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« Incredible India » : trois ans d’expatriation en Inde

Bien vivre une expatriation, ce n'est pas si simple : changement d'univers, barrière de la langue et de la culture, éducation et scolarisation des enfants… Jean-Baptiste et Micheline, couple franco-libanais, nous livrent leur regard sur cette expérience. Leur amitié avec Point-Coeur a été un soutien et un moyen d'entrer dans la mystère de l'Inde. 

Jean-Baptiste, Micheline, Raphael, Camille et Alexandre en Inde.

 

Vous êtes arrivés il y a trois en Inde. Pouvez-vous nous parler de votre expérience, de vos premiers pas, de ce que vous avez vécu ?

JB : On est presque parti sur un coup de tête. Je n’avais jamais dit que j’étais prêt à être mobile au niveau international, jusqu’à un barbecue où mon actuel chef, Jean-Denis, m’a dit « tiens, je cherche quelqu’un de ton profil, une place à affecter ». A partir du moment où la décision a été confirmée, deux mois après on était à Chennai. Ça a été rapide ! On a arrêté l’année scolaire en plein milieu, on est arrivé le 1er décembre 2012.

M : Nous sommes arrivés avec trois enfants, les jumeaux Raphaël et Alexandre, de 9 ans à l’époque, et Camille, quatre ans. Pour eux, cette immersion a été un challenge. Mais, faire la connaissance de Points-Cœur dès le début a été vraiment notre repère. Le fait de venir ici, au Jardin de la Miséricorde, une fois par mois mettait de l’ordre dans notre vie et nous permettait de voir l’Inde avec des yeux beaucoup plus aimants et tolérants.

Quel genre de liens avez-vous pu avoir avec les Indiens ?

M : Nos contacts ont été soit avec les personnes qui travaillaient pour nous, soit avec nos propriétaires, ou bien des gens extrêmement riches. J’ai eu énormément de mal à être en contact avec la classe moyenne indienne. Je l’ai un tout petit peu rencontrée au British Council, où j’ai pris des cours d’anglais au début, mais cela n’a pas été des amitiés qui ont duré. Finalement, c’était seulement des connaissances. Les gens s’intéressaient à nous, on a peut-être réussi à faire une ou deux activités ensemble, mais ça s’arrêtait là. Il y a une telle différence culturelle, qu’on n’a pas pu aller plus loin. Par exemple : j’ai fait la rencontre de jeunes femmes, mais le fait d’aller ensemble déjeuner n’était pas possible, car les maris interdisaient à leur femme de sortir. C’était pourtant des femmes éduquées …

On parle souvent d’« incredible India » : en quoi l’Inde vous a surpris & vous a paru incroyable ?

M : Par beaucoup de choses ! Déjà, l’ouverture à une autre culture, une autre religion, une autre philosophie. Je me souviendrai toujours des yeux de mes enfants à Tanjore, au moment du coucher du soleil, devant cet énorme Nandi en cuivre, haute comme deux étages (statue d’une vache sacrée). C’était au moment des ablutions du soir, il y avait presque 10.000 personnes devant lui, à genoux. Les Brahmanes (prêtres de l’Hindouisme) le lavaient avec du ghee (huile), des fleurs partout. Très perplexe, mon fils me dit « je ne comprends pas ce qui se passe ». En effet, on était sur une autre planète ! Les questions de nos enfants, cette confrontation avec une culture vraiment différente, les liens qu’on a essayés de faire petit à petit avec l’Hindouisme, tout cela a été une grande richesse pour nous et pour nos enfants, qui sont extrêmement curieux et demandeurs. Sans compter tous les nombreux voyages en Inde !

Jean-Baptiste, peux-tu nous dire deux mots sur ton travail ?

JB : Je m’occupe de développer la liaison au sol d’un nouveau projet de petits véhicules pour Renault, et pour Nissan d’ailleurs, car on travaille sur une plateforme commune, qui va sortir dans les prochains jours. C’est de la conception, de l’industrialisation et de la validation de tous les composants de son châssis pour équiper cette voiture. Dans l’équipe, on a découpé l’ouvrage en petits morceaux, et chacun est en charge d’une partie. Le point très positif de travailler avec les Indiens, c’est qu’a priori, rien n’est impossible. Dès qu’on a un objectif, une tâche, eh bien on y va ! Très rarement ils vont nous dire « je ne vais pas y arriver », donc on fonce ! Il y a un optimisme, un désir d’apprendre des connaissances et du savoir-faire qu’on va leur transmettre. Ils le sentent bien, et cela participe à leur motivation. Après, il y a des points moins positifs, qui font qu’en terme d’autonomie, d’initiative, c’est plus compliqué. 

Les manageurs du projet sont en partie français et japonais. On a fait réaliser un certain nombre d’essais au Japon, en Roumanie, en France, en Corée. C’est finalement un projet très international !"

En quoi pensez-vous que l’Inde vous a aidé à devenir plus ouvert ?

M : Ce n’est pas l’Inde qui nous a aidés, c’est Points-Cœur, qui remettait les choses à leur place. Et surtout au début : quand tu t’installes, tu as à faire avec les propriétaires par exemple, qui sont ce qu’ils sont ; avec le personnel, avec qui tu n’as qu’une relation très liée à l’argent. Le fait de venir souvent au Jardin de la Miséricorde, nous donnait un aperçu plus spirituel de ce pays. Car l’Inde, et surtout le Tamil Nadu, on nous a toujours dit que c’était très spirituel, mais notre quotidien ne nous le montrait pas ! Et c’est à travers Points-Cœur que nous l’avons découvert : grâce aux enseignements qu’on avait le dimanche avant la messe notamment. Je ne sais pas comment l’exprimer, mais la relation avec les Indiens était plus saine, et pour moi, ça passait par Points-Cœur.

JB : On nous donnait aussi des clefs de compréhension, et quand on comprend, le contact est plus facile. On a plus de bienveillance.

M : Nous, ça nous amusait beaucoup. On se demandait par exemple pourquoi ils ne souriaient pas sur les photos de mariage. De nous avoir expliqué qu’il y a toute cette histoire d’ego qu’il ne faut pas montrer, cela rendait les choses plus claires. Bon c’est un détail… Et puis ces journées de récollection nous aidaient à trouver ce qu’on a en commun avec les Indiens. Ainsi, quand les enfants nous demandaient « comment peuvent-ils prier devant un éléphant ou une statue ? », on pouvait leur dire que non, ça n’est pas cela qu’ils prient, mais ils croient en un dieu, et si j’ose dire, en un seul Dieu.

Du coup, au terme de ces années d’expatriation, est-ce qu’on peut parler d’expérience spirituelle?

M : Je pense que oui, grâce à Points-Cœur, et aux week-ends qu’on a faits avec les frères de Saint Jean, qui venaient une fois par mois faire le caté aux enfants. Et puis évidemment cette ouverture à une philosophie nouvelle. Je pense qu’on a eu une chance inouïe de vous rencontrer. Ça, je le maintiens, car ce n’était pas gagné en arrivant ici. Le fait de venir chez vous, de sortir de notre cage dorée, cela nous faisait du bien. Les gens nous demandaient « Vous n’allez pas au brunch aujourd’hui? Mais que faites-vous donc ? ». Une fois, une amie a répondu, « Non, ils vont à Chengalpet ! » (ville voisine du Jardin de la miséricorde). C’était rigolo d’entendre cela. Le fait de pouvoir venir dans cet endroit calme, simple où il n’y a pas de clim, ça remettait les choses à leur juste place. C’était plus la réalité.

De pouvoir vous voir, et d’avoir la messe régulièrement à la maison, c’était très enrichissant ! Faire la fête avec vous fait partie des plus belles choses qu’on ait vécues. Ce furent des weekends d’amitié toute simple…

© Jardin de la Miséricorde

 

A lire également : 

Jardin de la Miséricorde, Chengalpet (Tamil Nadu)

Point-Cœur Jules-Monchanin, Chengalpet (Tamil Nadu)

Point-Cœur Bienheureuse-Mère-Teresa, Kasimode (Chennai)

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