Home > Musique, Danse > Mort du compositeur Krzysztof Penderecki

Mort du compositeur Krzysztof Penderecki

Juif, arménien, polonais d’origine allemande, Penderecki rassemble de nombreuses traditions musicales autour de sa foi catholique.

 

Krzysztof Penderecki. Photo : Source

 

Né en 1933 dans un village de juifs hassidiques, Krzysztof Penderecki subit dès son enfances les affres de la guerre et ne pouvant aller à l’école, il étudie tout seul le violon. Après la guerre il entre au conservatoire de Cracovie où il devient professeur. En 1959 il rafle tous les prix du concours de Varsovie pour les jeunes compositeurs et il est reconnu internationalement comme un représentant de l’avant-garde musicale. Il utilise les instruments à corde comme des percussions, introduit différents effets sonores à partir d’objets, utilise la musique atonale et sérielle.

Pourtant on ne saurait classer Krysztof Penderecki dans les « modes » de la musique du XXème siècle car il a su lutter avec sa foi contre les différentes idéologies de son temps. Il s’oppose à une avant-garde musicale qui admire ses œuvres mais cherche d’abord à déconstruire et aboutit à un vide, où plutôt à une nouveauté coupée du sens de la vie et de la tradition. Krystof Penderecki s’enracine ouvertement et profondément dans la tradition juive et chrétienne et cherche à unir dans sa musique la réalité d’aujourd’hui à l’héritage culturel judéo-chrétien. Il s’oppose ouvertement au communisme et participe activement au mouvement qui aboutira à la chute du bloc soviétique. Il ne se laisse pas séduire par le libéralisme matérialiste occidental, il dénonce la superficialité et le « populisme musical » qui veut imposer une culture de masse.

En 1966 est jouée pour la première fois sa magnifique passion selon Saint Luc composée pour le 700ème anniversaire de la cathédrale de Münster. La composition s’inspire directement et explicitement de celle de Jean-Sébastien Bach. Cette œuvre est saluée par le public pour son originalité. De nombreuses techniques non orthodoxes (sic) sont utilisées pour le chœur dont les cris, le parler, le ricanement et le sifflement. Cela n’est pas au service d’une excentricité moderniste mais nous plonge au niveau sensoriel et émotionnel dans le pathos du chemin de croix. Penderecki intègre à la passion de Luc plusieurs textes des différents évangiles, les paroles du Christ en Croix et un très beau Stabat Mater.

 

 

Les textes sont en latin pour donner une dimension intemporelle mais Penderecki est à l’écoute de la souffrance d’aujourd’hui et il compose de nombreuses pièces autour des événements douloureux qui ont marqué sa vie, comme son Dies Irae, pour la commémoration des victimes d’Auschwitz ou son « Thrènes à la mémoire des victimes d’Hiroshima » ou son concerto pour piano dédié aux victimes du 11 septembre.

Penderecki est aussi enraciné dans sa culture polonaise, il compose un requiem polonais dédié aux héros de patrie. Cette œuvre a été composée sur plusieurs décennies et évoque le souvenir de Lech Walesa et des victimes de Solidarnosc, son ami le cardinal Wyszynski, Maximilien Kolbe, Jean-Paul II et les victimes de Katyn.

 

Chaconne pour Jean-Paul II

 

En 1979, Penderecki est reçu au Vatican par Jean-Paul II pour interpréter son œuvre Paradise Lost, qui retrace de façon poignante la chute d’Adam et d’Eve et l’exil du Paradis d’Eden. Jean-Paul II manifeste sa reconnaissance et son appréciation à la fin de la représentation par ces mots : « Il ne s’agit pas là simplement de la chronique de certains événements. On y trouve enregistrées les expériences fondamentales auxquelles l’homme, au cours de son existence, doit toujours revenir, quelles que soient les précisions apportées par l’herméneutique de la Bible. Je dirai que les premiers chapitres du Livre de la Genèse protègent contre le risque d’aliénation ce qu’il y a en chacun de nous de substantiellement humain. (…) Personnellement, je me réjouis beaucoup que cette musique soit l’œuvre d’un compositeur polonais. C’est encore un témoignage de l’origine chrétienne qui imprègne toute notre culture. Et parce que le langage de la musique est plus universel que celui de la littérature, je souhaite que ce fruit de la créativité artistique de l’un de mes compatriotes puisse devenir une source d’émotion artistique pour tous les hommes d’aujourd’hui, quelle que soit leur nationalité. J’en remercie le Seigneur du fond du cœur ». [1]Jean-Paul II, Discours du 9 février 1979

Ses commentaires sur la musique d’aujourd’hui et sur son époque sont édités sous le titre Le labyrinthe du temps.

Il dirige ici l’exécution de sa 7e symphonie : les 7 portes de Jérusalem.

 

References

References
1 Jean-Paul II, Discours du 9 février 1979
Vous aimerez aussi
La Messe en Si mineur de Bach
Élections en Pologne : où allons-nous ?
Stabat Mater
Bach, la passion selon saint Matthieu : le Christ et Pierre