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Elections en Argentine, premier tour

Les élections présidentielles de dimanche dernier en Argentine furent une surprise pour Daniel Scioli, candidat du gouvernement actuel. Il pensait gagner dès le premier tour ou obtenir une différence beaucoup plus significative sur son principal adversaire, Mauricio Macri. Le « kirchnerisme » (idéologie politique prônée par Nestor Kirchner et sa femme Cristina Fernandez, qui vient de gouverner pendant 8 ans le pays) n’a pas su, ou pas voulu, présenter un candidat à la présidence provenant de son propre parti. La forte personnalité de l’actuelle présidente rend difficile le choix d’un successeur. Scioli, actuel gouverneur de la province de Buenos Aires, fut finalement choisi par le gouvernement au pouvoir mais, plus avançait la campagne électorale, plus se percevaient les divergences avec le noyau dur du « kirchnerisme ». Pour lui succéder comme gouverneur dans sa propre province, Scioli a dû accepter un candidat provenant du groupe de la présidente, en la personne d’Anibal Fernandez, personnage douteux, suspecté de relations avec le trafic de drogues. Dimanche dernier, Scioli fut battu dans sa propre province. Cela est sûrement un des éléments clés qui l’empêcha de gagner dès le premier tour au niveau national. Parce qu’il faut savoir que la seule province de Buenos Aires représente 37% des votes du pays.


Mauricio Macri (au premier plan) et Daniel Scioli (au second plan) inaugurent un centre de traitement des déchets
dans la ville de José Leon Suarez en 2013

Comment affrontera le prochain président la situation d’un pays où le gouvernement n’a cessé de nier la réalité ? Pas d’inflation, pas de pauvretés, pas d’insécurités, pas de trafic de drogue. L’Eglise catholique a eu une contribution importante sur la scène publique par l’élaboration et publication de statistiques réalisées par l’Université Catholique d’Argentine (U.C.A.). On note par exemple que 29% de la population vit sous le seuil de pauvreté. Ces données ont été rejetées à plusieurs reprises par l’actuel gouvernement. On peut rajouter aussi que 24,5% des foyers argentins reçoivent une aide sociale de l’état selon l’étude de la UCA,  qui n’élimine pourtant pas la pauvreté mais réduit l’indigence.

Un autre élément grave fut l’ingérence du pouvoir exécutif dans la nomination de juges et la garantie du déroulement de certains procès juridiques. Beaucoup d’argentins ont du mal à croire en leur système judiciaire. La preuve la plus significative fut le cas Nisman. Ce procureur rencontré mort en janvier dernier. Son procès reste sans suite, embrouillé dans des accusations et avançant des doutes sur une mauvaise procédure de l’enquête policière au moment des faits.

Actuellement, le parti au pouvoir détient la majorité au Congrès, ce qui a permis de faire passer des lois sans la présence de l’opposition. Le cas le plus emblématique fut la réforme du Code Civil et Commercial, ratifié en 2014 par les seuls députés  du parti au pouvoir. Cette réforme inclut des modifications importantes sur les questions de la famille, du mariage, de la fécondation assistée, etc…

Malgré cette situation, un fort pourcentage des argentins continue à croire au « projet national ». A la grande quantité des pauvres assistés par le gouvernement, et qui n’ont pas tellement le choix car leur vote fut acheté, s’ajoutent des intellectuels, des artistes, des professeurs d’université, etc. Le discours officiel, alimenté par une machine publicitaire de haut niveau, semble prédominer dans la réalité. Un discours qui séduit et contrôle : penser différent devient dangereux et suspicieux. Le dialogue et le débat, si cher à notre pays, sont remplacés par un dangereux manichéisme qui divise le pays entre les bons et les mauvais, et où la recherche de la vérité brille par son absence.

Les deux candidats qui restent en lice (Scioli et Macri) n’ont pas vraiment fait de propositions concrètes. Prédominent encore des grands slogans et des promesses irréalisables. Il est difficile de percevoir leurs profondes convictions, tenant compte qu’ils ont été capables de faire alliance avec des personnes bien différentes, particulièrement dans les provinces de l’intérieur du pays où le seul critère paraissait être la démagogie et l’arrivisme au pouvoir.

Le ballotage est prévu pour le 22 novembre prochain. Nous percevons déjà dans les discussions entre voisins et amis, un désir de se responsabiliser et d’agir d’avantage en faveur de l’avenir du pays. Puisse cela générer un vrai débat à partir de propositions concrètes et réveiller ainsi une société endormie et désespérée.

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