Home > Musique, Danse > Corpus Christi by Jeff Buckley

Jeff Buckley est connu pour sa reprise d’ « Hallelujah » de Leonard Cohen dont celui-ci disait que c’était la meilleure de toutes : « J’ai écrit les paroles, mais c’est définitivement une chanson de Jeff Buckley ». C’est à l’occasion des funérailles de son père, le  célèbre chanteur folk, Tim Buckley, que Jeff a profondément ému Leonard Cohen par son chant, comme le roi David bouleversé par la beauté de la princesse Bethsabée dont parle la chanson « Hallelujah ». Leonard Cohen lui donnera alors son accord pour faire cette reprise.

La voix de Jeff Buckley est unique en effet, lui qui disait qu’elle était « l’essence de la personne, ce qui vous révèle le plus. Sur scène, vous ne pouvez pas mentir. Les enfants reconnaissent à votre voix si vous dites ou non la vérité ».

Il « admire », comme il dit lui-même, Edith Piaf, Lou Reed, Bob Dylan, Nina Simone, sans compter Led Zeppelin et le musicien pakistanais Nusrat Fateh Ali Khan, qui auront une grande influence sur sa musique.

Malgré son talent personnel, pour lui, « rien ne vaut un groupe. Prenez n’importe quel grand album, il importe peu que ce soit un artiste solo comme Van Morrison, il y avait un super groupe. Ma musique préférée a toujours été faite par des groupes ».

Jeff Buckley est un artiste d’une immense valeur, disparu très tôt, trop tôt, – à l’instar de Janis Joplin, Kurt Cobain ou Amy Winehouse -, à l’âge de 30 ans, mort noyé dans le Mississipi, il y a tout juste 21 ans, le jour même de la fête du Corpus Christi, après avoir réalisé un unique album magnifique, intitulé « Grace », dont un des titres s’intitule justement « Corpus Christi Carol ».

Dans son titre « Grace », il chante comme un prophète sa propre heure, la façon dont elle viendra et sa condition de pèlerin qui « attend dans le feu », tendu vers l’au-delà : « C’est mon heure qui vient, je n’ai pas peur de mourir. Ma voix flétrissante chante l’amour, mais elle pleure au son du temps. J’attends dans le feu, j’attends dans le feu (…) Je les sens noyer mon nom, si facile à connaître puis à oublier avec ce baiser. Je n’ai pas peur de partir. J’attends dans le feu, j’attends dans le feu… ».

Chaque prestation sur scène était l’occasion pour lui d’un don total de sa personne. Il disait en parlant de sa musique qu’il voulait simplement redonner ce qu’il avait reçu.

Il lui était fréquent de créer de nouveaux arrangements, faisant parfois durer jusqu’à 15 minutes un seul titre. Il avait un nombre infini d’idées, comprenant tout style de musiques.  Il ne voulait être enfermé dans aucun cadre comme aiment à faire les médias : « Tout ce bruit autour de mon premier album n’a pas de sens. Je suis fatigué des médias; ils ne disent rien. Ils ont démoli beaucoup de mes amis artistes. Le sensationnel des médias n’est pas la vraie vie. Pour connaître quelqu’un, vous ne pouvez pas les écouter. Je ne me fie qu’à mes amis, à mon public (…)  C’est facile d’avoir du succès, cela n’a pas grand chose à voir avec la musique. Je serai toujours musicien, je n’ai pas besoin d’avoir ma photo partout […]. Ce que je veux vraiment c’est de pouvoir jouer, toujours, jusqu’à ce que je tombe (…) Tu n’as pas besoin de posséder le monde quand tu as 22 ans. Le meilleur âge est plutôt 47, 48 ans ».

C’est  un  » artiste long terme  » qui aurait continuer d’évoluer en faisant  » un travail intéressant et varié «  disait de lui Jimmy Page, sans refaire un autre album similaire au premier, mais traduisant de manière si variée dans son art, sa soif exacerbée d’absolu, faisant de lui un être vulnérable dans ce monde qui « sous-évalue le langage poétique ».

Sa reprise de Benjamin Britten, Corpus Christi Carol, parle d’un chanteur dont la fiancée est enlevée par un faucon. Il part alors à sa recherche et la retrouve dans la grotte d’un jardin remplie de pourpre et d’or. Là s’y trouve un lit rempli d’or « si rouge », sur lequel repose un chevalier dont la blessure saigne jour et nuit. A son chevet est agenouillée une servante qui pleure nuit et jour. A son chevet est déposée une pierre sur laquelle est écrit « le Corps du Christ ».

Jeff Buckley, chanteur qui nous amène de l’amour humain à l’amour oblatif de l’Epoux, célébré dans la solennité du Corpus Christi…

Dans ce titre particulièrement, la voix de Jeff Buckley est comme une porte s’ouvrant sur son âme qui chante à qui veut l’entendre, dans une tension apaisée : tout sur terre vient du Ciel et est fait pour retourner à cette source où se trouve la vraie paix.

Acheter ici le DVD « Grace » en soutenant Points-Coeur

Vous aimerez aussi
Corpus Domini, le signe du pain et du vin
Le film Corpus Christi fait le plein d’entrées en Pologne
Concha Buika, la voix de la liberté
Le cas Jägerstätter

3 Commentaires

  1. Pierredo

    Merci père raphel pour cet article …Jeff mon artiste de coeur depuis mon adolescence….un beau clin d'oeil moi qui vient traîner par hasard sur le site pour lire les 25 ans de saint Monique à Dakar…