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Le plus grand pèlerinage au monde

d'Aymeric Béranger   29 janvier 2013
Temps de lecture 3 mn

Le Kumbh Mela vient de commencer il y a quelques jours a Allahabad, au bord du Gange, en Inde. C’est le plus grand rassemblement religieux au monde avec cent millions de pèlerins attendus cette année !!


CC BY Edson Walker from Curitiba, Brazil

L’Inde est toujours le pays des extrêmes, de la démesure, une terre où tout est sacré, qui étonne et fascine. Le Kumbh Mela a lieu tous les trois ans à tour de rôle dans quatre lieux sacrés : Prayag (nom hindou de Allahabad), Haridwar, Ujjain et Nashik, où selon la mythologie hindoue, le dieu Vishnou aurait laissé tomber une goutte d’Amrita, le nectar d’immortalité. La fête dure environ quarante jours et les pèlerins  vont en masse se plonger dans les eaux sacrées du fleuve pour être purifiés de leurs fautes. Cette année, c’est à Prayag, au confluent du Gange, de la Yamuna et du fleuve mythique Sarasvati qu’a lieu le pèlerinage.

Les premiers à se plonger dans le fleuve sont les milliers de sadhus, ces moines errants hindous, vêtus de leur robe couleur safran ou bien le corps nu recouvert de cendres, signe d’un dépouillement total. Puis les multitudes suivent, venues de tous les recoins du sous-continent, âmes de pèlerins renonçant elles aussi à tout confort pour recevoir la grâce du bain purificateur. Sur les bords du Gange, tous s’adonnent aussi bien aux discussions religieuses qu’aux chants dévotionnels, vont écouter les enseignements des gourous ou faire des offrandes de nourriture aux sadhus et aux plus pauvres.

Qu’est-ce qui peut bien pousser cent millions d’hommes et de femmes hindous vers « la ville d’Allah » (Allahabad), à braver des journées entières de voyage éprouvant, des conditions dures et rudimentaires dans le froid de l’hiver pour prendre un bain glacé dans l’un des fleuves les plus pollués au monde ?

A l’heure où l’Inde vit un développement économique historique, où des sociétés comme Tata ou Mittal rachètent des fleurons de l’industrie occidentale comme Jaguar-Land Rover ou Arcelor ; à l’heure, où des millions d’Indiens se mettent à porter des jeans et acheter des voitures par milliers, le peuple indien montre encore au monde son profond sens du divin, sa quête de salut, son attachement à des traditions ancestrales (le Kumbh Mela était déjà relaté dans les chroniques d’un voyageur chinois du 7ème siècle). Les grands fleuves en Inde ont toujours été vénérés comme des manifestations de la grâce divine qui bénit et purifie le croyant, et particulièrement le Gange, qui sort pur et glacé des Himalayas, la « demeure des dieux », pour traverser majestueusement la plaine vers l’Est et se jeter dans la Baie du Bengale, emportant avec lui tous les péchés du peuple.

Devant un tel spectacle, l’écrivain américain Marc Twain écrivait en 1895 : « C’est fantastique, le pouvoir d’une telle foi, qui peut pousser des multitudes de personnes âgées, faibles, jeunes et fragiles à entreprendre sans hésitation ni plainte de tels voyages incroyables et endurer la misère qui s’ensuit sans rechigner. Cela est vécu dans l’amour ou cela est vécu dans la crainte, je ne puis le dire. Mais peu importe le motif, l’acte qui en résulte est au-delà de toute imagination, merveilleux pour nous autres, Blancs frileux. » En effet comment ne pas s’émerveiller devant cette foi si grande et si simple de nos frères indiens, qui contemplent en tout la présence et la miséricorde de Dieu, et reconnaissent en Lui la source, le sens et la fin dernière de leur vie et de tout ce qui est ?

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