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Le Chemin de St Jacques, selon Sa Majesté le Roi Felipe VI

Sa Majesté le Roi Felipe VI d’Espagne, à l’occasion de l’ouverture du Primer Congreso Mundial Xacobeo [1]Rencontre d’études sur la tradition jacobine qui aborde le phénomène du pèlerinage et du Chemin de Saint-Jacques sous tous ses aspects, tels que l’analyse de grands textes … Continue reading le 3 juin 2021, a dédié quelques mots suggestifs sur la profondeur et l’enracinement de la tradition du pèlerinage vers Compostelle. Dans son discours succinct, il a rappelé le grand apport humain et vital que suppose marcher à Santiago de Compostelle, les liens qui s’y créent et les valeurs qui le nourrissent. En raison de sa richesse particulière, profitant de la situation actuelle de l’Année Sainte Jacobine, j’en rapporte un extrait :

 

 

« […] Le cas de la tradition jacobéenne est singulier car, née à une époque et dans un lieu précis, elle se répand en Espagne, en Europe et dans le monde, faisant en sorte que des peuples éloignés les uns des autres se sentent liés à un même horizon.

Son essence est le Chemin, un chemin physique, un chemin intérieur et spirituel. Et son protagoniste est un marcheur, autre signe distinctif de la culture qu’incarne la figure de l’Apôtre Saint Jacques, et dans laquelle il est aussi important d’arriver que de parcourir l’itinéraire. Grâce à ces caractéristiques distinctives, le Chemin de Saint-Jacques – ou les Chemins de Saint-Jacques […] – ont transcendé le temps et sont les précurseurs de ce que l’on pourrait appeler une mondialisation spirituelle. La persistance de leur influence résout un dilemme qui a préoccupé de nombreux humanistes et qui se pose à nouveau aujourd’hui. Je me réfère à celui qui opposerait l’homme lié uniquement à une culture spécifique, à ces personnes qui ressentent également l’ensemble de l’Humanité comme leur propre maison.

Le Codex Calixtinus fait référence, dans plusieurs de ses passages, aux origines des pèlerins de l’époque, au lointain Moyen Âge […] Le Codex offre une large mosaïque de cultures qui, au fil du temps, s’articuleront et se rapprocheront et qui, de cette manière, favoriseront également le dépassement des conflits qui ont dévasté le Vieux Continent. L’un des premiers rapprochements est celui qui s’est produit lorsque des pèlerins, venus de pays qui n’avaient aucun lien entre eux – ou qui ne s’étaient rencontrés que sur les champs de bataille -, se sont rencontrés sur le Chemin de Saint-Jacques et se sont reconnus comme des Européens. Goethe l’appréciait lorsqu’il proclamait que ‘l’Europe s’est faite en pèlerinant à Compostelle’.

 

 

La première grande vertu de la Route Jacobéenne, qui en fait l’une des traditions les plus anciennes, est de rendre compatibles le local et le global à une époque, qui plus est, où les deux termes étaient séparés par une distance incommensurable. Le Camino forge une communauté plus large sans effacer le sentiment d’appartenance de chaque homme ou femme qui traverse le Portique de la Gloire. Et elle le fait avec des pèlerins issus de cultures, de réalités et de manières de voir le monde très différentes.

Malgré les frontières, les conflits et les idéologies opposées, il existe un substrat commun sans lequel l’attrait du Camino serait inexplicable. Il n’est donc pas surprenant que dans les témoignages recueillis auprès des pèlerins, il soit toujours fait référence aux retrouvailles avec soi-même, au sentiment de fraternité avec les autres marcheurs, à la communion avec la nature ou à la tranquillité ressentie lorsqu’une étape est terminée.

Celui qui arrive sur cette Place de l’Obradoiro est le même que celui qui a commencé le voyage, mais en même temps il est différent, grâce aux valeurs qui ont été accentuées, récupérées, vivifiées par l’expérience du Camiño.

 

 

La fin du chemin physique fait place à un chemin spirituel, dans lequel les expériences précieuses sont les provisions du pèlerin, et les étapes de la vie sont équivalentes à celles du chemin de pèlerinage. Cela signifie que la Galice, entendue par les Anciens comme l’extrémité de la terre, est aussi un commencement qui offre des possibilités infinies à ceux qui, arrivant sous ces latitudes, deviennent des Gallegos adoptifs, qui incorporent les vertus de cette chère terre d’Espagne.

[…] Le pèlerin peut marcher seul, mais il se sent membre d’une grande communauté qui lui apporte aide et encouragement. Les circonstances défavorables qui font partie du moment que nous vivons exigent le renforcement des affections entre les personnes, les communautés et les nations. Elles exigent, en somme, de s’inspirer des chemins qui ont uni la Galice et toute l’Espagne, pour continuer à les parcourir pendant les « mille printemps » auxquels Álvaro Cunqueiro faisait référence ».

References

References
1 Rencontre d’études sur la tradition jacobine qui aborde le phénomène du pèlerinage et du Chemin de Saint-Jacques sous tous ses aspects, tels que l’analyse de grands textes documentaires et littéraires, la philosophie et la littérature, le droit, le patrimoine et la santé
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