marche qui grandirait à travers l’expérience de l’architecture de Vézelay.
En vieillissant, les membres de l’association ont fait appel à des membres du réseau « Et si la beauté pouvait sauver le monde ». Ces derniers sont arrivés à Vézelay en 1983. C'est un architecte qui s’y est d’abord installé. Très vite, il a commencé à faire visiter la basilique. Chaque visite se prolongeait, soit dans un bar, soit sur le parvis. Les visiteurs avaient, en effet, besoin d’approfondir leur compréhension de toute la symbolique contenue dans l’architecture, notamment, les jeux de lumière. C’est ainsi que l'on a reconnu la nécessité de créer un lieu pour préparer les visiteurs, et ainsi permettre aux pierres de parler au cœur.
Quelles sont les attentes des personnes qui viennent vous voir ?
Certaines personnes ont entendu parler de la Maison du Visiteur et viennent nous voir spécifiquement. Mais il y a aussi beaucoup de personnes qui passent dans la rue et entrent par curiosité. Ce sont ces personnes-là que j’ai le plus de plaisir à recevoir !
Nous avons aussi fait un choix explicite de ne pas être tape à l’œil : ce n’est pas une opération commerciale. C’est une maison que l’on a voulu inscrite dans le village, où le visiteur peut être réellement accueilli.
Nous avons aussi fait un choix explicite de ne pas être tape à l’œil : ce n’est pas une opération commerciale. C’est une maison que l’on a voulu inscrite dans le village, où le visiteur peut être réellement accueilli.
La Maison du Visiteur est un « narthex avant le narthex »[1]. Notre approche est scénographique, avec le désir que le visiteur se sente comme un acteur sur scène et que se crée une communion entre le lieu et la personne. Nous ne sommes pas là pour débiter une somme d’informations, aussi intéressantes qu’elles puissent être, mais avant tout, pour permettre que les personnes puissent, à travers ce qui leur est donné, découvrir par elles-mêmes que l’architecture et la beauté du lieu les concernent personnellement.
Je suis convaincu que notre approche aide à approfondir la visite. Les gens peuvent ainsi goûter à quelque chose de plus grand qu’eux-mêmes, et plus grand que simplement la pierre, ou même la sculpture. Il y a quelque chose qui va forer leur propre intériorité.
Vous souvenez-vous d’une personne en particulier ?
Il s’opère souvent des choses dans les cœurs, et nous ne sommes là que pour préparer le terrain, labourer, et d’autres ensuite font la semence, cela ne nous appartient pas. Il nous arrive aussi, de manière plus personnelle avec l’un ou l’autre, de proposer une rencontre avec un prêtre, car il y en a toujours qui sont dans l’église pour accueillir les visiteurs.
Je me souviens en particulier d’un jeune anglais qui nous a écrit pour nous dire qu’il avait découvert Dieu dans le cadre d’une visite, lors d’un voyage avec son école. On peut d’ailleurs dire que les scolaires sont peut-être ceux qui reçoivent le plus. Le Moyen Age est au programme dans le cursus de 5ème, ils ne viennent donc pas dans une démarche de foi. Mais leur passage par Vézelay leur donne de découvrir un autre sens de l’architecture.
Revenons à votre présence à Berlin. Quelles sont les attentes des gens que vous avez pu rencontrer au salon du tourisme ? Comment aborder le côté spirituel de Vézelay dans une ambiance professionnelle ?
Il y a une demande croissante de visites qui ne sont pas que touristiques, qui ont une ouverture culturelle. Et je dirais que cette ouverture culturelle est en réalité une quête spirituelle. Les tour opérateurs sont aujourd’hui à l’affût. Mais je n’ai pas eu besoin de parler de Dieu sur notre stand pour que les gens perçoivent qu’il y a quelque chose d’autre qui est proposé.
Sur un salon, il y a toujours des rencontres inattendues, non préparées. Je pense qu’il suffit d’être là : on explique mais on est surtout présent gratuitement pour que la grâce du lieu puisse passer à la personne qui vient nous voir.
Et puis on estime aujourd’hui à 20 millions le nombre de touristes étrangers qui viennent en France pour des raisons explicitement spirituelles. L’Etat a donc été obligé d’admettre ce volet « tourisme et spiritualité » au sein même de la promotion de la France à travers Atout France. C’est dans ce cadre que nous étions présents au salon ITB.
Pour plus d’informations : www.vezelay- visiteur.com
[1] Mot utilisé par l’évêque de Sens-Auxerre, Mgr Gérard Defoix