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En 1994, le cinéma égyptien avait abordé le sujet de l’extrémisme musulman avec « Al Irhabi », « Le Terroriste » de Nader Galal. En ces temps tragiques ce film nous rappelle de manière presque ingénue une expérience pourtant déterminante : un véritable amour peut changer le cœur d'un homme. 

Un extrémiste parmi les "koufar"

Ali – joué par Adel Imam, qui écopera d'ailleurs de 3 mois de prison en 2012 pour « diffamation contre l’Islam » – a subi un véritable lavage de cerveau de la part des salafistes. Il est enfin jugé « digne » d’être envoyé en mission pour tuer des poètes « au nom de la foi », vandaliser des bijouteries ou des magasins d’art, éliminer tout ce qui n’est pas Halal, et ainsi, servir Dieu et gagner le Paradis avec ses vierges promises. 

  

Poursuivit par la police après avoir tenté de tuer le chef de l'armée, il se fait renverser par la voiture d’une jeune fille appartenant à une famille aisée. Comme le pied d’Ali était gravement blessé et que le père de la fille est médecin, la famille lui propose de rester chez eux en convalescence. Ali saisit l'aubaine pour échapper à la police en se faisant passer pour ‘Moustafa’, un poète et professeur de philosophie connu au Caire. Il ne pouvait pas prévoir que ces semaines de convalescence allait changer sa vie. 

Ali se trouve donc obligés de vivre dans une maison de « kouffar » (infidèles) dont il n’est même pas autorisé à toucher les mains impures. Il est contraint de regarder à longueur de journée des tableaux d’arts dans le salon. Il se trouve confronté à la liberté de la plus jeune des filles qui aime la danse et le cinéma, et à un poète ami de la famille, qu’il était précisément censé assassiner. Il doit même supporter les discussions et les visites du voisin chrétien… 

Une expérience de compassion 

Avec beaucoup d'humour, fidèle en cela au tempérament égyptien, mais non sans profondeur, le film montre comment Ali se laisse toucher peu à peu par l’amour qui règne dans cette famille. Il découvre que ceux qu’il considérait comme ignorants et digne de mourir, l’aiment et s’occupent de lui et témoignent d'un amour privilégié pour les plus pauvres. Ce sont là des idéaux qu'il cherchait à vivre dans l'impasse de l’extrémisme.

Un jour, le père de famille partage sa souffrance en tant que médecin de ne pas avoir pu sauver le chef de l’armée que le « terroriste » avait visé. La mère de famille manifeste sa compassion pour l’épouse et les deux enfants de la victime. Ali se rend compte de la gravité de son geste et pose sur la situation un autre regard. Incognito, il doit conserver tout cela dans son cœur. 

Une humanité différente

Au cours de ses discussions avec le poète qu'il projetait de tuer, il découvre aussi que l’art n’est pas l’ennemi de l’homme, mais peut au contraire l'élever vers Dieu par la Beauté sur un chemin de vraie liberté. 

Ali tombe amoureux de Sawsan, la fille ainée qui l'avait heurté en voiture. Il est touché par sa douceur et par sa capacité d’aimer en vérité, de sacrifier sa vie pour les autres. Cet amour provoque sa liberté.

Au cœur de cette famille, Ali vit une expérience de miséricorde. A la fin de sa convalescence, son identité véritable est découverte par la famille. Il attend une vengeance de leur part. Mais la mère de famille le laisse fuir. Si elle lui signifie la gravité et l’horreur de ses péchés, elle lui rappelle que le péché fait partie du cœur de l’homme, que ce dernier doit le reconnaitre et en demander pardon à Dieu et initier par là un chemin de conversion véritable. Cette miséricorde a été pour Ali le couronnement de toutes ces expériences d’amitié au sein de cette famille.

Ali retourne auprès des siens mais il veut prendre ses distances. Les salafistes décident en secret de le tuer au moindre signe d'infidélité. Ali sera fidèle, mais bien à cet amour qui a changé sa vie. 

Le film était déjà d'actualité en 1994. Il l'est malheureusement toujours. Son sujet n'est naïf qu'en apparence. Car il souligne une potentialité du coeur de l'homme et la réalité de l'espérance chrétienne : un amour véritable porte une promesse de rédemption, il replace le cœur face aux désirs les plus profonds qui l'habitent. Il lui donne l'occasion de reconnaître et d'adhérer au Bien par excellence dont la réalité se fait le sacrement. C'est l'expérience de la miséricorde qui peut atteindre une personne tant qu'elle vit encore. 

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1 Commentaire

  1. Aude Guillet

    Merci sr Josette pour cette très belle présentation de ce film égyptien. 

    Voici le lien du témoignage  étonnant d'une petite chrétienne copte qui a survécu à l'attaque de Daesh contre son bus le 26 mai dernier en Egypte. La petite fille espérance, "C'est elle, cette petite, qui entraîne tout."

    https://www.facebook.com/Christianisezvous/videos/847966505341436/?pnref=story

    Vidéo complète :https://www.facebook.com/christianyouthchannel/videos/vb.278883245005/10158735370555006/?type=3&theater