Home > Sport > Giroud le mal aimé

C’est le titre d’un reportage du journal l’Equipe quelques semaines avant le transfert au club londonien de Chelsea d’Olivier Giroud, Mercredi dernier, au dernier jour du Mercato. Il quittait le club d’Arsenal après y avoir passé 5 ans. Ce transfert est une belle occasion de revenir sur ce joueur au parcours atypique et au talent controversé.

Un parcours atypique

A 19 ans, il signe son 1er contrat professionnel à Grenoble en ligue 2. A 24 ans, il part dans le club de Montpelliers et entame alors sa première saison en ligue 1, ce qui est très tard dans le monde du football. Deux ans plus tard, son équipe remporte le championnat de France (saison 2011/2012) en grande partie grâce à lui, un exploit pour un club si petit que celui de s’imposer au milieu des Lyon, Monaco et PSG. Il n’y a pas de hasard, Giroud termine cette année-là meilleur buteur du championnat français. Depuis 2012, sa carrière propulsée par l’épopée de sa petite équipe, il joue dans la prestigieuse équipe d’Arsenal avec laquelle il a gagné à trois reprises la Coupe d’Angleterre (2014, 2015, 2017). 

Des talents et des performances difficilement reconnus

Jusque-là, c’est la belle histoire d’une étoile montante du football français. Mais la réalité est plus nuancée que la belle histoire : en équipe de France, O. Giroud a longtemps été critiqué pour avoir pris la place de Benzema à la pointe de l’attaque des bleus. Il a beaucoup été sifflé et hué par les supporters français jusqu’à la Coupe d’Europe en 2016. Chacune de ses erreurs lui ont été vivement reprochées. 

Pourquoi cette difficulté à s’imposer ? Il a style qui ne plaît pas, une manière de jouer au football qui n’impressionne pas. Pourtant, il est efficace ! Djibril Cissé, ancien attaquant des bleus, explique : « Son style de jeu n’est pas forcément beau à voir : pas de drible, pas de roulette… Mais il n’en est pas moins un joueur super important. Sur les coups de pied arrêté, c’est un atout. Dans les relances, il est essentiel : il sait garder la balle et ouvrir le jeu. Qui plus est, c’est un attaquant qui marque des buts ». Essentiel dans ce genre de métier… Et les statistiques parlent d’elles-mêmes : en 69 sélections en équipe de France, il a marqué 29 buts (contre 27 pour K. Benzema en 81 sélections), ce qui fait de lui le 7ème meilleur buteur de l’histoire de l’équipe de France. 

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 (10 meilleurs buts de Giroud)

Eloge de la sobriété…

Finalement, ce qu’on reproche à O. Giroud, c’est de ne pas briller, de ne pas être un attaquant à la M’bappé ou à la Neymar, jeune, rapide, technique et médiatique… Giroud, sur le terrain comme dans la vie, c’est un jeu sobre, et athlétique qui sait « seulement » être au bon endroit au bon moment pour terminer le travail et envoyer le ballon au fond des filets. Il a un excellent jeu de tête, c’est une tour de contrôle dans la défense adverse, un remiseur. C’est un attaquant « à l’ancienne », il est celui que ses partenaires cherchent pour conclure l’action. 

Mais le football évolue et les profils qui ne correspondent pas à la nouvelle définition de l’attaquant médiatiquement génial, à l’aise dans le drible, la passe technique ou la frappe éclaire, n’intéressent plus ! Qu’ils n’intéressent plus les journalistes sportifs, qui cherchent comme dans toutes les directions du monde, du sensationnel, passe encore. Mais le drame d’un Giroud, un compétiteur solide au style sobre, c’est que même les entraineurs se laissent prendre par ce qui est parfois plus un effet paillette (qu’on pense à un Ben Arfa, que tout le monde voyait comme le prototype de l’attaquant moderne) qu’une réelle capacité à regarder le jeu d’une personne : bien qu’O. Giroud soit resté 5 ans à Arsenal, son entraîneur A. Wenger a cherché à le mettre en concurrence chaque année, alors que c’est lui-même qui l’avait recruté ! Au lieu de s’intéresser à son profile et de chercher à en faire bénéficier toute l’équipe, A. Wenger a préféré disqualifié O. Giroud en affirmant que son profile ne correspondait pas à l’équipe. Mais le rôle d’un entraîneur n’est-il pas de composer la meilleure équipe qui soit avec les joueurs dont il dispose ? Ne doit-il pas partir du talent et du don de chacun de ses joueurs pour produire le meilleur jeu ? Construire avec la réalité des joueurs de son équipe plutôt qu’essayer d’appliquer le dernier schéma tactique à la mode ? Surtout que Giroud a plus d’un tour dans son sac et sait nous sortir un coup de génie de temps en temps pour faire mentir ses détracteurs.

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Un choix décisif pour un avenir en bleu

Giroud est heureux de rejoindre le club de Chelsea. Il explique : « Quand j’ai su qu’Antonio Conte (entraîneur de Chelsea) voulait travailler avec moi, qu’il appréciait mon profil, je me suis décidé ». Espérons que Conte saura travailler avec Giroud et construire l’attaque de Chelsea autour de ce joueur dont il apprécie la solidité et la sobriété. Avant de prendre sa décision, O. Giroud a pris conseil auprès de D. Deschamps l’actuel sélectionneur de l’équipe de France, magnifique geste que très peu des grands joueurs ont le courage de faire ; il démontre ce faisant que le maillot bleu est pour lui une priorité ! De sa conversation avec Deschamps il nous livre que : « Il ne m’a pas encouragé à rejoindre Chelsea, mais à changer de club ». Pour espérer être sélectionné en équipe de France, il faudrait qu’O. Giroud « joue la quasi-totalité des matchs » d’ici la fin de la saison. 

On ne peut que souhaiter à O. Giroud d’arriver au sommet de sa forme pour ce qui serait son dernier mondial et à Deschamps de faire confiance à son attaquant pour emmener l’équipe de France en Russie. 

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1 Commentaire

  1. CI

    Voilà une façon de regarder le football qui change! Merci Blaise de nous offrir cette perspective en redonnant l'espace pour regarder des personnes, qui semblent souvent disparaître derrière des masques, étiquettes et autres paillettes.