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Vincent Munier ou « l’éternel émerveillé »

Vincent Munier, photographe animalier, nous encourage à l’émerveillement et à l’espérance. Discret et avare en paroles, il ne se considère pas comme un artiste mais comme « un témoin de ce qui se passe », un témoin de « l’art qui se trouve dans la nature ».

 

Vincent Munier. Photo : Internet

 

Son histoire, c’est l’histoire d’un garçon des Vosges qui aime passer son temps dans la forêt plutôt qu’à l’école. C’est l’histoire d’un fils qui reçoit de son père, comme un héritage, la passion de la nature et la pratique de l’art de l’affût. C’est l’histoire d’un homme qui a gardé un cœur d’enfant, qui a construit des centaines de cabanes dans tous les milieux naturels et qui s’émerveille de ce qui nous semblerait un rien. C’est l’histoire d’un homme simple qui ne recherche pas le sensationnel mais le beau, qui se définit comme « un éternel émerveillé ».

A 12 ans, sa vie bascule suite à la rencontre avec un chevreuil dans la forêt proche de chez lui. Il le prend en photo, la photo est floue, mais clair et lumineux est l’appel que ressent Vincent à continuer de prendre des photos. Si vivre proche de la nature était assez évident pour lui, vivre de ses photos, lui semblait moins probable. Et pourtant, petit à petit il se fait une place dans le milieu de la photographie animalière, notamment grâce à sa participation au concours de la BBC Wildlife Photographer of the Year.

Ce qui plait chez Vincent Munier, c’est qu’il a su se faire disciple de grands maîtres, tels que son père ou les naturalistes Paul Géroudet et Robert Hainard. Il se situe dans leur sillage et nous montre comment il a été introduit et initié à son art par des personnes et non par la maîtrise des fiches techniques des derniers Nikon et Canon.

Ce qui plait aussi chez lui, c’est le fait que son succès n’ait pas aliéné sa liberté. Et il reconnait qu’il doit à son père d’avoir appris à « ne pas faire des images pour plaire aux autres mais [à] faire des images qui viennent de toi, de ton intérieur ». Une image réussie pour Vincent Munier ? « C’est une transmission d’une émotion », c’est « retranscrire le moment, l’instant où toi tu as vibré dans la nature ». Il refuse de se laisser formater contre ce qu’il a dans le cœur.

 

Photo : Vincent Munier. Source : documentaire « L’éternel émerveillé »

 

Des fourmis photographiées en contre-jour aux loups de l’Arctique, en passant par le lynx des Vosges et la panthère du Tibet, les photos de Vincent Munier ne laissent pas indifférent. C’est le regard de sa compagne Marie Amiguet qui permet de comprendre ce à quoi Vincent nous entraîne sans le vouloir : l’apprentissage de l’espérance.

L’affût contraint celui qui le pratique de s’effacer et d’attendre des heures dans la nuit et dans le froid sans être garanti de la rencontre rêvée avec l’animal attendu. C’est une école de patience et cela devient une école d’espérance lorsqu’il porte à lire les signes invisibles de la présence. Ce qui fait sa force, selon Marie Amiguet, c’est qu’« il est capable de se nourrir de ce qu’il n’a pas encore vu et ça lui suffit pour avoir des kilomètres de patience ». Et lorsqu’il ne voit finalement pas ce qu’il espérait, il se réjouit simplement des traces et des signes qui lui ont été donnés.

L’affût est une technique à contre-courant du monde de l’immédiateté : il faut non seulement prendre le temps et savoir qu’au bout de ce temps d’attente, il n’y aura peut-être pas la rencontre rêvée. Et pourtant, ce temps d’attente porte déjà en lui toute sa richesse de silence, de méditation et de contemplation. Lorsque la rencontre se réalise, ce n’est pas une victoire, c’est une récompense.

A propos de l’affût, Sylvain Tesson qui a suivi Vincent Munier dans son expédition à la recherche de la panthère des neiges au Tibet, nous dit que « le peut-être-rien-jamais ouvre un intervalle d’espérance et d’accomplissement » et rappelle que « le rapport proportionnel est immense entre ce qui vous est donné à voir et le temps que vous aurez attendu ». Cela ne se vérifie-t-il pas maintes fois dans nos vies ? Savons-nous porter un regard positif sur l’attente ou bien nous sommes-nous laissés emporter par la frénésie de notre société ?

Aux côtés de Vincent Munier, laissons-nous éduquer à regarder, et pour regarder laissons-nous du temps.

 

Documentaire du photographe animalier Vincent Munier : « L’éternel émerveillé »

 

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