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Il est à peine 5h30 du matin quand nous arrivons à Boca da Mata, un petit village situé à 15 Km du sanctuaire de Notre-Dame de Candeias (Bahia). Deux cents hommes sont là à attendre le départ de la deuxième édition du pèlerinage des hommes.


© Luc Lunel

Ils viennent des villes voisines : Camaçari, Dias d´Avila, Simões Filho, Candeias, São Francisco do Conde et d´autres petits villages des environs. Avant toute chose, le café da manhã qui est devenu presque un rituel. Il est préparé et servi par les membres de la communauté thérapeutique São Francisco, guidée de main de maître par Jaïr Santana, un père de famille et entrepreneur de quarante ans qui donne littéralement sa vie pour eux. Parmi la trentaine de jeunes toxicodépendants, je reconnais Jonathan, Wellington, André, Paulo et bien d’autres que j’ai appris à connaître lors de Messes célébrées pour eux, de confessions entendues. Tout au long du pèlerinage, c’est eux qui se mettent au service des pèlerins, leur offrant de l´eau, leur servant des petits lunchs (trois en tout pour 4 heures de marche !) tout en partageant avec tous ce temps de marche, de pénitence et de prière et ceci de tout leur coeur. Leur vie, comme celle de beaucoup d´autres hommes qui ont fait le déplacement est devenue comme un grand cri.
Cri de ne pas se sentir digne de l´amour de Dieu,
Cri de ne pas savoir comment sortir de la drogue, de l´alcool, et d´autres vices,
Cri devant la banalité de leur vie,
Cri de solitude profonde,
Cri d´un sens pour leur vie…

C´est par compassion, par désir de servir la vie de ces hommes, par désir de leur offrir un espace de communion et de solidarité qu’avec Jair nous leur avons proposé ce pèlerinage. Nous n´en sommes seulement qu’à la deuxième édition mais nous sommes heureux de voir combien il répond à leur désir, à l’attente de leur cœur : pouvoir prier, pouvoir faire pénitence, pouvoir le faire avec d’autres hommes en tous points semblables à eux, à l’ombre de nos communautés de Points-Cœur de la Fazenda do Natal et de la Coroa da Lagoa et de la comunauté thérapeutique saint-François.

Quatre étapes balisent notre chemin. Le premier tronçon de la marche est un moment splendide de beauté. Il fait encore frais sous le climat tropical et nous traversons par petits groupes de dix personnes une région vallonnée tout en priant le chapelet.
Le deuxième tronçon est plus dur, c´est la traversée du désert. Il est à peine 7h30 du matin, mais le soleil tape déjà durement ! Chacun marche en silence jusqu´à la chapelle des saints-Anges à l´entrée de la ville de Candeias. En tout, une heure de marche en silence. Plusieurs ont témoigné que c´est pour eux l’expéirence la plus marquante de la journée, celle du silence ! Un mot et une réalité qui n´existent pas dans leur vie. Dans leurs quartiers, tout est bruit, musique, cris, à l’intérieur comme à l’extérieur de leur maison. Mais ce silence n´est pas chose facile. Jair, d’une voix ferme, exerce son don pour dire clairement et simplement les choses, à la Brésilienne : « Le Royaume de Dieu est un royaume d´ordre et d´obéissance ! ». A bon entendeur…
Le troisième tronçon est plus animé. Avec l´appui d´un mini-trio-electrico (petit camion aménagé avec des enceintes énormes et qu´on utilise normalement pour le carnaval !) nous traversons la ville jusqu´au Sanctuaire Nossa Senhora das Candeias. Du haut de ce camion, j´anime la marche avec quelques chanteurs et un guitariste. Il nous faut prier, chanter mais surtout faire attention aux fils électriques qui traversent la rue et se baisser régulièrement pour ne pas risquer de rester accrocher à eux. C´est un moment très bon enfant et un bien beau témoignage. Deux cents hommes qui traversent la ville en chantant et en priant, ce n’est pas chose banale. Quelques familles sortent de chez eux, des femmes nous font des grands signes depuis leurs balcons, d´autres chantent et dansent avec nous. C´est la joie et la foi bahianaises qui s´expriment.
Enfin, nous terminons notre périple par la célébration de l´Eucharistie au Sanctuaire. Plusieurs des épouses avec leurs enfants sont venues rejoindre leur mari. Elles sont fières de les retrouver dégoulinants de sueur mais le regard brillant, fier d’être allés au bout de leur « exploit ». C´est un moment trés simple et particulièrement émouvant.
Avec Jair, nous sommes très heureux du déroulement de ce pèlerinage. Cette année, nous avons eu deux fois plus de participants que l´année dernière. Ces hommes, qui par ailleurs sont loin d´être des piliers d’Eglise, reviennent donc tout en invitant leurs amis, c’est de bon augure. Quelle joie d’être témoin de leur désir de Dieu quasi palpable, de les voir s’avancer avec toute l’épaisseur de leurs histoires personnelles vers le Sanctuaire non fait de mains d’hommes. Rendez-vous l´année prochaine le dimanche 22 mars 2015 !

 

Christian Vienne

Pour voir les photos du pèlerinage :
https://picasaweb.google.com/104051233919463332075/PeregrinacaoDosHomens2014?authkey=Gv1sRgCJy98qL-s5uAuQE&feat=email

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5 Commentaires

  1. Viky

    Merci beaucoup Père Christian pour cet belle témoignage!
    On voit que ce pèlerinage est le fruit de l’amitié, une amitié préoccupée pour le destin de chacun de nos amis.
    Merci!

  2. p Edouard

    Génial. Merci père Christian.
    Magnifique challenge de réunir tant d’hommes et de percevoir leur joie à travers tes lignes.
    Très belle proposition… adelante!

  3. Jean-François Duval

    P Christian. Merci. Du haut de ton trio-électrico j’ai cru connaître des airs de padre Marcelo Rossi. Vive l’audace et la liberté brésilienne!

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