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Un photographe à l’école de Morandi

Otilio Moralejo est photographe. Saisi par les œuvres de Giorgio Morandi, il a cherché à son tour, dans son travail photographique, à atteindre cette simplicité qui caractérise l'œuvre du peintre italien et invite à la contemplation. L'exposition Morandianas est le fruit de ce travail.

Otilio a consacré sa dernière exposition de photos à l’artiste italien Giorgio Morandi, un des peintres les plus singuliers et remarqués du XXe siècle. Un hommage ? Pas exactement. « Je n’ai pas voulu copier les œuvres de Morandi ou faire des reproductions photographiques de ses œuvres mais dire combien elles m’ont saisi, et notamment par leur simplicité. Je veux montrer que la photographie peut aussi saisir cette simplicité. » C’est bien le cas de ces photos qui cherchent à pénétrer la contemplation du peintre de Bologne et ainsi révéler le mystère de ces objets si ordinaires. 

« "Au moment, disait Morandi, où les pots et les bouteilles s’affirment devant nos yeux, leur forme cède vaincue par une atmosphère qui la décompose". Le travail photographique que j’affronte est un essai de capter le lyrisme et le mysticisme qu’obtint l’italien dans ses toiles avec le minimum de moyens. Une paire de boîtes ou de bouteilles, une cruche, étaient suffisantes pour créer des espaces et des formes gracieuses. Je me rappelle qu’à 20 ans, je restais longtemps en extase devant les œuvres de Morandi qui sont dans la collection du Musée des Beaux-Arts d’Argentine, cherchant à percer où était la clé de ce mystère. Trente années plus tard, je peignais la superficie de plusieurs objets qui avaient des formes ressemblantes à celles qu’utilisait l’artiste, en les empâtant, pour les sortir de leur formalité. Puis je les photographiais avec cette illumination directe et réitérée qu’il utilisait. Plus tard dans mes recherches, je sus que Giorgio faisait la même chose avec les objets, il les peignait avant de les poser sur sa petite table pour les illuminer et les peindre sur la toile. »

Interpellé par ce travail routinier et répétitif de Morandi qui a peint pendant 50 ans les mêmes bouteilles, les mêmes pots, Otilio a d’abord reproduit les objets qu’on trouve chez l’artiste peintre et les a ensuite mis en scène, en jouant avec la lumière. « Je ne peux pas, avec la seule lumière extérieure, retrouver les jeux d’ombres et les textures avec lesquels travaille la peinture. Mais comme Giorgio, je crée des espaces différents en mettant théâtralement en scène ces objets. »

 

Lors de l’exposition, nommée Morandianas, Otilio avait exposé dans la salle quelques-uns de ces objets. Ils étaient là comme pour montrer qu’ils existaient, qu’ils avaient habité l’œil du photographe, et nous invitaient maintenant à nous laisser saisir. « Ce qui anime tout art, c’est l’amour, que ce soit des choses, d’une idée, d’une personne. »

Un homme humble qui se laisse bousculer par cette nouvelle aventure avec Morandi, « Normalement, après avoir fait une exposition, je passe à autre chose mais avec celle-là je veux continuer à la présenter… », et cela sera certainement à l’Université de Bologne à Buenos Aires.

Marie Debacque et Edouard de Grivel

Morandianas, deuxième invitation

 

Morandianas

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