Cette mystérieuse "petite" qui courrait comme l'eau vive et qu'on ne pouvait jamais rattraper a si bien parlé à nos âmes qu'elle en est devenue l'image la plus délicate.
La chanson évoque l'étonnement de celui qui comprend combien un être demeure insaisissable. Cette "petite" était si fraîche et si réelle qu'elle pouvait assumer dans sa course lumineuse et riante bien des vérités : figure de la grâce, de la beauté, elle était aussi le coeur qui ne se laisse pas dompter si facilement, à moins de rencontrer un amour véritable, ce qui, après tout, ne court pas les rues. "Les gars du hameau" auraient d'ailleurs bien voulu la mener captive, en contrôler la course rebondissante et insaissable, la posséder pour leur propre gloriole, mais elle savait s'en dégager, préférant l'infini du grand large au mensonge.
Guy Béart avait chanté cette expérience de liberté en des termes plus durs, dans cette autre chanson qui exprimait le désir de vérité et de justice de toute une génération. Le ministère de la vérité, pourrait-on dire, l'acte prohétique de s'attacher à la vérité plus qu'à sa propre vie conduit au martyr. Cette image n'est pas anodine, ni nouvelle. N'est réellement nouveau que ce qui est éternel. On voit d'ailleurs apparaître la figure du Christ à l'avant dernière strophe.
La vérité
Le premier qui dit se trouve toujours sacrifié
D'abord on le tue
Puis on s'habitue
On lui coupe la langue on le dit fou à lier
Après sans problèmes
Parle le deuxième
Le premier qui dit la vérité
Il doit être exécuté.
J'affirme que l'on m'a proposé beaucoup d'argent
Pour vendre mes chances
Dans le Tour de France
Le Tour est un spectacle et plaît à beaucoup de gens
Et dans le spectacle
Y a pas de miracle
Le coureur a dit la vérité
Il doit être exécuté.
A Chicago un journaliste est mort dans la rue
Il fera silence
Sur tout ce qu'il pense
Pauvre Président tous tes témoins ont disparu
En choeur ils se taisent
Ils sont morts les treize
Le témoin a dit la vérité
Il doit être exécuté.
Rester dans la ligne
Suivre les consignes
A Moscou un poète à l'Union des écrivains
Souffle dans la soupe
Le poète a dit la vérité
Il doit être exécuté.
Combien d'hommes disparus qui un jour ont dit non
Dans la mort propice
Leurs corps s'évanouissent
On se souvient ni de leurs yeux ni de leur nom
Leurs mots qui demeurent
Chantent "juste" à l'heure.
L'inconnu a dit la vérité
Il doit être exécuté.
Un jeune homme à cheveux longs grimpait le Golgotha
La foule sans tête
Etait à la fête
Pilate a raison de ne pas tirer dans le tas
C'est plus juste en somme
D'abattre un seul homme.
Ce jeune homme a dit la vérité
Il doit être exécuté.
Ce soir avec vous j'ai enfreint la règle du jeu
J'ai enfreint la règle
Des moineaux, des aigles
Vous avez très peur pour moi car vous savez que je
Risque vos murmures
Vos tomates mûres
Ma chanson a dit la vérité
Vous allez m'exécuter
Ma chanson a dit la vérité
Vous allez m'exécuter
Guy Béart n'a pas été exécuté par son public, mais comme son "eau vive", il vient de battre son trousseau aux cailloux de la rive : "pleurez, pleurez, si je demeure ésseulé, le ruisselet au large s'en est allé".
Les chansons de Guy Béart ont accompagné les "baby-boomers" pendant 60 ans. S'il a connu des éclipses, il ne fut jamais vraiment démodé. Parmi mes préférées: "Couleurs", "Pierrot la tendresse", "Vive la rose"…et beaucoup d'autres.
l'eau vive à été avant tout écrite à la demande d'EDF:GDF pour une de leur publicité !!!!