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Un candidat atypique à la présidence du Sénégal

Le Sénégal, comme la France, aura ses élections présidentielles en 2012 – elles sont prévues le 26 février 2012 –. Maître Abdoulaye Wade, l’actuel Président, est au pouvoir depuis l’an 2000. Opposant historique au Parti Socialiste de Senghor puis de Diouf, il réussit à remporter les élections avec le Parti Démocratique Sénégalais (PDS), parti libéral, en suscitant une immense espérance chez les jeunes : l’alternance s’annonçait pleines de promesses après quarante ans de relatif immobilisme.

© Points-Coeur

Depuis des mois la grogne monte dans les quartiers populaires de Dakar. Le 23 juin, un immense rassemblement s’est opposé à la réforme de la Constitution proposée par le Président qui lui permettait d’être élu au premier tour avec 25% des voix. A l’initiative de cette contestation historique, « la société civile », composées de formations et organisations liées à aucun parti, crée le mouvement « M 23 ». Sa vedette appartient au mouvement « Y’en a marre » fondé par des rappeurs mené par Cyril Touré dit Thiat. Si ces mouvement refusent d’entrer dans le débat politique, ils sont l’écho du mécontentement social au Sénégal.

Avec 200 000 jeunes qui arrivent chaque année sur le marché du travail, le développement économique du Sénégal ne suit pas. La partie la plus visible de l’iceberg du disfonctionnement sénégalais est l’électricité. Depuis presque un an les coupures se multiplient plongeant le pays dans des heures, voir des jours entiers sans courant. En 2013, on estime que le déficit de production atteindra 256 mégawatts, soit 50% de la demande d’énergie. La SENELEC, la société nationale d’électricité est en faillite et dans l’impossibilité de payer son combustible.

Dans cette situation, les populations n’ont que « corruption », « gabegie » et « incompétence » à la bouche… et les gens sont très désespérés. Pour presque tous, l’unique salut est de quitter l’Afrique et de s’installer en France.

C’est dans ce contexte que nous avons invité notre ami Bruno d’Erneville pour nous parler de la situation politique du Sénégal afin d’y voir plus clair, et de tenter d’avoir quelques armes pour juger des forces en opposition et des candidats. Bruno est un acteur engagé de la vie civile. C’était sans savoir, qu’entre-temps, Bruno avait déposé sa candidature pour les présidentielles !

Lorsqu’en 1999 il revient au Sénégal (il était parti étudier en France après le bac) avec sa femme est ses deux enfants, son projet est de monter une entreprise de contrôle technique. Il réussira ce pari fou de concurrencer l’entreprise « Veritas », qui détenait le monopole dans ce secteur. Maintenant « Alpages » est bien implantée au Sénégal et dans la sous-région (Mali, Guinée, Gambie…). Ce défi, il l’a mené « pour aider sa famille » sénégalaise comme le veut l’entraide traditionnelle africaine. Et sa réussite lui permet de donner généreusement autour de lui. Mais la misère frappe à sa porte. Comme chef d’entreprise, il sent que son action est limitée. Il décide alors de s’orienter en politique avec un groupe d’amis. Cette décision naît d’un cri, celui des pauvres et de leur souffrance : « Ca me déchire » ! Sa femme, au début, a peur… « Tu prends des risques ! » Il le sait. Les risques sont nombreux, pour son entreprise, pour sa famille, pour lui. Mais, « que dirais-je à mes enfants ? Que je n’ai rien fait pour mon pays ? »

Pour lui, le constat est simple : les politiques ont failli. Il dit stop à sa manière en proposant un programme clair et prometteur. Ses promesses sont de faire travailler le pays, de l’unir et de lui donner une vision d’avenir. En visite dans un village, le groupe des femmes lui demande ce qu’il leur donnera une fois élu, déplorant que le moulin à mil promis n’est jamais arrivé. Bruno, avec chaleur leur répond que s’ils le veulent leur moulin, ils n’ont qu’à se bouger, mais que lui ne leur promet pas !

Nous écoutons Bruno nous exposer son programme que l’on peut découvrir sur son site : Bruno 2012. Sans juger de sa pertinence, nous sentons que la motivation de fond est de s’attacher plus à la qualité qu’à la quantité, à une culture de l’excellence capable de redonner « une nouvelle confiance nationale ». Mais la grande question qui reviendra à la fin, c’est : « Comment ferez-vous pour être élu si vous n’avez pas de parti ? » Car la question est là, Bruno est inconnu dans le paysage politique sénégalais. Pour Bruno, les partis sont sources de clientélisme, de népotisme et de corruption. Le Président Wade est à la fois chef de l’Etat et chef du PDS. Le drame se joue ici. Pour sortir le pays de l’ornière, il faut le sortir du « régime des partis », d’autant que le PS et le PDS ont certes un réseau organisé sur tout le territoire, mais ils ne sont plus crédibles. Les mouvements du 23 Juin prouvent que la « société civile » a une audience beaucoup plus large et représentative. Il s’agit, sans les instrumentaliser, de montrer que le programme proposé répond à leurs attentes.

Bruno est-il un utopiste, un idéaliste, un rêveur ? C’est en tout cas un passionné et un homme de foi, et il n’hésite pas à dire qu’il est mu par le désir de témoigner pour faire bouger et réveiller les consciences. Ce soir-là, au fond de la banlieue de Dakar, un vent d’espérance a soufflé et les cœurs désabusés se sont surpris à avoir envie d’y croire !

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4 Commentaires

  1. Tafa

    reformater les consciences si les sénégalais en ont encore après avoir un peu mangé: faut pas avoir faim au sénégal avec ces gens du Pds

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