Valentin Silvestrov est un compositeur ukrainien né en 1937 à Kyiv. Il vit actellement à Berlin depuis le début de la guerre en Ukraine. On lui doit une abondante création: des œuvres pour orchestre, 9 symphonies, plus de 400 Bagatelles pour piano, un Requiem (en hommage à son épouse Larissa), des pièces pour chœur etc… Sofia Goubaïdoulina (1931), Arvo Pärt (1935) et d’autres compositeurs plus jeunes le considèrent aujourd’hui comme le premier d’entre eux.
Valentin Silvestrov
Dans les années 1960, il est à la pointe de l’avant-garde de son pays, composant et suivant les préceptes du sérialisme qui se développe en Occident. Après cette première période, il renoue avec le néoclassicisme de ses toutes premières partitions en développant une musique qu’il qualifie de « métaphorique ». Silvestrov rompt ainsi avec la fausse dialectique de la tradition et de l’innovation. Il mène la vie studieuse et rêveuse d’un « poète lyrique » que la célébrité n’a guère affecté.
Ce soir, à 19h, au Centre Culturel de l’Ambassade d’Ukraine à Paris sera présenté le livre Entretiens avec Valentin Silvestrov, composition et âme ukrainienne, dédié au compositeur Valentin Silvestrov à l’occasion de son 75 ème anniversaire.
Ce livre présente des conversations avec le compositeur et le philosophe Constantin Sigov et la musicologue Alla Vaysband, ainsi que des hommages rendus par des compositeurs et musiciens de renommée mondiale, comme Arvo Pärt et Gidon Kremer ou la poétesse Olga Sedakova. Combinant souvenirs et réflexions sur la musique et ses propres œuvres, ce livre dresse un portrait vivant et multidimensionnel de Valentin Silvestrov. C’est en quelque sorte un journal oral qui nous est offert, où le compositeur ouvre sa table comme une invitation personnelle à un banquet musical…
L’originalité de cette édition est l’intégration de QR codes qui permettent d’avoir directement accès à l’écoute de la musique de Silvestrov comme ses fameuses Bagatelles ou plus récemment ô Lumière éternelle (2020), pièce dédiée à Dante.
Extrait de la préface de Philippe de Lara (présent ce soir au Centre Culturel de l’Ambassade d’Ukraine à Paris) :
« L’Ukraine a changé ma vie deux fois, la première quand j’ai découvert ce pays, la noblesse de ce peuple, ses tragédies et son combat pour la liberté, qui est la lumière de l’Europe ; la deuxième quand j’ai rencontré la musique de Valentin Silvestrov. Je dois cette rencontre au philosophe Constantin Sigov. Constantin est l’éditeur de Symposium [1]Ndt: Symposium est le titre du livre paru aux éditions L’esprit et la Lettre. Pour l’édition française nous avons choisi le titre , et un interlocuteur privilégié de Silvestrov dans les conversations réunies dans ce livre.
Compositeurs, interprètes, ou intellectuels touchés par la musique de Silvestrov insistent sur ce que cette musique fait à la musique d’aujourd’hui, les chemins qu’elle ouvre, le passé qu’elle nous fait entendre autrement. Dans un documentaire consacré à Silvestrov, Sofia Gubaidulina, une compositrice de sa génération, déclare que Silvestrov est un artiste essentiel parce qu’il a réparé l’histoire de la musique, qu’il lui a permis de repartir après la « pause » de l’avant-garde. « Pause » est un mot de Silvestrov : « Ce qui restera de la musique contemporaine, c’est une pause ». Notez la délicatesse et l’ironie de la formule — on aurait pu dire impasse, ou gâchis. Il faut dire que Silvestrov a su garder ses distances avec l’avant-garde, même dans sa période avant-gardiste, comme il s’est tenu à l’écart de la grandiloquence et des diktats idéologiques de la musique soviétique officielle. Son génie a été de se faufiler, apparemment sans effort, entre les oukases et les modèles impossibles qui ont pesé sur la musique du XXème siècle.
Faites cette expérience : quand vous avez écouté de la musique de Silvestrov et que vous écoutez juste après une autre musique que vous connaissez bien, elle ne sonne pas de la même façon. La musique est comme plus vivante, plus mobile, les grandes architectures familières s’effacent devant une succession d’événements, l’enchâssement des éléments, cette unité formelle de l’œuvre, à la fois mystique et artisanale, qui nous touche chez les grands compositeurs, Bach, Beethoven par exemple, laisse maintenant percer un jaillissement imprévisible, les motifs et les figures prennent pour ainsi dire leur liberté, l’œuvre s’ouvre pour laisser apparaître la mélodie. Tel est le don de Silvestrov. »
Ecouter l’ AUDIO & PODCAST publié sur RTS: Le minimalisme sacré de Valentin Silvestrov
Rendez-vous ce soir au Centre Culturel de l’Ambassade d’Ukraine à Paris pour vivre l’expérience !
References
↑1 | Ndt: Symposium est le titre du livre paru aux éditions L’esprit et la Lettre. Pour l’édition française nous avons choisi le titre |
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