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« La palette de Maddy », interview de Myriam de Dinechin

A un coin de rue du 7ème à Paris, et encore pour quelques jours, se trouvent exposées des toiles pleines de tendresse, en antidote à la grisaille médiatique. Myriam de Dinechin – la palette de Maddy – est artiste peintre, elle nous offre des œuvres de sa contemplation de sous-bois, de bords de mer, des scènes familiales… Cette mère de famille, et grand-mère, peint depuis des années. Elle nous partage, dans cette exposition, ce qui l’habite et qu’elle transmet en couleurs et coups de pinceau dans ses sujets réalistes et variés.

 

 

Vous êtes artiste peintre par passion, depuis quand votre passion est née ? Comment avez-vous découvert ce talent ?

J’ai toujours aimé dessiner, surtout en plein air ; Petite, j’habitais la campagne, dans les Ardennes, et mon premier souvenir marquant dans ce domaine est quand, vers l’âge de 10 ans, ma maîtresse d’école a emmené toute la classe au bord d’une rivière, et nous a dit « Dessiner ce que vous voyez, ce que vous voulez… ! » . Je garde de ce moment un souvenir émerveillé, avec de simples crayons de couleurs et du papier ; et je pense aujourd’hui que c’est elle qui, dès l’école primaire, m’a insufflé cette envie de peindre.

Ai-je un « talent » ou un « don » ? je ne sais pas. Mais cette envie de dessiner, d’apprendre, de peindre, de progresser, ne m’a jamais quittée. Si j’ai reçu un don, alors je crois qu’il se définirait ainsi : Aimer le dessin et la peinture avec la capacité de travailler beaucoup, longtemps, parfois très longtemps, sans que cela soit difficile ou pénible, au contraire !..

Avez-vous rencontré des personnes qui vous ont enseigné ? Quelles rencontres vous ont marquées ? (ce peut être aussi toute la question du travail d’apprentissage! Les heures d’essai, les ratés, et comment cela instruit ?)

J’avais beau avoir quelques bonnes notes en dessin et crayonner avec plaisir les couleurs de mes cartes de géographie, ni ma scolarité, ni mes études n’ont été orientées vers les arts graphiques. J’ai notamment beaucoup regretté qu’après mon bac (Mai 68 !), mes parents aient refusé que je choisisse l’École des Beaux-Arts ! Je n’avais alors que 17 ans, et compte tenu de la pagaille et du contexte social, sans doute ont-ils eu raison… Je me suis rattrapée en prenant des cours du soir, d’abord dans les Ateliers de la Ville de Paris à Montparnasse, puis après un déménagement, à l’École des Beaux-Arts de Nancy, qui par chance était en bas de notre rue ! La Providence fait bien les choses. Je me souviens là-bas de grands ateliers bourrés d’élèves très silencieux et de professeurs très exigeants, autour des « modèles vivants » ; c’était très nouveau et formateur pour moi. Un petit atelier tout en haut de notre maison me permettait de peindre pendant les heures scolaires de nos 3 enfants. A 31 ans, après la naissance du 4ème, les circonstances m’ont amenée à laisser fusains et pinceaux pendant près de 20 ans…

 

Pêcheur au calme

 

Quand j’ai décidé de reprendre vraiment cours et travail personnel, l’envie de m’y remettre était forte, et « le p’tit monde de la peinture » a vite envahi mon agenda de façon virale ! Un vrai bonheur, bien qu’avec des hauts et des bas quant à la réussite. En aquarelle, par exemple, mes efforts me paraissaient vraiment vains ; quelle école de patience et de ténacité ! j’en ai déchiré beaucoup ! Après 3 années, je me suis plutôt concentrée sur la peinture à l’huile, dont le travail progressif me convenait mieux.

Deux enseignantes m’ont beaucoup apporté :
– à Rambouillet, Corinne FILHOL : une vraie « coloriste », non seulement créative et passionnée d’art, mais particulièrement experte et douée pour la couleur. Je lui dois beaucoup depuis une quinzaine d’années, et je continue aujourd’hui de participer à ses stages de peinture.
– à Dourdan, Maryse GAREL, qui m’a fait découvrir une peinture plus spontanée, notamment en plein air, « sur le motif », me permettant une interprétation personnelle plus proche du réel…

« Il faut au moins 10 ans pour former un bon peintre », disait-on déjà autrefois ; c’est toujours vrai, je pense , mais ensuite il faut OSER se montrer, s’exposer au public, avoir confiance en soi… Et là, se joue bien autre chose ! J’ai eu du mal à faire ce pas, et c’est bien grâce à mes professeurs et à mon entourage que j’ai avancé dans ce sens. Ces années m’ont appris que paradoxalement, il faut beaucoup d’humilité pour prendre le risque, un peu de succès pour prendre confiance, mais pas trop pour maintenir l’orgueil à distance… Une école de vie, en somme.

 

Drôle de balançoire

 

Quels sont les peintres que vous aimez, que vous prenez pour modèle, qui vous inspirent ?

Ils sont nombreux ! Je m’inspire de ceux qui peignent la lumière, l’eau, la nature, les enfants … En tête de liste, je dirais Sorolla pour ses couleurs et scènes de vie en bord de mer, Monet pour la nature et les reflets, Boudin pour ses ciels extraordinaires, Berthe Morisot dont j’aimerais acquérir la touche nuancée si légère, Cézanne et Degas pour leur talent de compositions, mais aussi Rembrandt pour ses portraits si vivants ; ou par exemple, plus proche de notre époque : Arcabas pour ses couleurs et son art sacré, Ans Debije, une hollandaise qui peint les objets de tous les jours dans une lumière si brillante et gaie, et je regarde régulièrement sur Instagram des peintres actuels comme Frédéric Laboria ou Stéphane Ruais, peintres « sur le motif » de paysages magnifiques…

 

Baignade surveillée

 

Vous aimez peindre les paysages, les scènes de la vie quotidienne, la nature. Comment nourrissez-vous cette contemplation ?

Contemplation, je me rends compte au fil du temps que c’est le mot clef pour moi ; Dans un premier temps, peindre est un art très solitaire… regarder, observer, et contempler, justement, parce que c’est en étant touchée par la beauté d’un moment ou d’un lieu que nait mon envie de peindre ! Et plus je peins, plus j’apprends à voir, au-delà du banal, ce qui est vraiment est beau ; les gestes d’un enfant qui joue, une lumière du soir en plaine, un contre-jour inattendu sur des fleurs, l’immensité d’un ciel, la pureté d’une neige vierge, … c’est une quête de lumière et de beauté, un court moment que j’ai envie de prolonger avec mes pinceaux, pour le partager ensuite avec d’autres… Dans cette contemplation se glisse inévitablement, compte tenu de ma foi, une dimension spirituelle, comme une louange, un Merci Seigneur ! Et par opposition au monde sombre et violent que nous propose sans cesse les médias, j’ai le sentiment que mes peintures sont une sorte d’antidote.

 

Migrateurs

 

Que souhaitez-vous transmettre à ceux qui sont devant vos tableaux ? Avez-vous des toiles particulièrement chères ?

Partage, c’est le second mot de la peinture : après la contemplation, le partage. L’autre jour, en visitant mon exposition, une dame inconnue fait très attentivement le tour de mes toiles, et vient me dire : « J’écoutais Beethoven ce matin… et je dirais de vos tableaux qu’ils sont un hymne à la joie ! » Cette phrase me va droit au cœur ! ; voilà ce que j’ai envie de partager avec les visiteurs, un peu d’apaisement, de respiration, de joie, … J’aimerais amener leur regard vers les « cadeaux quotidiens » de la vie ! Depuis que j’ai traversé deux cancers il y a quelques années, je me dis tous les matins : « Chaque jour est un cadeau » ; je souhaite tellement que mes peintures le disent aussi !

 

Neige vierge

 

Mes sujets sont simples et sans prétention, et la plupart de mes toiles évoquent des souvenirs, des moments vécus, des chemins parcourus, des lieux aimés, seule ou en famille. Parmi tous mes tableaux, j’avoue que je suis plus particulièrement attachée aux scènes d’enfants ; elles sont inspirées de mes petits-enfants et des moments que nous avons passés ensemble à l’occasion de vacances.
Mes tableaux racontent un peu ma vie, mais ce que je trouve magique c’est qu’à travers mes couleurs et mes évocations, les visiteurs peuvent aussi reconnaitre un peu de leur propre histoire…

Alors, Gloire à Dieu et vive la peinture !

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