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Dossier « Charisme » (5) : La maturité ecclésiale des Mouvements

Le 29 septembre 2007 était organisé dans le diocèse de Fréjus-Toulon une rencontre des communautés nouvelles et mouvements ecclésiaux. Guzmán Carriquiry Lecour, à l’époque sous-secrétaire au Conseil pontifical pour les Laïcs, fit une intervention particulièrement riche sur la vocation, la spécificité et la mission des mouvements dans l’Eglise et dans le monde. 

Le professeur Gúzman Carraquiry Lecour aujourd'hui vice président de la Commission Pontificale pour l'Amérique Latine
 

« La question fondamentale dans cette société post-chrétienne est de savoir comment il est possible de redécouvrir la foi, de devenir chrétien. Ce n’est ni l’héritage culturel, ni la simple diction de la doctrine chrétienne qui peut établir un rapport avec un homme pour lequel le christianisme est un passé qui ne le concerne pas. C’est quelque chose qui vient avant. Ce quelque chose qui vient avant, saint Augustin le nomme delectatio et dilectio, à savoir : l’attrait aimant de la grâce. Découvrir une correspondance entre l’événement chrétien et les exigences du cœur est une pure surprise, une expérience de gratuité. »

Les 5 critères d'ecclésialité des Mouvements 

S’appuyant sur l'Exhortation apostolique post-synodale Christifideles laici, de Jean Paul II, le professeur Carriquiry, rapelle les cinq critères d'écclésialité qui informent le chemin de maturation des Mouvements et des Communautés Nouvelles :  

  1. « Tout d’abord une rencontre nouvelle avec Jésus-Christ pour se mettre à sa suite, événement qui détermine toute l’existence humaine, à la lumière de la vocation universelle à la sainteté ;
  2. un sens d’appartenance et d’adhésion à l’Eglise, mystère de communion, dont l’unité se réalise dans une pluralité de formes communautaires ;
  3. une éducation à la foi qui suit des méthodes et des chemins où s’incarne la fidélité à la grande tradition catholique ;
  4. un élan missionnaire, reconnaissant et joyeux, visant à communiquer partout le don de la rencontre avec le Christ dans toutes les situations, milieux et cultures ;
  5.  une étreinte de charité, de solidarité et de service à la rencontre de tous les besoins humains, spécialement des plus pauvres et de ceux qui souffrent. »

Une rencontre qui change la vie 

En référence à la célèbre phrase introductive de l’encyclique Deus Caritas Est[1], l’expérience chrétienne met en mouvement, d’où le nom donné à ces réalités ecclésiales :

« L’adhésion au charisme est une vraie rencontre avec le Seigneur si elle change la vie de ceux qui appartiennent à la compagnie que suscite le même charisme, si elle transforme toutes les dimensions de l’existence ! Et ceci, non pas tant par un effort de cohérence morale, mais plutôt en reconnaissant profondément ses propres limites, ses propres misères, la disproportion entre le don et le néant que nous sommes en raison de la blessure originelle et profonde du péché. Cette transformation se réalise en me confiant avant tout à la grâce d’une rencontre toujours renouvelée avec Jésus-Christ, force de ma faiblesse, qui, malgré mes résistances et mes chutes, change mon rapport avec ma femme et mes enfants, mes affections et mes amitiés, la façon avec laquelle je me comporte au travail ou à l’école, l’usage de mon temps libre et de l’argent, mon regard sur toute la réalité jusqu’à mes moindres gestes quotidiens. Et je peux vérifier avec gratitude ce changement parce qu’il rend ma vie plus humaine, plus remplie de charité, de positivité pour affronter toute réalité, plus joyeuse et avec plus de goût. »

Une rencontre qui conduit aux sacrements

Les charismes que donne le Saint-Esprit ne viennent pas se substituer aux dons que le Christ nous a obtenu par son sacrifice, au contraire ils y conduisent : 

« Un mouvement ou une communauté est, certes, un petit signe qui renvoie à une réalité infiniment plus grande. La rencontre avec le Seigneur, suscitée par l’expérience d’adhésion à un mouvement ou à une communauté, est une vraie rencontre si elle conduit à redécouvrir le pain de Sa Parole et de l’Eucharistie – Sa présence réelle dans la célébration eucharistique –, à se reconnaître membres de Son Corps qui est l’Eglise, à adorer sa présence – le fait que là où deux ou trois sont réunis en Son Nom, Il est présent –, à rechercher Son visage dans les frères et, en particulier, dans les pauvres et en ceux qui souffrent. »

Une éducation de la foi ancrée dans la tradition

Les charismes offrent une incomparable « porte de la foi » pour reprendre l’expression du pape Benoit XVI à l’occasion de l’ouverture de l’année de la foi[2].

« Une adhésion mûre de la foi comme horizon de toute la vie, qui détermine toute l’existence, tend à devenir un critère de jugement de tous les faits et de toutes les situations, des problèmes et des défis de la vie personnelle et collective. Je dis "tend", car il faut que notre sensibilité, notre affection et notre intelligence grandissent pour créer une "mens catholica" face à tout. »

« Comment maintenir vivante la foi comme événement dans la personne ? Comment grandir dans la « nouveauté de vie » de la "créature nouvelle", régénérée ontologiquement par la grâce baptismale ? Comment vivre la liberté des enfants de Dieu au milieu du monde, comme signe de contradiction et d’espérance ? Comment le faire sans un enracinement dans une appartenance vigoureuse à une communauté chrétienne concrète, vivante, qui soit une demeure pour la personne, qui embrasse toute sa vie, qui soutienne et alimente la mémoire du Christ dans toutes ses dimensions, dans tous les instants et gestes de son existence ? De ce point de vue aussi les mouvements et les communautés nouvelles se révèlent être "une réponse providentielle". »

L'amitié comme critère évangélique

Et Carriquiry de poursuivre en soulignant l’importance de l’amitié :

« L’ "affinité spirituelle" suscitée par la sequela Christi, grâce au charisme auquel les membres d’un même mouvement ou association participent, se réalise par des liens profonds d’amitié, en compagnies vocationnelles et éducatives, dans des formes communautaires intenses et toujours nouvelles. Les mouvements sont un "signe de liberté de formes dans lesquelles se réalise l’unique Eglise" – comme le disait Jean Paul II[3] –, son mystère de communion au milieu des hommes. »

 

Consulter l’intervention de Guzmán Carriquiry Lecour sur le site du diocèse de Fréjus-Toulon.

 

Dossier Charisme : 

Article 1 : Qu'est-ce qu'un charisme ?
Article 2 : Le charisme est-il une nouveauté ? 
Article 3 : Pentecôte 2006
Article 4 : Une histoire des Mouvements
Article 5 : La maturité ecclésiale des Mouvements
Article 6 : La Congrégation pour la Doctrine de la Foi se prononce sur les Mouvements
Article 7 : Le lieu théologique des Mouvements 
Article 8 : L'appel pressant du pape Benoît XVI aux évêques
 

 


[1] À l’origine du fait d’être chrétien, il n’y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne, qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive. Deus Caritas Est n°1

[2] Benoît XV, Motu Proprio Porta Fidei, 11/10/2011

[3] Jean Paul II, Audiance générale du 25/11/1998 

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