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Chant grégorien au Thoronet : Alleluia de Noël

Un jour saint nous a éclairés, une grande lumière est descendue sur la terre.

Dies sanctificatus illuxit nobis, venite gentes et adorate Dominum ;
quia hodie decendit lux magna super terram. Alleluia.

Un jour saint nous a éclairés, venez, peuples et adorez le Seigneur
car en ce jour est descendue une grande lumière sur toute la terre. Alleluia.

 

Le paradoxe de ce chant à la fois grave (2e mode) et radieux annonce celui, encore plus mystérieux, de cette grande lumière qui jaillit au creux de l'hiver. Noël, c'est le minuit de l'année. Le soleil est au plus bas de sa course dans le ciel, le froid enserre toutes choses. Mais soudain, la lumière luit dans les ténèbres (Jean 1, 5).

Noël, c'est l'infiniment grand qui, telle une étoile, traverse toute la création jusqu'aux confins de l'Univers, pour se faire homme. Et il ne se fait pas seulement homme, mais nourrisson, petit bébé. Personne n'avait prévu pareille chose ; peu y ont cru. Les premiers à y avoir cru sont de simples bergers. Je te loue, ô Père, d'avoir caché cela aux sages et aux savants et de l'avoir révélé aux tout petits (Luc 10, 21). Même des siècles de christianisme plus tard, on évite le sujet, on se contente de faire la fête, on achète et on consomme, on s'éblouit de mille lumières, on s'offre des cadeaux, mais on oublie souvent que le grand cadeau qui est à l'origine de toute cette ébullition, c'est le Fils de Dieu donné aux hommes, au monde.

Venez, peuples, adorez le Seigneur ! L'appel sonne comme une trompe de chasse, dont le monde entier résonne encore[1]. La pédagogie divine est unique, imprévisible. Elle nous convie devant le trône du Créateur de toutes choses. Mais qu'y trouve-t-on ? Un petit enfant couché sur de la paille… Nous attendions Dieu sur les hauteurs, le voilà couché dans une mangeoire à bêtes, infiniment vulnérable. Dieu vient dans le monde incognito, dépendant de tous pour tout, afin de nous réapprendre à regarder comme un enfant.

Mais justement, qu'est-ce qu'un regard d'enfant ? Comment un enfant voit-il le monde ? Avec l'innocence de celui qui ne calcule pas et qui fait confiance. C'est pourquoi, lorsqu'on regarde un enfant dans les yeux, on ne peut s'empêcher de ressentir au fond de soi l'appel à redevenir tout neuf, comme si nos fautes se trouvaient soudain pulvérisées par ce simple regard ! Si vous ne redevenez pas comme de petits enfants, vous n'entrerez pas dans le Royaume des cieux (Matthieu 18, 2). L'innocence est la trace merveilleuse de ce que connurent nos premiers parents au paradis terrestre ; nous en rêvons parfois et nous la trouvons fort belle… chez les autres.

C'est cela la grande lumière de Noël qui est descendue sur terre, celle qui révèle toutes choses en Dieu, dans leur racine éternelle, celle qui fait regarder avec les yeux mêmes de Dieu. Et là, dans cette prunelle divine, ce qui paraissait petit peut se révéler immense, infini.

Oui, un jour saint nous a illuminés. Alleluia.

Joyeux Noël !


[1] La résonance exceptionnelle du Thoronet en est le parfait symbole.

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