Home > Société > 25 ans à bâtir la dignité à travers le logement

25 ans à bâtir la dignité à travers le logement

d'Anne-Sophie Rotsaert   27 mai 2013
Temps de lecture 3 mn

L'accès à un logement de qualité et à un loyer abordable peut être un vrai parcours du combattant à Bruxelles ainsi que dans de nombreuses grandes villes d'Europe. C'est à l'amélioration de ces conditions que s'attèle l'association bruxelloise « Renovassistance » qui fête ses 25 ans de création ce lundi 27 mai 2013. Rencontre et interview de Bernard Cassiers, ancien plombier-électricien, entrepreneur-retraité et membre actif de l'association.


© Quendin Dor

Pourquoi le logement vous intéresse-t-il ?

Je suis père de famille et le rôle de parent est essentiellement de pouvoir donner aux enfants un cadre où les élever convenablement, cadre dont le logement fait partie intégrante. J'ai été frappé d'entendre une personne qui avait beaucoup déménagé dire qu'elle ne se sentait de nulle part. Cela me semble important d'avoir un lieu, des racines.

Par ailleurs, je suis moi-même bricoleur, j'aime travailler avec mes mains. Donc dès le départ, je voulais mettre ma touche personnelle dans mon logement. La première maison que nous avons achetée avec mon épouse était en mauvais état et j'ai travaillé énormément dedans, mes enfants l'ont vue évoluer, se construire.

Ensuite, le logement ce n'est pas seulement des briques mais c'est aussi le quartier dans lequel on vit ! Après avoir vécu en Afrique au début de notre mariage, nous avons fait le choix de venir nous installer dans un quartier populaire de Bruxelles. Cette décision était motivée par le désir, non pas d'abord de faire des choses pour les gens, mais de vivre avec eux. J'ai beau lire les journaux, si je ne suis pas plongé dans la réalité, j'ai plus de difficulté à la comprendre. Le fait de vivre dans un quartier où beaucoup de gens vivent avec moins de moyens que moi m'aide à mieux les comprendre.

Dans mes choix de vie, le logement et l'entourage ont toujours été importants. Jusque dans mon parcours professionnel : j'ai été plombier-électricien pendant 15 ans puis entrepreneur général encore plusieurs années. Comme plombier-électricien j'ai fait énormément de dépannages et j'ai vu des logements en mauvais état. J'ai rencontré beaucoup de gens par l'intérieur de leur habitat et cela m'a ouvert les yeux sur la problématique du logement. Les gens avaient parfois très peu de moyens pour remettre en état, alors j’étais souvent obligé de faire des interventions pour rafistoler.

Quelles sont les initiatives auxquelles vous participez ?

C'est en réfléchissant et en parlant avec d'autres que j'ai été amené à participer à la création d'une association qui s'appelle « Renovassistance ». Au départ, c'est la réunion de personnes aux compétences diverses qui voulaient agir ensemble : un ingénieur, un architecte, un juriste, un financier… L'idée de l'association est de prendre en charge le financement et l’exécution de la rénovation de vielles maisons, souvent des taudis, en bénéficiant de primes de la Région bruxelloises et de mettre ces logements en location à des loyers modérés pour les gens qui en ont besoin. Le 1er projet était de rénover 3 maisons appartenant à la Ville de Bruxelles. C'est à ce moment-là que j'ai fait un tournant professionnel en créant une entreprise de construction générale afin de réaliser les travaux. J'ai donc été amené à encadrer différents corps de métier, à coordonner. Au départ je n'avais aucune envie de devenir patron, d'engager et de gérer des ouvriers, mais j'ai constaté que c'était un service que je pouvais rendre et je l'ai finalement assumé avec beaucoup de bonheur en essayant de le faire le mieux possible.

Nous avons créé quelques années après « Logement pour tous », une Agence Immobilière Sociale, qui gère ces logements rénovés, trouve des locataires, récolte les loyers, entretient les logements… Cette Agence Immobilière Sociale peut aussi répondre à la demande de propriétaires. En effet, sur le marché, il y a des propriétaires de logements qui désirent qu’une AIS gère leurs biens (et prenne en charge les frais liés aux impayés des locataires, aux frais de réparation des dégâts locatifs…) contre des loyers moins importants mais réguliers. « Logement pour tous » a en gestion environ 300 logements à Bruxelles.

Ensuite, il est apparu que certains locataires ont désiré devenir propriétaires. En effet, quand ils ont pu trouver un travail, bénéficier d'un logement à loyer modéré et réussir à faire des économies, certains ont souhaité devenir propriétaires. L'accès à la propriété reste un gros problème aussi pour les gens qui ont des revenus faibles à moyens car les prix du marché actuel sont trop élevés. Comment les aider à devenir plus autonomes et réaliser leur rêve de devenir propriétaire à un prix qui leur soit accessible ? Nous nous inspirons de l'idée du Community Land Trust (CLT) qui vient des USA. Dans ce concept original, la propriété du sol est séparée de la propriété du bâti. Le sol reste propriété du pouvoir public (Région, Etat…) et le bâtiment est propriété de la personne. On achète donc moins cher son logement comparé aux prix du marché, cependant ce concept implique aussi que le prix de revente du bien soit moins cher ! Mais cela permet de devenir propriétaire du logement que l'on habite, d'y faire les transformations qu'on désire, d'être responsable et autonome de son logement. Nous avons créé une association CLT à Bruxelles qui regroupe une vingtaine d'autres associations dans son assemblée générale et nous sommes en train de créer le 1er projet CLT de Belgique ! Ce projet intègre les futurs propriétaires de façon active.

Qu'est-ce que votre investissement dans ces projets vous apporte ?

Le logement est important pour la construction humaine, c'est un besoin profondément ancré en l'homme d'avoir un bon logement. Le travail que j'effectue avec d'autres dans ce sens est très gratifiant car nous avons comme objectif le bien commun.

http://www.renovassistance.be/
http://communitylandtrust.wordpress.com

 

Vous aimerez aussi
La fabrique des imposteurs ou la disparition du « JE »
Vivre avec la démence (II) : des pistes pour retrouver la joie
Hundertwasser au secours des sans-abris
Le pape reçoit le secrétaire général de l’ONU